Le Commissariat aux Droits de l’Homme, à l’Action Humanitaire et aux Relations avec la société civile en collaboration avec l’Agence Nationale d’Appui et d’Insertion des Réfugiés (ANAIR), ont commémoré la journée de réconciliation nationale le 25 mars dernier...
...au Palais des Congrès de Nouakchott. Plusieurs organisations de défense des victimes de la répression des années 89, 90 et 91 étaient présentes aux premiers rangs desquels, le Collectif des Victimes de la Répression (COVIRE).
Le 25 mars 2009, jour pour jour, le Président Mohamed Ould Abdel Aziz, à la tête du Haut Conseil d’Etat qui a renversé le Président Sidi Mohamed Ould Abdallahi, prononçait à Kaédi, un important discours d’apaisement et de reconnaissance d’une erreur humaine de l’histoire politique de la Mauritanie. Cette journée historique qui a remis au goût du jour, la responsabilité de l’Etat mauritanien dans ce qui semblerait à une «épuration ethnique » à l’occasion de laquelle, des centaines de négro-mauritaniens ont été tués, torturés et des milliers contraints à quitter leur propre pays. Pour panser les plaies de ce qui est convenu d’appeler « passif humanitaire », l’Etat mauritanien, à l’occasion de cette journée de Kaédi, a pris l’engagement républicain, de régler un problème qui tient à cœur l’ensemble des négro-mauritaniens. C’est ainsi qu’à partir de cette date, des étapes importantes ont été franchies notamment par le rapatriement de négro-mauritaniens réfugiés au Sénégal et au Mali voisins. Cette opération a été rendue possible grâce à un accord tripartite Sénégal, Mauritanie et HCR. Mais également, l’implication de l’ANAIR, agence créée en janvier 2008 en vue de faciliter l’opération de rapatriement de milliers de réfugiés mauritaniens dont le rôle a été capital. Chef d’œuvre dans ces opérations, l’ANAIR a permis l’accueil, l’appui et l’insertion de plus de 20 000 citoyens mauritaniens de retour au bercail.
Plus de 20.000 mauritaniens retrouvent les siens
Depuis le début des opérations de rapatriement le 29 janvier 2008 jusqu’au 31 décembre 2010, l’ANAIR a enregistré 20.484 personnes de retour réparties dans 118 sites réservés dans les wilayas (régions) du Trarza, du Brakna, du Gorgol, du Guidimakha et de l’Assaba. Ces mauritaniens de retour ont bénéficié des sites aménagés avec des ouvrages hydrauliques, la livraison de vaches laitières suitées, de moulins à grains et de décortiqueuses, la réalisation d’opérations de teinture, d’aviculture, d’embouche ovine, les aménagements hydro-agricoles, des cultures sous pluie et des réserves pastorales. Il s’y ajoute la réalisation des marchés communautaires en collaboration avec les partenaires au développement, notamment le PNUD.
L’unité nationale en priorité
La date du 25 mars est considérée par les autorités mauritaniennes comme une date historique. La commémorer, devient alors une condition sine qua non pour la réalisation de l’unité nationale. Car, cette date restera dans la mémoire collective des Mauritaniens. Une raison qui a motivé le Commissariat aux Droits de l’Homme, à l’Action Humanitaire et aux Relations avec la société civile et l’ANAIR d’organiser chaque 25 mars de l’année, une journée commémorative de cet appel à réconciliation de Kaédi. Ce 25 mars dernier, au Palais des Congrès, il a été question de se souvenir des années de braises et de dire : « plus jamais ça ». D’ailleurs le thème choisi par les organisateurs : « L’insertion des rapatriés, facteur de renforcement de l’unité nationale », répond aux aspirations de tout un peuple qui veut désormais vivre en symbiose. C’est d’abord par une projection de film retraçant les étapes posées en vue d’une réconciliation nationale, notamment le discours du Président Aziz à Kaédi, le retour des différents contingents des rapatriés, leur installation et leur insertion dans les différents sites d’hébergement ainsi que leurs activités quotidiennes, les témoignages émouvants des uns et autres qui parlent désormais d’unité nationale dans une Mauritanie plurielle et diversifiée. Ensuite, la deuxième partie de la projection montre des artistes mauritaniens toute identité confondue chanter l’unité nationale. Et au bout du compte, le clip réalisé par le HCR indique que la Mauritanie est une nation à plusieurs visages. Pour mettre le beurre dans le pain, les artistes Noura Mint Seymali et Amadou Gawdé Ba ont fait une prestation en duo comme pour dire : la Mauritanie, c’est ça. C’est le melting-pot. Leur chanson a matérialisé l’unité nationale. Car, disaient les artistes : « Notre unité, c’est notre force».
