Plage des pĂŞcheurs : Le serait-elle encore?   
08/04/2008

La plage des pĂŞcheurs ne l’est plus que de nom. Le bĂ©ton et le fer ont eu raison des dunes de sables. Le ballet incessant des voitures et le vacarme de la foule rendent le milieu plutĂ´t urbain. Sous les pieds, le sable fin couleur or,   a pris une teinte grise.



L’activité première du lieu est moins intense : le poisson se fait rare sous le hangar principal. Enfin, la plage a perdu de son charme.

En cet après-midi du samedi 29 mars 2008, malgré l’atmosphère poussiéreuse résiduelle de la tempête de sable qui s’est abattue sur Nouakchott il y’a 24 heures, la mer offre une couleur étonnement verte et un air frais venu du large rafraîchit les corps moites. La plage quant à elle reste égale à elle-même. Une meute d’hommes et de femmes l’a prise d’assaut et chacun, en fonction de l’activité qu’il exerce investit son périmètre. Certains sont des visiteurs d’un jour. Ils arrivent de la ville d’où ils ont été chassés par la canicule. Sur la grève, des centaines de pirogues sont au sec et barrent l’accès à l’océan. Il faut se faufiler entre les embarcations pour y parvenir. Au large, on en aperçoit quelques dizaines attendant le feu vert de leurs camarades sur terre pour accoster et décharger leurs prises. Mais, ce jour là, à en juger par le fond des pirogues où l’on peut voir quelque menu fretin, on déduit que la pêche n’a pas été bonne. De plus, le prix de la sardinelle, l’espèce la moins chère et que l’on peut obtenir à 15 UM, les bons jours, affiche ce jour, une pointe qui va jusqu’à 70 UM la pièce.

 Un baromètre Ă©difiant
Autre signe : le hangar principal du marchĂ© au poissons qui, habituellement regorge de variĂ©tĂ©s d’espèces, ne prĂ©sente que des daurades, des capitaines, des thons rouges en quantitĂ© importante. D’autres espèces pas forcĂ©ment plus rĂ©putĂ©es mais en petite quantitĂ© sont chères Ă  acquĂ©rir. Aussi, Le crabe rouge se vend Ă  1.200 UM le kilogramme, de petits mĂ©rous sont proposĂ©s Ă  800 UM le kilogramme, le mulet, poisson moins important que ses Ĺ“ufs, coĂ»te 650 UM le kilogramme. Quant aux grosses corbines, on ne les obtient pas Ă  moins de 1.000 UM le kilo. Il semble que le temps des cĂ´tes aux ressources inĂ©puisables soit fini. Rokhaya Fall, vendeuse de poisson, entre deux coups de hache qu’elle plante dans les chairs d’une Ă©norme corbine lance : « la mer est pleine de poissons. C’est juste que le temps soit mauvais depuis deux jours ! » Deux voisines de Rokhaya acquiescent. « Non, il n’y a plus rien dans l’ocĂ©an, les bateaux Ă©trangers ont tout pillĂ©. Ça sera plus grave dans quelques annĂ©es », crie une voix par-dessus les tĂŞtes. Dès cet instant, un dĂ©bat Ă  ciel ouvert s’est installĂ© sur les rĂ©elles potentialitĂ©s de nos rĂ©serves halieutiques. Par ailleurs, ce que l’on note comme nouveautĂ© dans le domaine de la plage des pĂŞcheurs, ce sont les Ă©difices de plus en plus importants que l’on voit surgir des sables.
Le paradoxe du sable
Ils abritent les locaux des infrastructures qui ne cessent de se mettre en place. C’est ainsi que la place centrale de la plage oĂą l’on Ă©vidait les poissons a depuis quelques mois Ă©tĂ© nettoyĂ©e de ses occupants et la CommunautĂ© Urbaine de Nouakchott est entrain d’y installer des infrastructures de pĂŞche. Cette situation qui  a eu pour effet de confiner les Ă©cailleurs de poissons dans l’extrĂŞme sud de la plage n’est paradoxalement pas pour les dĂ©plaire. Pour Djibril Ould Sidi Ă©cailleur, cette situation n’est pas si mauvaise : « On nous a mis ici en attendant de finir la construction des infrastructures. Ici, nous ne payons pas d’impĂ´t. Et nous pouvons gagner de 2.000 Ă  4.000 UM  les jours oĂą ça marche bien, donc je ne suis pas pressĂ© de retourner lĂ -bas. » D’autre part, un fait notoire a fait depuis quelques temps son apparition sur la plage. Il s’agit de la signalisation mĂ©tĂ©orologique. En effet, sur tous les points saillants, des panneaux Ă  cĂ´tĂ© desquels flottent des drapeaux indiquent le devoir du respect des conditions mĂ©tĂ©orologiques. Ainsi, lorsque le drapeau est rouge, c’est que la mer est très mauvaise donc, interdiction de sortir. Quand il est jaune, c’est qu’elle est agitĂ©e, il faut prendre ses prĂ©cautions avant de sortir. Enfin,  quand le drapeau est vert, la mer est favorable mais il faut toutefois prendre ses prĂ©cautions. Ces indications fort importantes sont l’œuvre conjointe des Ministères des PĂŞches et celui des Transports. Et il n’est pas dit que cela empĂŞchera les casses cou de prendre la mer par les jours de tempĂŞte mais, les pĂŞcheurs du dimanches pourront eux, s’en inspirer Ă  dĂ©faut de bulletins mĂ©tĂ©os systĂ©matiques. En dĂ©finitive, il faut bien se rĂ©soudre Ă  admettre la disparition progressive de la belle plage qui en faisait un petit port naturel et compter sur le prochain règne du ciment et du fer. Les affaires d’abord, l’écologie ensuite. 
Biri   N’Diaye


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