Révision des données économiques : Jusqu’où, on nous a menti?   
11/07/2006

79 pages d’un rapport qu’on attendait dans le cadre de l’annulation de la dette mauritanienne auprès du FMI, pour apprendre de façon chiffrée, ce que tous les mauritaniens savaient, et vivaient quotidiennement: l’anarchie économico financière a prévalu 15 ans chez nous. Il reste à définir les responsabilités.

 



Une image vaut plus que mille mots. Ce dicton s’avère encore plus juste à la lecture du rapport des données macroéconomiques mauritaniennes entre 1992 et 2004. Les graphiques montrant les taux de croissance réels, et les réserves réelles de change après audit montrent très bien le fossé entre les données réelles constatées après révisions, et celles officialisées dans cette période.

Concernant le taux de croissance, le rapport constate des différences allant souvent jusqu’à 7 points de différence! Comme en 1994 où un taux de croissance de 4,25% était annoncé, alors qu’il était en réalité de -3%! Le rapport note les raisons de cet écart dans une spirale infernale commencé par le mensonge financier qui a clôturé l’état dans des politiques d’inaction. Mais un tel écart est bien sûr expliqué par l’opacité des exercices bancaires et administratifs mauritaniens, et la corruption notoire qui en suit. C’est ce qu’ose murmurer (à peine) le rapport, dans les conditions de la mauvaise gouvernance qui résulte d’une mauvaise appréciation (doux euphémisme) de la réalité économique mauritanienne. En effet, selon le rapport, "la gestion macroéconomique ne pouvait qu’être désastreuse parce que la plupart des mesures appropriées au contexte réel ne pouvaient être entreprises sans être en contradiction avec les données communiquées"(sic).

Ainsi, la politique budgétaire conduite sur la période 1992-2004, compte tenu de la situation d’équilibre affichée, et de l’épargne auprès de la Banque Centrale, ainsi que des besoins stratégiques de réduction de la pauvreté, était expansionniste, donc inflationniste à moyen terme, ce qui est le grand danger d’une telle politique. Elle a aggravé ainsi la situation de déséquilibres intérieurs et extérieurs. Le financement du déficit public ne pouvait être ainsi financé que par les avances de la Banque Centrale, ou par l’accumulation d’arriérés. Cette politique a mené l’État vers une situation de faillite apparente, renchérissant le coût des services facturés à l’État, et parfois même ne permettant pas l’acquisition de ces services avec les effets négatifs sur la continuité du service public.

 

Un flou perpétué par les successives politiques monétaires

Les politiques monétaires mauritaniennes dans la période considérée ci-dessus ont d’abord et avant tout été conditionnées (au moins dans les dix dernières années avant le putsch du 3 août) par des visées politiques, notamment du Déchu. Cette politique a été "accommodante" selon le rapport, dans la mesure où paradoxalement au fait que le taux directeur de la BCM (qui évalue l’état de la masse monétaire en circulation) était resté stable aux alentours de 11%, (avec des pics de 18% en 1998), la masse monétaire2,  M2, qui quantifie la masse d’argent liquide et fiduciaire( scriptural et fiduciaire), elle, progressait annuellement en moyenne de 25%, avec un pic de 34,3% en 2001! Ce paradoxe révèle tout le mensonge qui a voilé les politiques bancaires, financières et monétaires surtout de l’État pendant cette période anarchique.

Le PIB entre temps a oscillé en moyenne autour de 3,4%, tiré essentiellement par le secteur privé, notamment les services (hôtels, restaurants, commerces), et les BTP. Le pic de 9,8% en 1995 a été obtenu grâce à une année agricole exceptionnelle. Les parents pauvres de la croissance mauritanienne ont été les entreprises publiques, véritables gouffres financiers de l’État. Sa politique à leur égard est infantilisante et déresponsabilisant au possible. Aucune société publique hors la SNIM, ne présente un solde positif. Au bord de la faillite, l’État reverse de l’argent dans les comptes, qui ne sera pas réinvesti mais, sera ingurgité dans de nouveaux gosiers. Ainsi, les services publics, les sociétés publiques plombent les recettes, la croissance créée par le privé mauritanien très actif. On en revient aux mêmes constations: à quand la fin de la corruption, et le début des compétences à la tête des grandes entreprises publiques?


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