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Genève: La Mauritanie soumet un premier rapport sur la protection des personnes contre les disparitions forcées

Le Commissaire aux Droits de l’Homme, à l’Action humanitaire et aux Relations avec la Société civile, M. Cheikh Ahmedou Ould Ahmed Salem Ould Sidi, a présenté, lundi devant le Comité des disparitions forcées des Nations Unies à Genève, le rapport initial de la Mauritanie sur la mise en œuvre de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées dans notre pays.

Le Commissaire a passé en revue dans son discours introductif, les acquis les plus importants réalisés par la Mauritanie dans les domaines législatif, institutionnel et administratif, ainsi que les stratégies gouvernementales les plus importantes adoptées pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention, conformément aux obligations internationales de notre pays dans le domaine des Droits de l’Homme.

Notre pays place la promotion et la protection des Droits de

l’Homme au cœur de ses politiques et stratégies, a affirmé le Commissaire, soulignant qu’en dépit des difficultés et des défis qui entravent parfois la jouissance de certains droits, notamment économiques et sociaux, le gouvernement poursuit ses efforts inlassables pour les surmonter, en exécution du programme politique de Son Excellence le Président de la République, Monsieur Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani, qui fait de la réalisation de la justice sociale et de la promotion des groupes vulnérables une priorité absolue.

Il a réaffirmé également, l’attachement de la Mauritanie aux idéaux, principes et valeurs des Droits de l’Homme, réitérant l’engagement de notre pays en faveur de la promotion et de la protection des Droits de l’Homme en général et des dispositions de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées en particulier.

Ci-dessous l’intégralité du discours du Commissaire :

«Madame la Présidente,

Mesdames et Messieurs les membres du comité,

Mesdames et Messieurs;

J’ai l’honneur d’être parmi vous aujourd’hui, au nom du Gouvernement de la République islamique de Mauritanie, et conformément à l’article 29 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, pour passer en revue notre rapport initial relatif à la mise en œuvre de la présente Convention.

Je profite de cette agréable occasion pour féliciter le Comité à l’occasion de sa 25ème session, espérant que ses travaux se dérouleront dans les meilleures conditions. Je confirme également le soutien de mon gouvernement au mandat de votre estimé comité, et je vous exprime notre sincère gratitude pour les efforts précieux que vous déployez pour protéger les personnes contre les disparitions forcées partout dans le monde.

Madame la Présidente ;

La délégation que j’ai l’honneur de conduire au nom du Gouvernement de la République Islamique de Mauritanie comprend :

  • SEM l’Ambassadeur de la République Islamique de Mauritanie en Suisse et Représentant Permanent auprès de l’Office des Nations Unies et des Organisations Internationales à Genève (ONUG) ;

•Un chargé de mission à la Présidence de la République ;

  • Une Conseillère au Cabinet du Premier Ministre ;
  • Un Directeur des Affaires Criminelles et de l’Administration Pénitentiaire au Ministère de la Justice ;
  • Le Conseiller juridique au Ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation ;
  • Le Directeur des Affaires Juridiques et des Traités au Ministère des Affaires Etrangères, de la Coopération et des Mauritaniens à l’Extérieur ;
  • Un Conseiller juridique au Ministère de la Fonction Publique et du Travail ;
  • Le Directeur du Centre de Formation et de Promotion Sociale pour les Enfants Handicapés au Ministère de l’Action Sociale, de l’Enfance et de la Famille ;
  • Le Directeur au Commissariat aux Droits de l’Homme, à l’Action Humanitaire et aux Relations avec la Société Civile.

Madame la Présidente ;

Ce rapport a été préparé par le Comité technique multisectoriel chargé d’élaborer les rapports nationaux, suivant une approche participative et conformément aux orientations de votre comité de reporting. Il a fait l’objet de concertations approfondies avec toutes les parties concernées, notamment les départements ministériels, les institutions nationales des droits de l’homme et les acteurs de la société civile. Le rapport passe en revue les mesures les plus importantes prises par mon gouvernement aux niveaux législatif, judiciaire et administratif, afin d’assurer la mise en œuvre effective des dispositions de la Convention.

