" Mais cela a changé. Depuis, le suivi est beaucoup plus rigoureux, très strict
même. Aujourd’hui tout est fait en fonction exclusive de l’intérêt de l’enfant
et son suivi est effectué jusqu’à l’âge avancé de 7 ans" reprend-elle. L’année
dernière, 37 cas d’enfants abandonnés ont été recensés à Nouakchott, le plus
souvent dans des maisons inhabitées, mais il n’est pas inhabituel de les
retrouver dans les poubelles. Les couffins ont toujours entre 3 et 5 jours.
" Pour le moment, nous en sommes à 6 abandons constatés depuis le début de
l’année 2006 " affirme Mme Ndioro. Les enfants recueillis sont réquisitionnés
par la police qui les amènent ensuite au service pédiatrique du centre
hospitalier national. De lĂ , le service en question appelle le centre
d’accueil des enfants abandonnés, cellule dont Mme Ndioro est responsable. " A
partir de cette étape, notre rôle consiste à récupérer le bébé, se substituer
aux parents un temps, avant de trouver des parents permanents d’adoption "
continue Mme Ndioro. À ce niveau, les progrès sociaux sont consĂ©quents: l’enfant
est suivi au sein de la famille où il évolue; on observe la connexion affective
éventuelle entre le bébé et les nouveaux parents; l’aisance matérielle pour
subvenir à l’éducation de l’enfant ne suffit pas. La famille doit être
moralement et psychologiquement " stable ". Et une fois que la famille est
acceptée par la cellule, l’engagement de la famille est définitif, et ne saurait
être rétroactif. Le grand danger pour l’enfant et pour la famille adoptive
alors, une fois que l’enfant est intégré à la cellule familiale nouvelle, c’est
de voir resurgir des parents (des mères surtout ndlr) épris de remords, et qui
tentent de récupérer leur enfant. Un cadre juridique a été mis en place depuis
1988 portant sur l’attestation de garde remise aux parents adoptifs qui leur
évite ce genre de surprise. Cette attestation leur est remise à la fin de
l’appréciation par le centre d’accueil, de leurs qualités éducatives. Elle les
reconnaît comme les uniques parents de l’enfant. " Mais les cas de ces mères
suivant les faits et gestes du bébé abandonné restent tout de même relativement
rares " rajoute Mme Ndioro.
Des structures d’accueil aux maigres capacités En effet, une partie des
enfants recueillis est alors dirigée vers les soins de la DASS, mais cette
structure de l’Etat n’a pas les moyens d’une telle politique de soins et
d’accompagnement de ces bambins, avec un budget de moins de 50 millions
d’ouguiyas. L’initiative privée prend une importance notable pour ces
naufragés; c’est le cas par exemple de Mme Diallo, dont l’association qui porte
son nom a été fondée en 1968. Depuis cette date, elle s’acharne à recueillir le
plus, de bébés abandonnés, ou des enfants vivant dans la rue. Elle en a
recueilli et élevé 30 au total, depuis la création de l’association. Mme Ndioro
concède cet aspect du problème, en soulignant que " les enjeux sociaux,
individuels, de ce phénomène qui s’amplifie depuis 5 ans avec l’urbanisation
grandissante de la ville, corrélée à une paupérisation accrue, ne sont pas trop
pris en compte par les autorités publiques ". Mais les mouvements associatifs
heureusement tiennent le terrain et des femmes comme Awa Ndioro veillent Ă
donner le meilleur avenir possible au maximum de ces anges tombant de Charybde
en Scylla. Par Mamoudou Lamine Kane mamoudoukane@hotmail.com
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