Longtemps faibles et complaisantes, les autorités maliennes commencent à traquer les salafistes au nord du Mali et à les livrer à leur pays d’origine. Quatre mauritaniens ont été ainsi extradés le 22 février 2008 vers la Mauritanie par les autorités du Mali. Leur interpellation est intervenue quelques jours avant l’annonce par une agence de presse locale de l’évasion intrigante, à Zouerate (au nord-Est), de 3 salafistes dont Dahoud Ould Sebty recherchés dans le cadre du démantèlement de la cellule jihadiste responsable de l’attaque d’Aleg.
Les salafistes présumés arrêtés au Mali ont été présentés le 10 mars 2008
devant le Parquet de Nouakchott.
Yahya Abou Amar le nouveau « Ben Laden du Sahara»
Ils sont accusés d’appartenance à l’ex-Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC- rebaptisé «Al-Qaïda au Maghreb Islamique») dont les zones 9 et 5 couvrant le nord du Mali et l’Est mauritanien zones placées depuis quelque temps sous l’autorité de Yahya Abou Amar (voir photo) qui a remplacé de Moctar Ben Mokhtar alias «Belaouar», comme l’atteste les procès-verbaux des enquêtes menées récemment en Mauritanie. L’arrestation des quatre prévenus a eu lieu au nord du Mali en collaboration avec les services de renseignements mauritaniens (DSE?, BED?, B2 ? Nul ne sait !). Toujours est-il que trois parmi eux ont été inculpés et écroués à la prison civile de Nouakchott. Ils ont été poursuivis pour "appartenance à une organisation terroriste, entraînements militaires à l’extérieur du pays et livraison d’équipements et matériels à une organisation terroriste". Un quatrième prévenu (Ould Nane) également interpellé au nord du Mali, a été remis en liberté sans qu’aucune charge ne soit retenue contre lui. Les trois prévenus écroués sont : Abdellahi Ould Chrif Taher «Abou Farés», Hakim Ould Mohamed M’Bare «Houdheiva» et Ahmed Ould Hada. «Abou Farés» doit-on le souligner n’est autre que le frère de Mohamed El Moustapha Ould Abdelkader diabolisé par la presse locale et internationale dans le cadre du dossier relatif à l’attaque d’Aleg contre les touristes français. Attaque à la quelle il n’a pas été associé et de laquelle il n’a pas été informé -comme l’a révélé l’enquête-, les meurtriers étaient venus le voir à quelques kilomètres du lieu du crime solliciter son concours pour obtenir un moyen de transport. Moustapha Ould Abdel Kader qui n’a jamais séjourné dans les camps du GSPC au Nord du Mali avait été arrêté en août 2006 dans le cadre des recherches lancées pour arrêter «Abou Fares» qui aurait rejoint le GSPC bien avant cette date et qui se retrouve aujourd’hui derrière les barreaux . Ces extraditions constituent la preuve de la relance de la coopération sécuritaire sous-régionale dans la traque des salafistes présents dans le vaste Sahara qui traverse une partie des territoires, mauritanien, algérien, malien, nigérien et tchadien. Jusqu’ici, chaque pays avait sa stratégie propre. Ce sont les récentes critiques publiées dans le bulletin d’alerte lancé le 13 février 2008 par le Département d’Etat américain contre les risques récurrents au nord du Mali avec la présence avérée dans cette zone de groupes armés liés à «Al-Qaïda au Maghreb Islamique» qui semblent avoir poussé les autorités maliennes à agir. En plus, le soutien sécuritaire apporté par les USA doit avoir donné du courage supplémentaire aux maliens -souvent poltrons- face aux jihadistes du Sahel. En juin 2005, des unités militaires maliennes qui avaient fait jonction avec les unités mauritaniennes lancées par Ould Taya à Taoudenni à la recherche des attaquants de Lemgheiti, avaient demandé -selon une source bien informée- à être escortées pour regagner leur base à Kidal. Avec l’état de guerre latent en Algérie depuis 1992 , les affrontements qui ont eu lieu au Mali, au Niger