Juste à la veille du scrutin présidentiel du 18 juillet 2009 , Tahalil Hebdo avait recueilli cette interview avec Mohamed Nacer Ould Moctar Nech. Toujours d’actualité, M. Ould Moctar Nech nous y livre ses sentiments sur l’actualité politique du pays.
Tahalil Hebdo : La campagne entame sa deuxième semaine et elle bat plus que jamais son plein, quels sont vos sentiments à ce sujet ?
MNOMN : D’abord un sentiment de fierté car finalement le pays donne encore une autre fois le signal fort que les mauritaniens sont profondément ancrés dans la tradition qui les caractérise à savoir l’indépendance de pensée, la libre organisation politique et corporative. La preuve, vous voyez toutes la diversité des candidatures et les disparités dans le discours politique à l’intention des électeurs dans leur ensemble… Les mauritaniens ont dans le principe la possibilité de choisir le candidat qui leur paraît le mieux répondre à leurs attentes ! TH : Mais il est clair qu’u camp parle plus fort et menace même de revenir au statu quo d’avant les accords de Dakar… MNOMN : C’est un point de vue qui vaut ce qu’il vaut mais gare aux erreurs de jugement. Cela paraît être plus un débat d’intellectuels qu’autre chose car la Mauritanie a officiellement fait l’impasse sur le coup d’état et les regards sont maintenant tournés ailleurs ! Ce qui intéresse les mauritaniens par rapport au scrutin du 18 juillet 2009, c’est leur devenir et la qualité de leur quotidien à court et moyen terme, pas les débats tournés continuellement sur le passé… TH : Parlons de ce passé tout de même, ne trouvez vous pas que les mauritaniens en ont assez des régimes dictatoriaux et inaptes à gérer les problèmes de la Mauritanie ?
MNOMN : tout à fait d’accord avec vous mais où sont les problèmes ? Il faut cibler les vrais problèmes, c’est-à -dire les causes, les véritables causes des problèmes de la Mauritanie… Ces causes sont bien circonscrites et il s’agit avant tout de la corruption de la classe politique et économique qui fait que la vie dans ce pays est devenue un enfer pour plus de 95% des citoyens. En fait, une minorité de personnes se sert dans la caisse de la communauté en toute impunité décourageant toute entreprise ou initiative politique non affiliée et reléguant aux oubliettes les plans de développements sociaux mis en œuvre par l’état et les partenaires au développement. Il n’y a qu’en Mauritanie que l’on peut voir au grand jour les fonds destinés à l’éducation , à la santé publique et bien d’autres encore recyclés par des fonctionnaires et leurs complices dans les affaires en villas, troupeaux de chameaux ou sous formes d’encaisses en tous genre sur le territoire ou à l’étranger…..Dans les régimes qui ont gouverné, les mauritaniens n’ont eu aucune assurance sur leur avenir autrement que par la collusion autour de la gabegie. Les mauritaniens travaillent pour leur majorité, si non pour leur totalité au noir et avec un système de débrouillardise sans cesse évolué pour survivre. La situation est grave, très grave ! A présent, il est possible de comprendre le message que les mauritaniens veulent entendre de la part des politiques … La dictature, ce n’est pas le pouvoir exercé par des hommes sous les drapeaux ou inspiré par eux, c’est le pouvoir exercé sous la corruption politique et économique même par un civil. Nous pouvons, le 18 juillet prochain, élire indifféremment l’un des dix candidats en lice. Il ne pourra rien faire si les rênes du pays sont en réalité tenus par des trafiquants en tous genres, juste soucieux de s’enrichir et enrichir ceux qui les aident au sein de l’appareil de l’état dans leurs mafieux desseins. Je pense que les hommes d’affaires qui se retrouvent dans ce qualificatif de mafieux, et tout le monde les connait ou presque, ont encore le temps de se repentir et travailler pour laisser le peuple mauritanien exercer librement sa souveraineté politique et économique. Il n’est pas question de les laisser acheter le vote populaire et nous faire revenir à la case départ. TH : c’est là un discours qui sort de l’ordinaire et peu diplomatique contrairement à vos habitudes…
MNOMN : Il est grand temps de se départir de la retenue politique car encore une fois le pays est ruiné par 50 ans de gestion calamiteuse et tout le monde doit se liguer pour empêcher un retour au statu quo. En tant que citoyen, J’appelle les bailleurs de fonds, états partenaires, organismes multilatéraux et bilatéraux, à aider le futur gouvernement à rapatrier les capitaux indûment stockés à l’étranger par des ressortissants mauritaniens, qu’ils soient fonctionnaires ou hommes d’affaires car la Mauritanie en a besoin…Ce sont les bien de la communauté mauritanienne et non la propriété de ceux qui les ont spoliés…
TH : C’est le discours en quelque sorte d’un candidat bien précis pour la magistrature suprême le 18 juillet prochain…
MNOMN : pas en quelque sorte et pas seulement, si je vois bien à qui vous pensez, mais le Général Ould Abdel Aziz est celui qui a fait de ce leitmotiv son seul discours politique depuis son avènement au pouvoir le 6 août 2008. C’est inconstetable ! Et c’est le candidat dont le message est le plus édifiant à ce sujet et dont le programme est le plus clair ! Et c’est le seul à mon avis dans le contexte actuel qui peut appliquer ce programme ambitieux. TH: Et que faites vous des attaques personnelles contre les candidats adverses ? Est – ce bien là une stratégie probante…. Tout le monde ou presque se rallie aux candidats concurrents si bien que l’on se demande au vu de cela si le général ira au deuxième tour ! MNOMN : Dans une campagne de cet enjeu, un candidat peut prendre des positions féroces mais c’est au peuple de juger. Et puis, Il est loisible aux autres candidats de s’en prendre à leur tour au général et je crois qu’ils ne s’en privent guère. La plupart des mécontents aux quels vous faites allusion, je dis bien la plupart, car certains groupes ou individualités sont mues par d’autres exigences, claquent la porte quand ils n’ont pas eu la main sur les fonds électoraux ou bien quand un refus a été objecté à leurs calculs spéculatifs sur le port de voix par l’argent ou par l’ascendance archaïque du maître ou du chef sur ses sujets, ce que le parti UPR refuse et se refusera toujours à accepter dans la Mauritanie que nous voulons construire pour tous les mauritaniens sans exclusive. Ceux qui veulent perpétuer la société mauritanienne dont nous ne voulons pas sont libres de partir où ils veulent ! Ould Abdel Aziz établit que pour gérer le pays, il faut d’emblée assainir la scène politique et économique du pays et en cela il a parfaitement raison.
TH : pensez vous que le Général va remporter le scrutin ?
MNOMN : non seulement je le pense mais j’y crois et que le meilleur gagne.
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