La Commission électorale nationale indépendante (CENI) est-elle réellement indépendante? La réponse de la Coordination de l’opposition démocratique (COD) à cette question est évidemment «non».
C’est le contraire qui aurait étonné puisque rien n’empêchera alors l’opposition au pouvoir du président Mohamed Ould Abdel Aziz de descendre dans l’arène, ici et maintenant, pour tenter de terrasser l’ogre UPR (Union pour la République) lors d’élections municipales et législatives données pour imminentes.
Le refus de la COD de reconnaître l’indépendance de la CENI relèverait bien, selon ses adversaires de la Majorité, de la politique politicienne dans laquelle elle excelle, chargeant le pouvoir de tous les maux et mots. Mais, il faut le dire aussi, le gouvernement, par ses hésitations, ses « machinations » même, contribue à donner raison à la COD. Comment ne pas le croire quand on entend, sur les ondes de la radio et de la TVM, que la CENI a signé un accord avec l’Office national des Statistiques (ONS), une direction du ministère des Affaires économiques et du Développement, pour mener à bien le recensement à vocation électorale ? Ainsi, ce qui devrait servir à l’établissement du fichier électoral revient, par cette manipulation gouvernementale, entre les mains de l’administration qui aura tout simplement repris à la CENI d’une main ce qu’elle a donné de l’autre ! Et l’on comprend alors tout l’intérêt, pour le gouvernement, de ne pas s’empresser à dégager le budget de fonctionnement de la CENI pour lui permettre d’être réellement indépendante. Sans cela, elle n’aura d’autres perspectives que de vivre en parasite, se voyant obliger de déléguer la plupart des actions qu’elle devra engager dans le cadre de la mise en œuvre d’un processus électoral aux contours encore très flous.
L’appel à la rescousse des services et administrations publiques, même si la CENI reste le commanditaire en chef des actions à mener, fait peser des soupçons d’inféodation de la Commission à l’Administration. L’ONS, qui mettra en œuvre le recensement à vocation électorale, est une administration qui est d’abord aux ordres du gouvernement avant d’être soumise aux exigences d’un accord signé avec une CENI sans ressources, au propre et au figuré.
C’est là un argument fort que la COD saura utiliser au bon moment, quand elle entamera des discussions sérieuses avec le pouvoir ou se verra obligée de justifier ses réserves par rapport à l’initiative du président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir. La sorte de confusions des genres qui existe entre l’administration et la CENI est traduite, dans les faits, par l’absence d’une indépendance financière de la CENI mais aussi par le fait que tout ce qu’elle doit entreprendre, comme opérations techniques, ne peut se faire sans le recours aux services du gouvernement ! Un échafaudage que la COD a bien remarqué, quand le ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation avait créé en son sein une direction générale chargée des élections que d’aucuns avaient vue comme le dédoublement de la CENI. En fait, le bras « armé » du gouvernement pour orienter l’ensemble du processus vers la direction voulue par le pouvoir.
Sneiba elhourriya
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