Madame la Présidente ;

Afin de mettre pleinement en œuvre les dispositions de la Convention, celle-ci a été publiée dans un numéro spécial du Journal officiel n° 1326 du 9 décembre 2014. Ainsi, les dispositions de la Convention, devenues directement applicables, peuvent être invoquées devant les tribunaux, et ont préséance sur les lois nationales conformément à l’article 80 de la Constitution.

Le cadre normatif et institutionnel de promotion et de protection des droits de l’homme a également connu une évolution quantitative et qualitative significative, avec la promulgation de textes juridiques, notamment :

  • La loi n°033/2015 relative à la lutte contre la torture ;
  • La loi n°034/2015 portant création d’un mécanisme national de prévention de la torture ;
  • La loi N°016/2017, qui définit la composition de la commission Nationale des Droits de l’Homme ;
  • La loi 020/2017 sur la protection des données personnelles ;
  • La loi n° 023/2018 criminalisant la discrimination ;
  • La loi n°017/2020 portant prévention et répression de la traite des personnes et protection des victimes ;
  • La loi n°018/2020 relative à la lutte contre le trafic de migrants.

D’autres textes sont actuellement à l’étude, notamment le texte sur la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles, les tribunaux immobiliers, ainsi que le texte sur la restructuration des prisons.

En ce qui concerne le cadre institutionnel, les réalisations ont porté sur la réforme des principales institutions, notamment : le Conseil suprême des fatwas et des recours gracieux, la Commission nationale des Droits de l’Homme et le Mécanisme national pour la prévention de la torture, en plus de la création de nouvelles institutions telles que la Délégation générale à la solidarité nationale et à la lutte contre l’exclusion (Taazour), l’Autorité de protection des données personnelles et l’Autorité nationale de lutte contre la traite des personnes et le trafic illicite de migrants.

Madame la Présidente ;

Dans le cadre des mesures prises pour renforcer la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, les mesures suivantes ont été prises :

  • L’adoption de la stratégie Nationale d’Accès à la Justice 2019-2029 ;
  • L’élaboration d’un projet stratégique national de promotion et de protection des Droits de l’Homme, en coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme ;
  • La gestion d’un portail électronique pour recevoir les plaintes contre les éléments de la police et les signalements de comportements contraires à l’éthique professionnelle, conformément au décret 043-2021, réglementant la Direction générale de la Sureté nationale, afin de prévenir tout abus ou violation des Droits de l’Homme commis par les officiers de police.

Madame la Présidente ;

Le droit à la vie et à la sécurité est le droit physique et moral garanti par la force de la loi qui interdit toute forme de violence physique et morale. Ainsi, la loi criminalisant la torture, le Code pénal et la loi qui inclut le Statut de la Police nationale interdisent tous les violations de l’intégrité physique ou morale.

Les lieux de détention ont connu au cours de ces dernières années, plusieurs réformes fondamentales, qui se sont traduites par un contrôle plus strict des lieux de détention et par l’amélioration des conditions de vie des détenus afin de préserver leur dignité. Ces réformes ont conduit à la réorganisation de l’administration pénitentiaire, à la création de nouvelles institutions conformes aux normes, à la réhabilitation de certaines prisons, à une augmentation significative de l’offre de prise en charge des détenus et au renforcement des services dans les lieux de privation de liberté, en vue de préparer les détenus à la réinsertion sociale.

Madame la Présidente ;

En matière d’entraide judiciaire, mon pays est partie prenante de nombreux accords prévoyant l’entraide juridique et judiciaire et l’extradition. Les critères juridictionnels définis par ces instruments sont directement intégrés dans le système juridique national. Les plus importants de ces traités sont :

Au niveau multilatéral :

  • L’Accord de la Ligue arabe sur l’entraide et l’extradition des criminels ;
  • L’Accord de coopération judiciaire des pays de l’Union du Maghreb Arabe ;
  • L’Accord général de coopération en matière de justice, signé à Antananarivo le 12 septembre 1961 ;
  • L’Accord de coopération dans le domaine judiciaire entre les États membres de l’Accord de non-agression et d’assistance à la défense signé à Nouakchott le 21 avril 1987 ;

Au niveau bilatéral :

  • L’Accord de coopération dans le domaine de la justice entre la Mauritanie et la République française signé à Paris en 1961 ;
  • L’Accord Général de Coopération dans le domaine judiciaire avec la République du Mali ;
  • Les quatre accords de coopération en matière de justice (extradition, entraide judiciaire, transport et en matière civile et commerciale) avec l’Espagne.

