Rentré fin novembre en Mauritanie après six semaines d’hospitalisation en France, le chef de l’État a repris en main les rênes du pays. Rupture du dialogue avec l’opposition, refus de la formation d’un gouvernement d’union nationale... L’heure n’est pas aux concessions.
Il n’y aura eu ni un avant ni un après. « L’accident » du 13 octobre 2012, qui a failli lui coûter la vie, n’a pas fait de Mohamed Ould Abdelaziz un autre homme. « Je suis toujours le même », assurait le président mauritanien à J.A. en décembre 2012. Blessé par balle à l’abdomen, officiellement à la suite d’une méprise d’un jeune lieutenant de l’armée de l’air, « Aziz » a été contraint de séjourner en France pendant près de six semaines afin d’y être soigné.
Un éloignement forcé, qui n’a étonnement pas eu de conséquences politiques. Bien que le président ait refusé de déléguer ses pouvoirs (il assure avoir continué de diriger le pays depuis la résidence privée où il séjournait, située à 120 km de Paris), la Mauritanie est restée calme : certes ralenties, les institutions ont continué de fonctionner.
Surtout, alors que la vie politique du pays a toujours été rythmée par les putschs (Aziz lui-même est arrivé au pouvoir par un coup d’État le 6 août 2008, avant d’être élu en juillet 2009), il n’y a pas eu un seul mouvement au sein de l’armée.
Car, à Nouakchott, le chef d’état-major, Mohamed Ould Ghazouani (considéré comme l’alter ego d’Ould Abdelaziz), avait pris les choses en main. Chaque jour a eu beau apporter son lot de rumeurs, la présidence s’est toujours refusée à communiquer sur l’état de santé d’Aziz, malgré les demandes répétées de l’opposition. Une stratégie payante puisque, lors de son grand retour à Nouakchott le 24 novembre 2012, il a pris tout le monde de court : non seulement il est apparu en forme, mais aussi fermement décidé à reprendre les commandes de son pays.
Tensions
Alors que les tensions avec son opposition n’ont jamais été aussi vives, Mohamed Ould Abdelaziz ne lui a fait aucune concession. En retrouvant le fauteuil présidentiel, il a fait taire l’argument du vide à la tête de l’État formulé par ses détracteurs. Mais s’ils n’ont cessé en son absence de dénoncer la « vacance du pouvoir », les membres de la Coordination de l’opposition démocratique (COD) ont aussi amorcé un dialogue inédit avec une partie de la majorité présidentielle (Union pour la République, UPR).
« Un second rendez-vous était prévu, mais il n’a jamais eu lieu », déplore Saleh Ould Hanena, président du parti Hatem. Une chose est sûre : pour Aziz, l’heure n’est pas à l’ouverture. D’un revers de main, le chef de l’État a balayé le projet de gouvernement d’union nationale formulé par Messaoud Ould Boulkheir, président de l’Assemblée nationale et leader de la Convention pour l’alternance pacifique (CAP, coalition de l’opposition dite modérée) : «Cette proposition est dépassée. »
Par Justine Spiegel, envoyée special Source: Jeune afrique
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