Le prĂ©sident soutient son Gouvernement contre les censeurs   
02/07/2008

Dans un discours adressĂ© le 2 juillet  Ă  la Nation, le prĂ©sident Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi s’est interrogĂ© sur les mobiles qui ont procĂ©dĂ© Ă  la motion de censure dĂ©posĂ©e, avant que le Gouvernement ne prĂ©sente sa dĂ©claration de politique gĂ©nĂ©rale devant le Parlement, par des dĂ©putĂ©s, Ă  majoritĂ©, appartenant au parti au pouvoir «ADIL».Le prĂ©sident de la RĂ©publique  a demandĂ© aux initiateurs de la motion de rĂ©viser leur position pour ne pas le contraindre Ă  exercer ses prĂ©rogatives constitutionnelles, parmi lesquelles, la dissolution du Parlement.



 Le prĂ©sident Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi a Ă©galement rĂ©agi aux «rumeurs sur une crise avec certains chefs militaires», renouvelant sa confiance Ă  ces derniers, et  indiquant qu’il compte sur ALLAH d’abord,  et sur l’ensemble des forces armĂ©es et de sĂ©curitĂ©, ensuite. 


                              Discours du prĂ©sident de la RĂ©publique
"Citoyens, Citoyennes,
Je m’adresse à vous aujourd’hui alors que vous suivez les démarches en cours pour engager une motion de censure contre le gouvernement, ce qui constitue un précédent dans l’histoire du pays.
Je m’adresse à vous pour réaffirmer tout d’abord mon solide attachement à l’option démocratique qui m’a permis de gagner votre précieuse confiance quand je m’étais engagé à servir le pays avec sincérité, sérieux et dévouement. Je voudrais vous réaffirmer ensuite ma détermination à œuvrer, sur la base de cette confiance et conformément à mes responsabilités constitutionnelles, à consolider cette option et à la préserver contre toute dérive et ce, quel qu’en soit le prix.
Je m’adresse à vous aussi, tout en étant profondément convaincu qu’il est du droit des députés et, mieux, de leur devoir d’assumer leur mission naturelle de contrôler l’action du Gouvernement, de lui demander des comptes et, au besoin, d’exprimer leur défiance à son égard.
Toutefois, comme vous,   je me pose la question sur les mobiles et les visĂ©es rĂ©elles qui sous-tendent, Ă  ce moment et dans ces conditions prĂ©cises, les actions visant la dĂ©fiance Ă  l’égard d’un Gouvernement Ă  peine installĂ©.
Vous savez, comme moi, que les mobiles invoqués, de façon explicite ou implicite, sont divers. Certains d’entre eux, par exemple, relèvent d’ambitions personnelles ; d’autres sont l’expression de reproches de militants à l’égard de leur formation politique alors qu’en partie aussi il y en a qui procèdent du refus de l’élargissement de la majorité présidentielle et dans certains autres cas, ces mobiles relèvent d’un désir de réformes et d’une crainte de retour vers des pratiques du passé. Toutes ces raisons invoquées, en dépit de l’importance de certaines d’entre elles, ne justifient pas la situation qui prévaut à l’heure actuelle.
Les ambitions personnelles pourraient bien être légitimes mais ce procédé n’est pas le meilleur moyen pour y parvenir. Les institutions constitutionnelles sont beaucoup plus importantes pour servir de tremplin à de telles ambitions. Pour ce qui est des reproches que certains font à leur parti, il s’agit de questions qui peuvent être traitées au sein des formations politiques ou à travers tout autre procédé légitime qui ne conduit pas au blocage des institutions.
S’agissant de l’élargissement de la majorité présidentielle, il convient de souligner que c’est là un noble dessein pour toute majorité qui voudrait gouverner de manière plus confortable, particulièrement si ceux qui l’ont rejointe partagent avec elle l’essentiel du programme d’action, surtout pour un pays comme le nôtre où l’on éprouve un besoin réel de cohésion et de resserrement des rangs.
Par contre, je voudrais rassurer ceux qui visent sincèrement la réalisation des réformes en leur disant que leur objectif est le mien et qu’il est le fondement du contrat qui me lie avec tous mes collaborateurs, quel que soit le niveau qu’ils occupent au sein de l’appareil étatique, abstraction faite de leur profil et des positions qui ont été les leurs par le passé. Mon vœu le plus cher est que l’option de réforme soit une exigence de tous les élus, un comportement pour chaque fonctionnaire et un objectif pour chaque citoyen. Je resterai attentivement à l’écoute de tous ceux qui formulent des critiques objectives et désirent, en toute sincérité, la conduite des réformes.
En ce qui concerne les rumeurs qui circulent au sujet de la relation entre le Président de la République et certains officiers supérieurs, je souligne que ces officiers exercent pleinement les charges professionnelles qui leur sont imparties et méritent, de ce fait, ma confiance dont ils jouissent de façon entière. Je compte d’abord sur Allah, puis sur l’ensemble des éléments des nos forces armées et de sécurité pour la poursuite, dans les règles de l’art, des nobles missions assignées à ces corps.