En outre, la Mauritanie a rejoint la Plateforme judiciaire régionale du Sahel comprenant le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Sénégal, ainsi que le Réseau des juges et procureurs d’Afrique de l’Ouest (WACAP). Ces structures visent à renforcer la coopération et l’entraide juridique entre les États parties.

Madame la Présidente ;

La lutte contre la torture a connu une évolution remarquable caractérisée par le renforcement du cadre juridique et institutionnel à travers l’adoption de la loi criminalisant la torture et la mise en place du mécanisme national de prévention de la torture.

La loi consacre la définition de la torture contenue dans la Convention internationale contre la torture et classe la torture comme un crime contre l’humanité imprescriptible. Elle reprend les dispositions des traités relatifs à la prévention de la torture à travers des garanties élémentaires en cas de privation de liberté, ainsi que l’interdiction de la détention illégale, et n’accorde aucune valeur aux aveux extorqués sous la torture.

Elle prévoit également les sanctions et les circonstances aggravantes nécessaires de ces sanctions, tenant compte de la gravité de la torture, interdisant la détention secrète et n’acceptant aucune justification pour la torture.

Le Mécanisme national pour la prévention de la torture est opérationnel depuis le 20 avril 2016. Il s’agit d’une institution indépendante, dotée de la personnalité juridique et des ressources financières nécessaires pour accomplir ses missions, conformément aux dispositions du Protocole facultatif à la Convention contre la torture.

Le Mécanisme a préparé un guide de visite, citant des règles minima des Nations Unies sur le traitement des détenus. Au cours des années 2021 et 2022, le Mécanisme a organisé 125 visites dans tous les lieux de détention du pays.

Madame la Présidente ;

Reconnaissant l’importance du rôle des organisations de la société civile, le gouvernement a adopté la loi 2021-004 relative aux associations, institutions et réseaux, qui consacre un système d’autorisation en lieu et place de l’autorisation préalable lors de la création d’associations.

D’autre part, des forums régionaux d’organisations de la société civile ont été élus, implantés dans les capitales de nos quinze wilayas, et traitent de six thématiques relevant des dix-sept objectifs de développement durable.

Le gouvernement a également intensifié les programmes visant à renforcer les capacités des organisations de la société civile défendant les droits de l’homme et élaborant une stratégie nationale pour la promotion de la société civile.

Madame la Présidente ;

En dépit des difficultés et des défis qui entravent parfois la jouissance de certains droits, notamment économiques et sociaux, le gouvernement poursuit ses efforts inlassables pour les surmonter, en application du programme politique de Son Excellence le Président de la République, Monsieur Mohamed Ould Cheikh El-Ghazouani, qui fait de la réalisation de la justice sociale et de la promotion des groupes vulnérables une priorité absolue.

Ceci sera renforcé à travers les politiques et programmes gouvernementaux, et en tenant compte des recommandations que vous émettrez.

Dans ce contexte, mon gouvernement affirme son attachement aux idéaux, principes et valeurs des droits de l’homme et renouvelle son engagement en faveur de la promotion et de la protection des droits de l’homme en général et des dispositions de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les droits de l’homme, en particulier, et son engagement en faveur d’une interaction positive avec les mécanismes internationaux des droits de l’homme.

En conclusion, je profite de cette opportunité pour remercier, au nom du Gouvernement de la République Islamique de Mauritanie, votre Respecté comité pour son aimable intérêt et pour vous renouveler notre entière disponibilité à poursuivre le dialogue constructif avec vous pour suivre la mise en œuvre des dispositions de l’accord, et nous sommes tout à fait disposés à répondre à vos questions et à interagir positivement avec vos recommandations.

Notons que l’examen du rapport national devant la commission durera deux jours, durant lesquels des discussions auront lieu avec les experts de la commission, qui émettront à leur tour des recommandations finales au gouvernement. ami