Trois militants anti esclavagistes en Mauritanie ont été condamnés jeudi soir 6 janvier à Nouakchott à six mois de prison ferme pour "agression contre la police" au cours d’une manifestation dénonçant un cas présumé d’esclavage.Le juge de la chambre correctionnelle du tribunal de Nouakchott a prononcé une peine de prison d’un an d’emprisonnement...
...dont six mois ferme, contre trois militants. Parmi eux figure le chef de l’ONG Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), Biram Ould Abeid. Trois autres militants ont été condamnés à six mois de prison avec sursis.
Le parquet avait requis une peine de trois ans de prison contre M. Ould Abeid et une année contre les autres. Ils étaient jugés pour "rassemblement non autorisé, agression contre les forces de l’ordre et direction d’une association non reconnue". La police avait publié des photos de policiers "blessés par les manifestants". Les prévenus avaient plaidé non coupables à l’ouverture du procès. "Je suis jugé pour mon combat contre l’esclavage en Mauritanie que les autorités ont toujours essayé de cacher", avait déclaré devant le tribunal M. Ould Abeid.
Les militants avaient été arrêtés le 13 décembre et placés en détention provisoire, à la suite d’une manifestation dénonçant des pratiques présumées esclavagistes contre deux filles, âgées de 10 et 14 ans. Les fillettes avaient nié être esclaves. Mais la femme chez qui elles vivaient a été inculpée pour "exploitation de mineurs" et placée sous contrôle judiciaire en attendant son jugement.
L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’homme avait estimé, fin décembre, que les six militants étaient victimes d’un "harcèlement judiciaire" ne visant "qu’à sanctionner leurs activités en faveur des droits de l’homme et de la lutte contre l’esclavage en Mauritanie", dans un communiqué publié à Paris et Genève AFP
Réactions :
Front de Lutte contre l’Esclavage, le Racisme et l’Exclusion (FLERE) :
Déclaration
Ce jeudi 06 janvier 2011 s’est terminé, au palais de justice de Nouakchott, le procès maint fois reporté de nos six (6) militants dont le président en exercice du Front, Monsieur Biram Ould Abeid.
Nos camarades qui ont été violemment pris à partie par les éléments de la police alors qu’ils apportaient leur assistance à deux filles réduites à l’esclavage par Oumoulemine (qui elle est toujours libre de ses mouvements), comparaissaient paradoxalement devant la cour comme auteurs d’une agression dont ils ont été les victimes réelles.
Malgré le collectif d’une quarantaine d’avocats spontanément constitué pour assurer la défense de ces combattants antiesclavagistes et antiracistes, ainsi que l’immense élan de sympathie suscité par le caractère flagrant de cette injustice, la cour, comme à ses habitudes, a obéi au pouvoir politique qui a ordonné de punir nos camarades pour avoir osé mettre à nu les deux fléaux tabous que sont l’esclavage et le racisme d’Etat. Les camarades Biram ould Abeidy, Cheikh Ould Aliine, Alioune ould Mbarek Fall ont été condamnés à une année dont six mois fermes et Balla Touré, Dah ould Boushab et Mouloud ould Bouby à six mois avec sursis.
De ce verdict découlent deux faits irréfutables :
- la justice continue d’être honteusement inféodée à l’exécutif qui en use comme il l’entend ;
- le système oligarchique, raciste et esclavagiste au pouvoir en ce moment en Mauritanie est prêt à tout pour maintenir l’écrasante majorité des Mauritaniens dans une exclusion abjecte.
Face à cette situation, le FLERE rejette ce verdict ainsi que la parodie de justice qui l’a proclamée et exige la libération immédiate et sans condition de sos camarades. Si cela n’était pas fait, nous tenons le pouvoir en place pour responsable de tout ce qui adviendra de la Mauritanie dans les jours et semaines à venir.
Enfin, nous demandons à tous les acteurs de la vie politique, civile et syndicale à travailler pour la tenue, le plus tôt possible, d’un débat national sur l’esclavage et le racisme d’Etat, seul capable de sauver notre pays d’une instabilité redoutable.
Le conseil des Présidents du FLERE Nouakchott le 07/01/2011
Communiqué IRA Mauritanie IRA Mauritanie est surprise et déçue du verdict « d’un an d’emprisonnement, dont six mois fermes » prononcé par la cour correctionnelle de Nouakchott à l’encontre de son président Biram Ould Dah Ould Abeid et des militants Cheikh Ould Abidine et Alioune Ould MBareck Vall. Un autre verdict de six mois de prison avec sursis a été prononcé contre Balla Toure, Maouloud Ould Bouby et Dah Ould Boushab.
Le seul tort des militants de l’IRA, est d’avoir signalé un cas d’esclavage sur deux fillettes de 9 et 10 ans. Mme Moulmounine Mint Bekkar Vall, responsable de cette pratique d’esclavage a été mise sous contrôle judiciaire pour exploitation de mineur et relaxée.
Le verdict, prononcé contre Biram et ses amis est injuste et partial. Il conforte les esclavagistes et met à nu la loi de 2007 criminalisant l’esclavage. Notre mouvement fait confiance à la Cour d’appel pour établir la justice et relaxer nos militants.
IRA Mauritanie appelle à la mobilisation et reste déterminée à poursuivre son combat contre l’esclavage, la discrimination et l’exclusion en Mauritanie.
IRA Mauritanie
Nouakchott, le 07 01 2011
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