Des discours à l’image d’un bilan de parcours
C’est d’abord, M. Harouna Seydou, représentant les associations des rapatriés mauritaniens du Sénégal, de prendre la parole pour remercier les autorités d’avoir permis le retour organisé des citoyens mauritaniens. Il a également décri la vie des rapatriés dans les sites et demandé son amélioration ainsi que la création d’emplois. Pour sa part, M. Sy Abou Bocar, président du Collectif des Victimes de la Répression (COVIRE), il a indiqué que la journée du 25 mars est une manière de faire une évaluation du règlement du passif humanitaire. Il a magnifié à et effet l’engagement des autorités qui ont reconnu courageusement les exactions commises sur une communauté avant de poser des actes en vue d’un règlement de ce passif humanitaire. Il a ainsi rappelé quelques phrases apaisantes du Président Aziz lors de son discours du 25 mars à Kaédi avant de faire une évaluation des doléances dont certaines sont satisfaites et d’autres non. Toutefois, le président du COVIRE a indiqué que « La question foncière reste le sujet préoccupant». Quant à Ba Madine, Directeur Général de l’ANAIR, il a dit que cette journée du 25 mars constitue « un symbole pour l’avenir de notre jeune nation ». C’est la deuxième du genre marquant l’anniversaire de la Grande Prière de Kaédi. Ba Madine a indiqué à l’occasion que « Notre conviction profonde est qu’aucun développement viable et durable de notre cher pays ne saurait intervenir sans un resserrement des liens multiséculaires entre les différentes composantes de notre peuple ». Des liens qui, selon le DG de l’ANAIR, tirent leur richesse de la diversité socio-culturelle de la Mauritanie. Comme ses prédécesseurs, il a fait un bilan des opérations de rapatriement depuis 2008 jusqu’au 31 décembre 2010 et les jalons posés pour parvenir à l’insertion effective des rapatriés. Il a toutefois remercié tous ceux qui ont contribué à la réussite de toutes ces opérations et en particulier le HCR. Enfin, le Commissaire aux Droits l’Homme, à l’Action Humanitaire et aux Relations avec la société civile, M. Mohamed Abdallahi Ould Khattra a souligné «l’importance de cette journée qui a constitué un démarrage effectif du règlement du passif humanitaire découlant des violations des droits de l’homme commises dans le passé en Mauritanie » et qui a constitué une menace pour l’unité nationale. Toutefois, dira-t-il, le Président Aziz a entrepris d’asseoir les fondements stables d’un règlement du passif humanitaire en collaboration avec les organisations de défenses des victimes. Ce qui, selon le Commissaire a permis de reconnaître la responsabilité de l’Etat et le droit de compensation des victimes. La cérémonie a été marquée par la forte présence des organisations de défenses des victimes, notamment le COVIRE qui regroupe policiers, militaires, gendarmes …, le regroupement des réfugiés du Brakna, du Trarza, du Gorgol, de REVE et du Collectif des rescapés et anciens détenus politiques civils torturés (CRADPOCIT). Outre la présence des autorités locales concernées, le corps diplomatique était également présent à la cérémonie. Compte rendu Ibou Badiane
DISCOURS DU DIRECTEUR GENERAL DE L’ANAIR M. BA MADINE A LA CEREMONIE DE COMMEMORATION DE LA JOURNEE NATIONALE DE RECONCILIATION (25 Mars 2011)
Messieurs les Ministres ; Monsieur le Commissaire aux Droits de l’Homme, à l’Action Humanitaire et aux Relations avec la Société Civile ; Excellences Messieurs les Ambassadeurs et Représentants des organisations et organismes internationaux ; Mesdames, Messieurs les élus ; Honorables invités,
La présente cérémonie de commémoration de la Journée nationale de réconciliation, m’offre l’agréable occasion de m’adresser à vous pour souligner l’importance de ce symbole pour l’avenir de notre jeune Etat, la République Islamique de Mauritanie. Cette journée, marquant le deuxième anniversaire de la Grande Prière de Kaédi, effectuée sous la conduite éclairée de Son Excellence Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz, Président de la République, est essentiellement dédiée à la réconciliation nationale. Notre conviction profonde est qu’aucun développement viable et durable de notre cher pays ne saurait intervenir, sans un resserrement des liens multiséculaires entre les différentes composantes de notre peuple. Ces liens, qui se manifestent dans tous les secteurs de la vie, tirent leur richesse de la diversité socio-culturelle de la Mauritanie. C’est pourquoi depuis 2008, les autorités mauritaniennes, suite à une large concertation de tous les acteurs de la vie politique, économique et sociale, ont décidé de procéder au règlement de ce qu’il est convenu d’appeler « le passif humanitaire ». Et, dans ce cadre, le retour volontaire des réfugiés mauritaniens suite aux douloureux évènements de 1989, constitue un acquis incontestable. En effet, au 31 décembre 2010, les autorités mauritaniennes ont permis le retour de 20 484 personnes, dans le cadre d’un Accord tripartite (Gouvernement du Sénégal, Gouvernement de la Mauritanie, Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés). Ces retours volontaires se sont déroulés en deux phases :
la première phase, de janvier 2008 au 31 décembre 2009, est appelée « rapatriement volontaire organisée », a permis le rapatriement de 19 048 personnes ;
la seconde phase, d’octobre à décembre 2010, est appelée « rapatriement assistée », a permis le rapatriement de 1 436 personnes, avec une certaine substitution du HCR par l’ANAIR dans la mise en œuvre des opérations.
