C’est par un communiqué laconique lu en début de soirée du 6 mai au journal de 20 Heures de la TVM que le départ du Premier ministre Zeine Ould Zeidane a été officiellement annoncé. Le communiqué a précisé que le Premier ministre a "présenté sa démission" au président de la République qui l’a accepté, et remercié le Gouvernement pour le travail qu’il a mené.
Le même communiqué a indiqué que M. Yahya Ould Ahmed Waghef ex-ministre Secrétaire Général de la présidence de la République et président du PNDD-ADIL a été nommé Premier ministre (PM). Ould Ahmed El Waghef est un ingénieur staticien économiste qui a occupé par le passé des postes de Directeur Général de la Somagaz, de coordinateur d’un projet de la Banque Mondiale portant reforme des secteurs de l’eau et de l’électricité et celui de Directeur Général d’Air Mauritanie. Contrairement à Zeine Ould Zeidane, le nouveau PM Ould Waghef n’avait pas d’ambition personnelle affichée. Il sera vraisemblablement la voix du "Maître" et il est certain qu’il ne briguera pas la magistrature suprême en 2012. Sa nomination répond à ce qui se voit à la nécessité de colmater une brêche, d’avoir un inconditionnel, une sorte d’«homme de main» à la Primature et satisfait d’une autre manière la demande de formation d’un Gouvernement "politique" impliquant les partis du «Rassemblement de la Majorité» en lieu et place du "Gouvernement de technocrates" formé en avril 2007. Il y a juste un peu plus d’une année, précisément le 20 avril 2007, le président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi avait choisi Zeine Ould Zeidane pour diriger le Gouvernement qui allait remplacer l’équipe démissionnaire de Sidi Mohamed Ould Boubacar, l’ex-Premier ministre sous la transition. Ancien Gouverneur de la BCM, Zeine Ould Zeidane s’était présenté en candidat indépendant à la présidentielle de mars 2007 et avait réussi contre vents et marées (et en deux mois de campagne) son entrée en politique en décrochant la troisième place au premier tour de l’élection présidentielle tenu le 11 mars 2007. Fort des 15% des voix obtenues au premier tour, à seulement cinq points de Ahmed Ould Daddah l’opposant historique (20,68%) et à cinq points de plus, par rapport à un autre opposant historique Messaoud Ould Boulkheir (9,88%), Ould Zeidane a apporté son soutien au président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi au second tour de l’élection présidentielle organisé le 25 mars. De cette alliance nouée entre les deux tours, est né accord politique qui devait garantir à Zeine Ould Zeidane la Primature, pour deux années dit-on. Titulaire d’un doctorat en Mathématiques appliquées et d’un DEA en économie Ould Zeidane a débuté sa carrière en 1997 comme professeur à l’Université de Nouakchott, puis trésorier à la Générale des Banques de Mauritanie (GBM) avant d’être nommé responsable d’une cellule de planification à l’ex-MAED, puis économiste à la mission résidente de la Banque Mondiale en Mauritanie. En 2002, il est désigné coordinateur du Centre Mauritanien d’Analyse de Politiques (CMAP). C’est en juillet 2004 qu’il a été nommé Gouverneur de la Banque Centrale de Mauritanie (BCM), poste qu’il occupera sous la transition (après le putsch du 3 août 2005), jusqu’au 13 septembre 2006. Son bilan à la BCM est jugé «positif» car marqué par "la stabilité monétaire, la maîtrise de l’inflation et la réduction des dettes" assurent les observateurs. Les opinions divergent concernant son action à la tête du Gouvernement. Certains estiment que l’ex-Premier ministre n’a pas démérité au cours de son passage à la Primature, qu’il travaillait en moyenne 14 heures par jour et que les contre performances du Gouvernement résultent plutôt des facteurs exogènes et du manque de latitude concédée à Ould Zeidane du fait de la présence dans l’équipe gouvernementale de plusieurs ministres qui lui menaient une guéguerre. D’autres observateurs soulignent que Zeine Ould Zeidane n’a pas eu au Gouvernement l’inspiration qu’il avait eu à la BCM et que son passage à la Primature a été une grande déception. Quoi qu’il en soit, le départ de Zeine n’était guère attendu. Un remaniement était certes, dans l’air, depuis un certain temps. Mais il devait se limiter à des retouches, dit-on. Néanmoins, les choses sont semble-t-il allées vite, après la visite du président de la République à Rosso. On parle aussi sur un autre plan , que l’ex-Premier ministre a senti sa disgrâce venir à travers des signes de manque de solidarité de la part du président de la République et qu’il a ainsi préféré en présentant sa démission, prendre les devants en partant de lui-même. Jusqu’au milieu de soirée du 6 mai, les consultations n’avaient pas été entamées pour changer ou maintenir les autres membres du Gouvernement. Les consultations doivent débuter la journée du 7 mai, a-t-on appris, d’une source généralement bien informée.
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