et au Tchad en 2004 et les attaques menées en Mauritanie en juin 2005, décembre 2007 et février 2008, le nord du Mali a toujours été depuis le début des années 2000 une base de repli, d’approvisionnement et d’entraînement pour les salafistes. Cette zone qui abrite également les larves d’une nouvelle rébellion touarègue a été récemment le théâtre de plusieurs actes violents perpétrés par les salafistes avec la mort de 14 personnes, quand un camion venant d’Algérie a sauté sur une mine l’été 2007, ainsi que l’attaque et les détournements de convois civils et militaires près des frontières avec le Niger, et un cas de vol à main armée au nord de Tombouctou. Le maintien et l’intensification de la coopération sécuritaire sous-régionale et internationale pourraient avec d’autres mesures (propres à chaque pays) retarder ou empêcher l’établissement d’un nouvel Afghanistan du Sahara. Une perspective dangereuse pour la stabilité sous-régionale. MAOB
Nouvelle prise d’otages occidentaux au Sahara : Les salafistes rempilent Al Qaïda au Maghreb a diffusé les images d’un couple de touristes autrichiens (Andrea Kloiber, et Aolfgang Ebner, enlevés le 22 février en Tunisie. Les ravisseurs se sont retirés au nord du Mali, après avoir séjourné dans la région de Tébéssa et Oued Souf, à la frontière algéro-tunisienne . Un diplomate autrichien de haut rang est arrivé à Bamako et a commencé à négocier par téléphone avec les ravisseurs, qui réclament une rançon et la libération de plusieurs salafistes détenus en Algérie et en Tunisie. La libération des salafistes mauritaniens en détention en Mauritanie n’a pas été revendiquée par l’organisation. L’ultimatum fixé par Al Qaïda au Maghreb islamique expire dimanche 15 mars à minuit. Il a été renouvelé jusqu’au 23 mars. Les otages sont aux mains d’un groupe dirigé par le salafiste algérien Abdelhamid Abou Zeïd (impliqué dans l’attaque de Lemgheiti) et établi à 150 km de Kidal, dans une zone d’ordinaire contrôlée par la tribu touarègue El Barabich. Abdelhamid Abu Zeid dépend de la Zone 9 placée sous l’autorité deYahya Abou Amar le nouvel «émir» du Sahara. Selon le journal «Al Khabar», les ravisseurs demandent la libération de 10 islamistes tunisiens emprisonnés en Tunisie. Le quotidien «Annahar», citant des "sources algériennes concordantes", a indiqué que les ravisseurs ont demandé la libération de cinq islamistes algériens, dont Amar Saïfi, dit "El para", (le parachutiste), ancien militaire et l’un des ex-principaux "émirs" du GSPC, qui s’est rallié à Al-Qaïda en septembre 2006, et qui fut l’instigateur de l’enlèvement en 2003 dans le sahara algérien d’un groupe de 32 touristes européens. Ces touristes -suisses, allemands et néerlandais - avaient été libérés après le versement par Berlin d’une rançon de près de 5 millions d’euros. Une otage allemande avait trouvé la mort dans le désert des suites d’une insolation. Arrêté au Tchad et remis à l’Algérie, "El para" est depuis en l’attente d’un procès reporté à plusieurs reprises et programmé le 24 mars 2008. Les ravisseurs ont également demandé la libération de Bouderbal Fatah, alias Abdelfattah Abou Bassir, "émir" de la brigade spécialisée dans les attentats-suicides à Alger. Il avait été arrêté en octobre 2007 à Alger. Al-Qaïda au Maghreb a demandé aussi la libération de Mossaab Abou Abdallah, un des piliers de son état-major, donné pour mort dans une opération de l’armée algérienne en avril 2007. En fait, grièvement blessé, il aurait été soigné et serait emprisonné en Algérie. La ministre autrichienne des Affaires Etrangères, Ursula Plassnik, a déclaré que "les ravisseurs avaient formulé des demandes politiques dont la satisfaction ne tombe pas dans le domaine de responsabilité de l’Autriche".
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