D’un allègement à l’autre :  1,1 Milliard US $ restent à payer!   
02/07/2006


La dette multilatérale  mauritanienne a été allégée d’à peu prés 2 milliards de dollars entre 2002 et 2006. Un chiffre qui donne le vertige parce qu’il dépasse les 500 milliards d’ouguiyas pour un pays peuplé d’à peine trois millions d’habitants. L’annulation de 2002 portait sur 1,1 milliard de dollars. Celle de 2006 sur 819 millions de dollars. Comme la précédente, la toute récente doit permettre aux autorités de mobiliser des ressources jadis prédestinées au paiement de la dette, pour financer le développement.

En  juin 2002, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM) ont décidé de faire bénéficier la Mauritanie d’un allègement de dette de 1,1 milliard de dollars au titre du programme pour la réduction de la dette des pays pauvres très endettés (PPTE).



En fait, la valeur nette de l’allègement à l’époque n’était que de 622 millions de dollars (50% de la dette) mais  pouvait  atteindre 1,1 milliard de dollars si l’ensemble des intérêts et des remboursements du principal que la Mauritanie aurait dû payer était pris en compte.

En juin 2006, le FMI et la BM décident l’allégement à 100% de la dette de la Mauritanie, soit 819 millions de dollars correspondant à l’encours au 31/12/2004 de la dette due au FMI (45 millions), à la Banque Mondiale (521 millions) et au groupe BAD/FAD (253 millions).Une aubaine qui permettra à la Mauritanie d’économiser en moyenne plus de 25 millions de dollars représentant le service annuel de la dette due à ces trois créanciers au cours des 20 prochaines années. L’annulation de ces dettes fait suite à une décision politique émanant des chefs d’Etat du G8, au cours du sommet de Gleeneagles, tenu en juillet 2005.

N’empêche, en décembre 2005, le groupe du FMI pose des conditions à l’éligibilité de la Mauritanie. Tollé général chez nous: pourquoi poser des conditions, seulement à la Mauritanie parmi19 pays? "Nous ne méritons pas cela.

Si un régime dictatorial et anti-démocratique a fait des actions de mauvaise gestion, le peuple mauritanien ne peut pas en être responsable et en récolter les conséquences injustes de la part du FMI", avait déclaré à l’époque, Messaoud Ould Boulkheir, un géant de notre scène politique nationale.

 

 

«L’aboutissement d’une politique de transparence»

Depuis août 2005, la Mauritanie s’est comportée en élève studieux acceptant la mise sous observation par les services du FMI des comptes nationaux .Le jeu en valait la chandelle: Nous ne payerons plus les 819 millions de dollars. Le Premier ministre Sidi Mohamed Ould Boubacar l’a expliqué vendredi dernier à la presse nationale et internationale.

Entouré par Abdellahi Ould Souleymane le ministre des finances, et Zeine Ould Zeidane, le gouverneur de la BCM, Ould Boubacar a mis les points sur les «I»: «l’annulation de la dette extérieure de la Mauritanie est l’aboutissement de la politique de transparence et de saine gestion économique mise en oeuvre par le Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie et le gouvernement de transition Â».

Cette  politique  a permis de restaurer la crédibilité du pays vis-à-vis de ses partenaires au développement, notamment le FMI dont le conseil d’administration avait, au 27 mai 2005, fait de la clarification des données relatives aux années 2000-2002, et de l’audit externe des états financiers de la BCM, une condition préalable à l’accès à ses  ressources.

Et Ould Boubacar de rappeler le contexte, caractérisé par une impasse dans les relations avec la communauté financière internationale, dans lequel le changement du 3 août était intervenu.  Ainsi, les nouvelles autorités ont considéré que l’instauration d’un dialogue basé sur la confiance avec la Communauté financière internationale, constituait une mesure de bonne gouvernance au service de l’intérêt de la Mauritanie.

Dès novembre 2005, les nouvelles autorités ont commencé à communiquer les données réelles au FMI. La Mauritanie a pu  restaurer le dialogue. Un programme a été mis en place avec le FMI en vue d’atteindre la qualification à  l’annulation de la dette. A travers ce programme, le FMI a pu constater   l’amélioration de la gestion des finances publiques, l’établissement d’un cadre institutionnel transparent pour la collecte et la gestion des nouvelles ressources pétrolières, et l’achèvement du travail de vérification et de révision des données.

D’ailleurs, au cours de son dernier passage en Mauritanie, Jean Le Dem chargé du dossier de  la Mauritanie au FMI, s’était félicité des résultats obtenus par les nouvelles autorités.

Au cours de la conférence de presse du vendredi, le Premier ministre dira pourtant l’essentiel   :«Ces efforts et ces acquis n’auraient aucun sens s’ils ne sont pas traduits de façon concrète sur la vie des citoyens, en particulier, ceux qui vivent des conditions difficiles et toute occasion sera exploitée pour relever le niveau de vie des citoyens, lutter contre la pauvreté et améliorer leurs conditions de vie, comme l’avait déclaré le Chef de l’Etat en janvier».

Ainsi, une loi rectificative de la loi des finances 2006 est en cours et sera soumise au CMJD. Y aura-t-il une nouvelle hausse des salaires? Rien n’est sûr. Car en fait, l’allégement de la dette n’injecte pas de l’argent frais dans les comptes de l’Etat, mais le dispense seulement de payer de l’argent à ses créanciers. Le gouvernement avait-il des disponibilités financières pour  payer ces créances, auquel cas il pourra maintenant les utiliser autrement?

Nul n’a eu la vivacité d’esprit de poser cette question au staff économique au cours de la conférence de presse. Il est classique en effet, d’affecter les montants résultants des allégements de dette à la lutte contre la pauvreté et aux secteurs sociaux, plutôt qu’aux hausses des salaires, même s’il s’agit là, du social par excellence. En attendant de savoir quels seront les champs d’affectation des ressources économisées au titre du remboursement de la dette annulée, la Mauritanie reste toujours endettée. C’est le gouverneur de la Banque Centrale qui nous le dira au cours de la conférence de presse. La dette bilatérale de notre pays reste de l’ordre de 1.1 milliard de dollars.

Nous ne sommes plus un pays très pauvre et très endetté, nous allons évoluer vers une position «intermédiaire» que le gouverneur de la BCM se gardera de décrire. Mais au-delà de cette position intermédiaire, un grand pas a été franchi dans l’instauration de plus de transparence dans la gestion des affaires économiques de ce pays.

Le rapport sur la révision des données économiques entre1992 et 2004, ainsi que le rapport d’audit de la BCM au titre de l’année 2005 sont en ligne sur les sites web de la BCM et de l’ONS. Un autre pas dans la manifestation des vérités économiques du pays.

IOM


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