Citoyens, Citoyennes,
Les démarches engagées visant la défiance à l’égard du gouvernement suscitent l’étonnement pour deux raisons :
La première est que la plupart des initiateurs de la motion de censure appartiennent au parti qui dirige le gouvernement en sa qualité de formation disposant de la majorité d’élus au sein du parlement. Il est tout à fait paradoxal que les députés de la majorité s’élèvent contre leur propre gouvernement et qu’ils veuillent marquer leur défiance à l’égard d’un gouvernement dont ils sont censés être le soutien naturel.
La seconde raison est que le gouvernement n’a même pas encore eu à présenter son programme politique pour que celui-ci soit accepté ou rejeté en toute connaissance de cause.
De surcroît, il s’agit d’un gouvernement qui, venant d’être formé, n’a pas fait le minimum de temps permettant de juger objectivement ses performances. Quelles sont alors les véritables motivations de la défiance à l’égard d’un gouvernement installé seulement depuis un mois et demi ? Pourquoi cet empressement et cette propension excessive à lui faire supporter des erreurs qu’il n’a même pas eu le temps de commettre ?
 
Citoyens, Citoyennes,
 
Tout en créditant de bonne foi les initiateurs de la motion de censure et ceux qui les ont rejoints et en les remerciant pour le soutien qu’ils m’ont réitéré dans leurs déclarations ainsi que pour leur disponibilité à travailler avec moi à la réalisation du programme politique pour lequel les citoyens m’ont élu, je les convie tous à réviser leur position et à mettre un terme à une initiative qui est de nature à perturber le fonctionnement de nos institutions constitutionnelles et à menacer leur stabilité.
Je les convie tous à ne pas me laisser penser que la confiance dont je les crédite n’est pas au bon endroit et me conduire ainsi à assumer pleinement mes responsabilités constitutionnelles, y compris la possibilité de dissoudre l’assemblée nationale.
Je souhaiterai ne pas être astreint à une telle décision parce que je suis conscient qu’une telle option nous coûtera du temps, des efforts et des moyens que je souhaite voir consentis au profit du développement de notre pays, de l’amélioration de la sécurité alimentaire, de l’éducation, de la santé et de tout ce qui peut contribuer au bien être de notre cher peuple.
Toutefois, je n’hésiterai pas à prendre cette décision s’il m’apparaît que cela est nécessaire pour redresser la situation, consolider la démocratie et éviter que les immenses espaces de liberté ne soient détournées de leur objectif et exploitées aux fins de blocage de l’action du gouvernement et de dégradation de l’image de l’institution législative.
Quelle que soit par ailleurs la décision que je serai amené à prendre, je demeurerai attaché à la tradition de concertation qui a, dès le départ, été le fondement de notre action. Je veillerai à ce que notre peuple continue à jouir des opportunités que lui confère notre jeune expérience démocratique en matière de liberté, de cohésion et d’audience à l’échelle internationale.
ALLAH dit :" Consulte-les dans la conduite des affaires; mais une fois ta résolution prise, confie-toi à ALLAH ; ALLAH aime, en vérité, ceux qui se confient à Lui ".
Vive la Mauritanie, libre, démocratique et unie".
Le président de la République
Sidi Ould Cheikh Abdellahi


