Les Canariens ne sont pas uniquement inquiétés par les conséquences sociales de l´immigration en provenance de l´Afrique. L’idée que des radicaux islamistes puissent s’infiltrer dans l’envahissant cortége des immigrés donne de plus en plus des soucis aux habitants de l’archipel. Associant, malheureusement, par « un délit d´ignorance» (comme l’a si bien dit l’un des conférenciers) le phénomène de l’immigration de l´Afrique Occidentale a une confusion erronée entre l´Islam et le terrorisme. Une certaine opinion relayée par des medias pressés s’enlise dans l’ombre des simples clichés et des regrettables préjugés.
C´est pour cette raison et pour jeter la lumière sur une rĂ©alitĂ© aussi inconnue que gĂ©nĂ©ratrice de malentendus que la Casa África ; crĂ©Ă©e en 2006 afin de promouvoir et rapprocher les intĂ©rĂŞts culturels, juridiques, sociologiques, anthropologiques... entre les Canaries et l´Afrique ; a organisĂ© pendant deux jours : le 19 et 20 novembre 2007 un sĂ©minaire portant sur le thème : «Une vision de l´Islam en Afrique depuis les Canaries. Histoire d´une frontière». Neuf confĂ©renciers, experts en la matière, venus de plusieurs parties de l´Afrique Occidentale ont exposĂ© leurs opinions sur la religion rendant la rencontre plus multiculturelle. La conception de la thĂ©matique pluridisciplinaire a Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e par le directeur de l´UniversitĂ© Ă distance espagnole (UNED) M.Victor Morales , coordinateur acadĂ©mique du symposium lequel a attirĂ© un public bien attentif . L´inauguration s’est dĂ©roulĂ©e en prĂ©sence d’éminentes personnalitĂ©s ;tels que M. Alfonso Ortiz directeur de la Maison Afrique, le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de cette institution Luis Padilla, ; le Maire de las Palmas, Jerónimo Saavedra, des hauts responsables de l’universitĂ© de Las Palmas et M Pablo Martín-Carbajal González, Directeur GĂ©nĂ©ral de relations avec l´Afrique. Ce dernier, chargĂ© d´ouvrir officiellement ce sĂ©minaire, a indiquĂ© qu’en voulant prĂ©parer son mot par le biais d’ Internet, il a constatĂ© que nombreux sont les sites qui associent l´Islam au terrorisme, et que pour Ă©viter cette malheureuse confusion, il a dĂ» plonger dans la lecture du livre de TAHAR BEN JELLOUN , « l’Islam expliquĂ© Ă nos enfants». Parmi les participants, le premier Ă prĂ©senter sa confĂ©rence fut M.Dr Abdoul Azize Kebe professeur de la facultĂ© de lettres et sciences humaines de l´UniversitĂ© Cheikh Anta Diop de Dakar. En parlant de l´Islam au SĂ©nĂ©gal, ce professeur a brossĂ© une histoire de l´Islamisation du SĂ©nĂ©gal en mettant en exergue le rĂ´le des confrĂ©ries ainsi que les rapports entre l’islam et la sĂ©cularisation dans son pays. Le deuxième confĂ©rencier Ă©tait M.Rafael Valencia, expert et professeur d´études Islamiques de l´UniversitĂ© de Sevilla qui a exposĂ© Ă travers plusieurs images la richesse de l´Islam Occidental et qui a mis l’accent sur les relations de voisinage plutĂ´t rassurantes, d’un point de vue historique, ente les Canaries et l´Afrique
Abdel Kader Ould Mohamed, consul général de Mauritanie aux Canaries et juriste distingué a abordé un thème plutôt académique : «l´influence du droit Musulman sur le système juridique mauritanien». Il a d’emblée soulevé la question de savoir, comment adopter le Droit des autres tout en restant nous mêmes ? Après avoir parlé du choc que l´indépendance de Mauritanie a occasionné pour le pays en 1960, dans le sens où, il fallait bien, précisait-il , édifier, un Etat moderne en conservant les piliers d´un système de la pensée traditionnelle dans lequel la religion exerçait et exerce encore une grande influence, il a exposé une définition limpide du Droit musulman ou Fiqh , sa signification, , son contenu , ses sources et sa méthodologie. Il a, par la suite dressé un inventaire des domaines d’application des règles du Droit musulman ainsi que celles qui s’inspirent du Droit occidental , notamment français. Des règles, en apparence opposées, mais qui, en fait, se complètent dans le cadre d’un Droit mauritanien unifié. Une juxtaposition qui traduit, selon le conférencier «le poids de la tradition et l’exigence de la modernité».
Bien que différents les deux Droits (musulman et occidental) se basent sur une haute conception de l´idée de justice laquelle, au final, fonde l’ensemble des systèmes juridiques.
Le quatrième conférencier fut José Collado, parlant du thème de l´Islam au Niger, il a souligné l’activisme des radicaux islamiques dans ce pays. Le vice- consul du Maroc, Moustapha Al Horr, a mis sur la table la multi culturalité des Musulmans sur les Iles, et a précisé , à travers plusieurs données , les préoccupations quotidiennes de la communauté musulmane aux Canaries ainsi que l´évolution de l´immigration. M, le directeur du célèbre journal La Provincia/Diario de Las Palmas a fait un plaidoyer en faveur de la laïcité en évoquant «l’obligation» qui incombe aux pays pratiquant l’islam de séparer la politique et la religion. Le lendemain, au cours de la deuxième journée,, M. José Antonio Gonzalez Alcantud, professeur d´anthropologie à l´Université de Grenade, a fait un brillant exposé sur la culture de l´Islam et son influence sur l’ Espagne.
D. Fernando EstĂ©vez González, professeur d anthropologie Ă l´UniversitĂ© de La Laguna a dressĂ© le schĂ©ma comparatif entre le phĂ©nomène islamique et la construction de l´identitĂ© canarienne en s´appuyant sur la culture des berberes et des guanches.
Rafael Esparza Machín, professeur de sociologie de l´UniversitĂ© de las Palmas (ULPGC) parla de la vision du point de vue sociologique des autres, Canaries-Afrique. Plusieurs interventions tout au long des deux journĂ©es ont Ă©tĂ© faites par les divers participants au symposium ainsi que les reprĂ©sentants de la Casa África.
Maria Cardenes Perera, Association des juristes des universités Panthéon-Sorbone et Complutense ( A.J.P.S.C)
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