«Nous voulons que tous les citoyens et tous les partis politiques participent aux Etats Généraux de la Démocratie, prévus le 27 décembre. Qu’ils viennent avec leurs idées et qu’ils les défendent ! Le Haut Conseil d’Etat s’engage à appliquer les recommandations retenues», a déclaré le général Mohamed Ould Abdel Aziz, chef de la junte au pouvoir en Mauritanie depuis le coup d’Etat du 6 août.
«Les Etats Généraux de la Démocratie vont être placés sous la supervision d’une personnalité indépendante, les militaires n’y prendront pas part» a-t-il précisé également en réponse à une question relative aux garanties offertes pour que les concertations durant les Etats Généraux de la Démocratie (EGD) soient libres et transparentes. Le chef de la junte s’exprimait dans un point de presse tenu lors de sa visite l’après-midi du 23 décembre, d’un centre de formation professionnelle à El Mina (quartier de Nouakchott). Ses déclarations intervenaient après celles du président constitutionnel Sidi Ould Cheikh Abdellahi libéré le 21 décembre, qui avait rejeté toute participation aux EGD, et déclaré n’avoir «rien à partager avec la junte tant qu’elle n’a pas quitté le pouvoir». Elles intervenaient également, après la publication par le conseil de paix et de sécurité de l’Union Africaine en conclave à Addis-abeba depuis le 22 décembre, d’un communiqué appelant à restaurer le gouvernement constitutionnel, assorti de menaces de sanctions contre la junte et ses soutiens civils. Répondant à une question relative à la déclaration du président renversé qui disait n’avoir «rien à partager avec la junte» (question tendant à faire passer ce dernier comme opposé au dialogue), le chef de la junte indique : «Il (Sidi Ould Cheikh Abdallahi) est libre de dire ce qu’il veut. Il y a la liberté d’expression, mais il doit avoir la mémoire courte. Il ne doit pas oublier que c’est grâce aux militaires qu’il a pu être élu président. Les mauritaniens l’ont connu grâce à ceux, qu’il appelle : Al Askar (en français, les militaires)». Le général Ould Abdel Aziz, qui n’a toutefois pas précisé si les manifestations sont devenues autorisées en Mauritanie depuis leur interdiction en août 2008 par la junte,a, par la même occasion, convié le président renversé à "descendre dans la rue pour prouver sa popularité". Interrogé sur la pertinence des EGD au cas où ils seront boycottés par le Front National de la Défense de la Démocratie FNDD (opposition anti-putsch), le chef de la junte répond: « Je n’ai pas été officiellement informé de leur refus de participer. Mais ils auront raté une occasion. S’ils ont des idées, c’est l’occasion». A la question : que pensez vous de la position de l’Ambassadeur de France en Mauritanie qui a appelé le FNDD à participer aux EGD, le chef de la junte rétorque : « Je salue les positions qui vont dans le sens de l’apaisement». Aucun des journalistes présents au point de presse, n’a cependant demandé au général, qu’envisage-t-il donc, pour impulser la dynamique de l’apaisement dont la libération du président constitutionnel fut un signe, altéré toutefois, par les harcèlements dont il fait l’objet (tentatives de confiscation de passeports, manifestations suscitées à Kankossa et Tintane avec menaces de jugement) et qui renvoient plutôt à l’escalade. Le chef de la junte a affirmé ne pas craindre les sanctions internationales dans sa réponse à une question relative aux mesures envisagées par la communauté internationale: «On est prêts à tout. Si c’est un sacrifice pour notre pays, on le fera» a-t-il dit. A noter que parallèlement à la tenue à El Mina, du point de presse du chef de la junte, le Premier ministre Moulaye Ould Mohamed Leghdaf supervisait à Tevragh Zeina , la cérémonie d’installation de la commission de supervision des EGD , dont la présidence a été confiée à Abdellahi Ould Cheikh, ancien ministre de la défense de Moktar Ould Daddah. Les EGD vont démarrer le 27 décembre à Nouakchott pour être clôturés le 5 janvier 2009.
Les EGD pour quoi faire?
Dans une resolution votée le 14 septembre 2008, les parlementaires pro-putsch avaient invité le Haut Conseil d’Etat (junte) à mettre en place un mécanisme de concertation devant préparer une feuille de route de sortie de crise.Ce sera donc les EGD! Le texte de la résolution proposait, en gage de transparence des futures élections, la "réactivation de la Commission Electorale Nationale Indépendante" et l’interdiction de se porter candidat pour les militaires et "tous ceux qui, pendant la période de transition, exercent des responsabilités exécutives susceptibles d’influencer les électeurs". Les députés ont suggéré également la formation d’un "gouvernement de large coalition pour la période avant l’élection présidentielle". La résolution avait été adoptée à l’unanimité des députés présents (52 sur les 95) que compte l’Assemblée. La plénière du 14 septembre avait été boycottée par 43 députés mauritaniens, dont 17 du Rassemblement des Forces Démocratiques (RFD) d’Ahmed Ould Daddah, qui soutient le coup d’Etat mais exige la non-éligibilité des membres du Haut Conseil d’Etat à la présidentielle , ainsi que 26 députés du Front National pour la Défense de la Démocratie (FNDD), une coalition de partis opposés au putsch. Les députés du FNDD dont M. Messaoud Ould Boulkheir président de l’Assemblée nationale, qui a siégé sans lui, considèrent que la session parlementaire extraordinaire est illégale, parce que convoquée par décret signé du chef de la junte alors qu’il devrait l être par le président de la République, qui était assigné à résidence surveillée. Les EGD que le Haut Conseil d’Etat organisera les prochains jours, vont donc constituer le point de départ pour le rétablissement d’un nouvel ordre constitutionnel qui va être precédé par une révision de la constitution.
Voici les thèmes proposés pour la concertation
• Attributions du Président de la République ; • Attribution du Parlement ; • Rapports entre les pouvoirs exécutif et législatif ; • Moyens d’influence réciproques entre les pouvoirs ; • Organe d’arbitrage entre les institutions ; • Modalités d’organisation du pouvoir exécutif ; • Place des Forces Armées et de Sécurité dans le dispositif politique et institutionnel ; • Eligibilité.
- Les modalités de rétablissement de l’ordre constitutionnel ; - La gestion de la période de transition (conditions de réussite, programme, durée…) ;
Les intervenants peuvent proposer d’autres thèmes qu’ils jugent importants ou utiles au débat.
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