Al-Qaida dĂ©taille sa rupture avec Belmokhtar   
07/06/2013

Une lettre récemment publiée de la haute direction d’al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), adressée à Mokhtar Belmokhtar, fait apparaître au grand jour les divergences entre les deux camps terroristes.



Ce message très cinglant accuse Belmokhtar, également connu sous les pseudonymes de Laaouar ou Khaled Abou El-Abbas, d’avoir ignoré les ordres du commandement central d’AQMI en Algérie. Il fait apparaître la profondeur des querelles internes au réseau et les litiges concernant le paiement des rançons.

Ce document a été découvert par l’Associated Press à l’automne dernier à Tombouctou, et les détails en ont été publiés le 29 mai par le bureau de l’agence de Dakar. Cette lettre de dix pages est datée du 3 octobre 2012 et signée par les quatorze membres du Conseil de la Choura d’AQMI.

Dans l’un de ses paragraphes, AQMI parle des problèmes de communication avec le commandement central d’al-Qaida au Pakistan et en Afghanistan, affirmant n’avoir "reçu qu’un petit nombre de messages du Cheikh ben Laden et d’Ayman al-Zawahiri, malgré tous ceux que nous avons envoyés".

Cette lettre accuse également Belmokhtar d’avoir refusé de répondre aux appels téléphoniques de la direction, de n’avoir envoyé aucun rapport administratif et financier, de ne pas participer à certaines réunions, et de ne pas avoir appliqué les décisions de la direction. Elle souligne par ailleurs que les actions de Laaouar pourraient avoir "des effets destructeurs pour l’entité de l’organisation et pourraient conduire à sa chute".

"Pourquoi les émirs successifs de cette région sont-ils les seuls à éprouver des difficultés avec toi ?", demande la direction du groupe terroriste à Belmokhtar. "Et toi en particulier, à chaque fois. Ou ont-ils tous tort et notre frère Khaled a-t-il raison ?"

Ce document détaille trente points au cœur des disputes entre Belmokhtar et AQMI. Il décrit cette relation comme "une blessure sanguinolente, parce qu’il n’accepte plus et n’applique pas les directives concernant les otages étrangers enlevés pour une rançon".

Cette lettre adressée à Belmokhtar avait été envoyée deux mois avant qu’il ne coupe officiellement les liens avec la branche nord-africaine d’al-Qaida et ne fonde sa propre brigade des "Signataires par le sang" qui a mené l’attaque d’In Amenas. Le groupe terroriste de Belmokhtar a également participé à une récente attaque au Niger qui a tué au moins vingt personnes.

Bien que la plupart des observateurs estiment que cette lettre n’apporte aucun élément nouveau, elle pourrait néanmoins venir confirmer les informations déjà discutées par les journalistes et les spécialistes des groupes terroristes au Sahel.

Le spécialiste du terrorisme Islamou Ould Mustafa a expliqué que "ce qui serait considéré comme relativement nouveau, ce serait de comprendre la nature de la relation existant entre AQMI et al-Qaida."

"Cette lettre souligne que les leaders d’AQMI ne sont pas satisfaits du manque de réponse de leur organisation-mère al-Qaida, dans la mesure où les réponses ne parviennent pas dans les délais, quand elles leur parviennent. Cela pourrait se comprendre si on le replace dans le contexte naturel, à savoir les difficultés de transport, les contrôles de sécurité très stricts imposés aux militants et la mort de certains de leurs leaders", a-t-il ajouté.

Hamdi Ould Dah, expert en stratégie et sécurité, estime toutefois que la divulgation de cette lettre apporte des informations nouvelles, dans la mesure où elle révèle des détails tels que les noms des quatorze commandants sur le terrain.

De plus, "elle témoigne du début de l’effondrement du bras médiatique d’al-Qaida, notamment si nous lions cela à l’absence de rôle joué par Sanda Ould Bouamama, le porte-parole d’Ansar al-Din, qui a été ces derniers mois la voix d’al-Qaida."

Ould Dah souligne que cette lettre soulève un certain nombre de questions, notamment sur le point de savoir si "le réseau de communication d’al-Qaida a été infiltré. Les personnes qui travaillent dans ce bureau des médias sont-elles vraiment fidèles à l’organisation ?"

"Personnellement, je déduis de cette lettre qu’al-Qaida n’est pas encore parvenue à mettre en place une autorité hiérarchique et une direction de ses structures internes", a expliqué cet analyste à Magharebia. (Magharebia)


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