Les députés frondeurs réagissent
 Dans une dĂ©claration rendue publique l’après-midi du 2 juillet  les dĂ©putĂ©s instigateurs  de la motion de censure contre le Gouvernement ont critiquĂ© le discours du prĂ©sident de la RĂ©publique, et rĂ©affirmĂ© leur dĂ©termination Ă  poursuivre leur dĂ©marche visant Ă  faire chuter  le Gouvernement dirigĂ© par Yahya Ould Ahmed El Waghef.
Ci-dessous une  traduction de la dĂ©claration  des dĂ©putĂ©s frondeurs:
«Nous avons reçu avec désespoir et abattement le discours du président de la République adressé à la Nation, sur un ton de menaces, prenant partie pour un groupe minoritaire décrié par le peuple contre une majorité parlementaire qui lui a déjà accordé sa confiance et constitué, jusqu’à présent, son soutien. Cette majorité parlementaire attendait du Président de la République qu’il se concerte avec elle à propos de la situation qui prévaut afin de trouver la solution qui convient pour préserver l’intérêt supérieur de la Nation.
Face Ă  cette confrontation, nous soumettons au peuple mauritanien et Ă  toutes ses forces vives notre point de vue sur cette situation :
-         Nous restons attachĂ©s Ă  toutes nos prĂ©rogatives garanties par la Constitution, tout en considĂ©rant les propos menaçants du prĂ©sident de la RĂ©publique comme une atteinte aux prĂ©rogatives constitutionnelles et une violation du principe de la sĂ©paration des pouvoirs consacrant  la dictature , l’hĂ©gĂ©monie et le retour au pouvoir personnel et partant, nous rejettons dans son fond et dans sa forme, cette manière de gĂ©rer les institutions de l’Etat et n’accepterons pas que la dissolution du Parlement soit une Ă©pĂ©e de Damoclès suspendue au-dessus de nos tĂŞtes, pour nous soumettre Ă  la rĂ©signation en nous Ă©cartant des responsabilitĂ©s que nous a confiĂ© le peuple.
-         Nous rĂ©affirmons que nous tirons notre lĂ©gitimitĂ© du Peuple, n’avons de considĂ©ration que pour cette confiance Ă©manant de lui et il nous revient, en son nom, d’accorder cette confiance ou de la retirer. Nous resterons fidèles Ă  cette confiance du Peuple qu’il a placĂ© en nous ainsi que pour nos acquis dĂ©mocratiques. Nous n’en serons dĂ©tournĂ©s ni par menace ni Ă©mulation.
-         Nous confirmons notre dĂ©termination et notre engagement Ă  aller de l’avant dans les procĂ©dures de la motion de censure du Gouvernement et cela, parce que nous avons la ferme conviction de l’échec moral et politique de ce Gouvernement dans la gestion des affaires du Pays car il reflète un recul flagrant du choix du changement, des rĂ©formes et des aspirations du peuple ainsi que ses espoirs de construction et de dĂ©veloppement.
-         Nous lançons un appel Ă  toutes les forces politiques au sein du Parlement, les organisations de la sociĂ©tĂ© civile pour nous soutenir dans cette confrontation et cette dĂ©viation dangereuse du processus dĂ©mocratique.
-         Nous invitons le peuple Ă  la maĂ®trise de soi et Ă  la prĂ©servation de la sĂ©curitĂ© publique et Ă  la solidaritĂ© avec ses Ă©lus en vue de protĂ©ger les institutions lĂ©gislatives dont nous voulons faire la voix et la volontĂ© du peuple.
-         Notre disponibilitĂ© entière Ă  composer avec tous les dĂ©veloppements positifs dictĂ©s par l’intĂ©rĂŞt supĂ©rieur de la Nation.
 
Nouakchott, le 02/07/08
Initiative des députés promoteurs de la motion de censure contre le Gouvernement


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