Le thème de la journée cette année concerne l’insertion des rapatriés et son importance dans le renforcement de l’unité nationale. Dans cette optique, la concrétisation d’une stratégie nationale a permis de renforcer tous les facteurs de cohésion sociale entre les communautés de rapatriés et d’accueil. Cette Journée nationale n’est donc pas seulement un acte solennel de commémoration, elle est également et surtout l’occasion de transmettre des messages forts, d’exhiber des ambitions légitimes et des volontés fermes, pour édifier un avenir prometteur. C’est dans cette optique que l’Agence Nationale d’Appui et d’Insertion des Réfugiés (ANAIR) s’est résolument engagée à traduire concrètement la volonté mainte fois réitérée, à garantir aux populations des zones de retour des rapatriés, des conditions d’une vie décente et pérenne. L’ANAIR s’est aussi engagée à œuvrer en vue de favoriser l’insertion économique et sociale des rapatriés, ainsi qu’à faciliter le renforcement de la cohésion sociale. La volonté des autorités mauritaniennes à résoudre cette épineuse question est clairement affirmée par le Président de la République, à l’occasion de plusieurs adresses. Elle s’est concrétisée par les réalisations incontestables de l’ANAIR, en trois ans d’existence. A titre d’illustration, on peut citer :
-la distribution de parcelles loties au profit de toutes les familles rapatriées,
-la distribution de 6 949 vaches laitières suitées,
-l’acquisition par les rapatriés de 90 magasins communautaires, de 83 moulins à grains et de 12 décortiqueuses,
-la réalisation de 6 forages, de 12 puits, de 10 raccordements aux réseaux de distribution d’eau et la distribution de 129 charrettes équipées, 28 pirogues pour la pêche continentale,
-la construction de 54 mosquées, de 57 hangars communautaires et de 6 marchés communautaires,
-l’aménagement et l’exploitation de 117 ha pour la culture irriguée, de 1 120 ha pour la culture sèche et de 2 250 ha pour les réserves pastorales,
-la réalisation de 24 parcs de vaccination,
-la construction de 57 salles de classes, etc.
Cette énumération est loin d’être exhaustive. Elle permet simplement d’illustrer le degré de mobilisation répondant à la volonté politique clairement exprimée. Toutes ces réalisations sont destinées à la fois à favoriser une bonne intégration des populations rapatriées et à parfaire la cohésion sociale. C’est d’ailleurs pour favoriser cette cohésion sociale, donc contribuer à l’unité du peuple mauritanien, que l’ANAIR a mis en œuvre, en collaboration avec le PNUD, un « Projet de prévention et de gestion des conflits », qui permet aux populations d’accueil et aux populations rapatriées de renforcer encore davantage leur « commun vouloir de vie commune ». L’organisation du retour des réfugiés mauritaniens dans leur pays d’origine, n’est pas seulement le règlement d’une injustice notoire ; elle est aussi et surtout une contribution non négligeable à l’effort de consolidation de l’unité nationale, qui est une œuvre de chaque Mauritanien et de tous les Mauritaniens. Excellences Mesdames et Messieurs, Je ne terminerai pas sans remercier SE M. Le Président de la République, ainsi que les autorités mauritaniennes, à tous les niveaux, impliquées dans cette opération de rapatriement, pour leur soutien sans faille à l’œuvre entreprise par l’ANAIR, avec la collaboration fructueuse de partenaires. Parmi ces derniers, il me plait de mentionner le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), avec qui nous développons un partenariat exemplaire, notamment sur le terrain. Le HCR et l’ANAIR, en collaboration avec les autres partenaires, ont mis en œuvre un mécanisme de coordination qui force l’admiration de divers acteurs du domaine humanitaire, en Mauritanie, comme à l’extérieur de nos frontières.
Je vous remercie.
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