DĂ©claration de presse de Boydiel Ould Houmeid   
02/04/2009

La rumeur qui a circulé sur mon compte en rapport avec un contrôle de l’Inspection générale d’Etat (IGE) à la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) m’amène à publier cette déclaration, afin d’éclairer l’opinion nationale et internationale sur cette affaire.



En 2007 et 2008, la CNAM a fait l’objet de trois inspections d’Etat, la dernière en date étant celle qui a débuté le 18 novembre 2008 pour s’achever le 13 janvier 2009. Ce dernier contrôle s’est distingué des autres par le fait qu’il s’est résolument inscrit dans le cadre de la chasse aux sorcières engagée contre tous ceux qui ont osé dénoncer le coup d’Etat du 06/08/08 et qui, à un moment ou à un autre, ont eu à gérer des biens publics.

Il s’agit d’une manipulation machiavélique visant à neutraliser l’adversaire politique et à salir sa réputation, en faisant croire à l’opinion qu’il est trempé dans une sombre affaire de détournement de deniers publics. En fait, nous assistons à une véritable instrumentalisation de l’IGE, depuis que l’ex-inspecteur général, qui avait refusé de se prêter à ce jeu, a été remplacé par quelqu’un de malléable et de corvéable à souhait.

L’une des premières cibles a été recherchée en ma personne à moi. Mais sur ce coup, l’IGE a été mal inspirée, au vu de l’expérience que j’ai acquise dans l’exercice, non seulement des responsabilités de gestion, allant de comptable de département au portefeuille de ministre, en passant par directeur de service et d’établissement, mais aussi de fonctions de contrôle, telles qu’inspecteur général des finances, contrôleur d’Etat et conseiller à la chambre financière de la Cour suprême. Fort de cette expérience-là, je m’autorise à formuler les remarques suivantes au sujet du contrôle en question et de la mise en demeure sous-jacente.

En ce qui concerne la procédure, le vice de forme est patent, dans la mesure où le contrôle, dont le but est normalement pédagogique, a été orienté vers un objectif arrêté d’avance : sanctionner à tout prix. En effet, la mise en demeure a été datée du 22-02-09 et notifiée le 24-02-09, mais le texte même de la lettre notifiant la mise en demeure porte la date du 24 novembre 2008, soit six jours après le début du contrôle. Ce qui signifie que le but visé par l’IGE était déterminé avant même que les résultats du contrôle ne soient connus.
 
S’agissant du fond, l’IGE a cité les articles 164 à 167 du Code pénal relatif à des détournements et/ou dissipations prévus à l’article 379 du même code. Or, dans la mise en demeure, l’Inspecteur général Sidi Ould Ahmed Deya invoque des évacuations non réglementaires, des billets non justifiés, des remboursements de soins non justifiés et des dépenses de fonctionnement non justifiées. J’ai réclamé à l’IGE, par lettre en date du 25-02-09, les détails des sommes retenues pour remboursement, mais ma requête est restée sans suite.

Au départ, dans sa lettre n° 18 du 20/01/09, l’IGE chiffrait les sommes à réclamer à 276.960.959 UM (deux cent soixante seize millions neuf cent soixante mille neuf cent cinquante neuf). Par la suite et après ma réponse en date du 04/02/09, ainsi que celle du Directeur général actuel de la CNAM et les réponses des cadres interrogés à ce sujet, l’IGE a ramené ce montant à 102.752.662 UM (cent deux millions sept cent cinquante deux mille six cent soixante deux). A défaut donc de pouvoir atteindre leur projection initiale, ils sont revenus à cette somme sur la base des libellés cités plus haut.

Au regard de la réglementation en vigueur, les motifs invoqués, en plus du fait que leur vocabulaire est inapproprié, ne peuvent en aucun cas justifier la délivrance d’une mise en demeure. Au pire, ils tomberaient sous le coup de la faute de gestion. Et à supposer que ce soit le cas, l’article 33 de la loi 93-019 du 26 janvier 1993, relative à la Cour des Comptes, définit en son dernier alinéa les fautes de gestion comme étant entre autres "l’octroi ou la tentative d’octroi à soi-même ou à autrui d’un avantage injustifié, en argent ou en nature, entraînant un préjudice pour un organisme public ou pour tout autre organisme soumis au contrôle de la Cour des Comptes". Et l’article 35 de la même loi d’ajouter : "en cas de pluralité d’infractions, les amendes prévues à l’article précédent ne peuvent se cumuler qu’à concurrence de la plus élevée d’entres elles", tandis que l’article 34 précise que "cette amende ne peut être inférieure à 100.000 UM, ni supérieure au triple du traitement ou salaire brut mensuel alloué à l’auteur de l’infraction au moment de l’infraction".

Or, dans cette affaire, il n’y a pas eu de faute de gestion et encore moins de détournement pouvant servir de motif à une mise en demeure. De quoi s’agit-il en fait? Il s’agit de dépenses engagées en conformité avec les dispositions de l’ordonnance 006-2005 instituant l’assurance maladie obligatoire en Mauritanie et du décret 135-2006 du 07-12-06 fixant les règles d’organisation et de fonctionnement d’un établissement dénommé Caisse nationale d’assurance maladie, en ses articles 17, 18 et 19.

D’abord, toutes les personnes dont les noms figurent sur la liste établie par l’IGE et à la place desquelles on me demande de rembourser sont des assurés de la CNAM et disposent de leur carnet d’assurance maladie en bonne et due forme.
 
Ensuite, la lettre du président du Conseil national de santé sous le numéro 06 du 27 juin 2007 a explicitement laissé à la CNAM le soin d’apprécier les cas de patients se traitant à l’étranger sans évacuation préalable du conseil de santé.

De surcroît, les intéressés ont été envoyés pour des soins en application d’une tradition vieille comme l’indépendance de la Mauritanie, et n’ont pas pleinement bénéficié du traitement réservé aux autres évacués, car ceux-là bénéficient toujours, en plus du billet du patient, d’un titre de transport pour accompagnant et d’une prise en charge de leurs frais de soins et de séjour, ce qui n’a pas été leur cas à eux.

Je me permets quand même de citer à titre d’exemple quelques noms parmi ceux à la place desquels on me demande de payer : Cheyakh Ould Ely, actuel directeur de cabinet du général Mohamed Ould Abdel Aziz, Mohamed Mahmoud Ould Brahim Khlil, conseiller du général Mohamed Ould Abdel Aziz, Yahya Ould Sidi Jaafar, le député Mahfoudh Ould Khattry, Diarramouna Soumaré, Abou Khalidou BA, le député Cheikh Ahmed Ould Khalifa, Médecin-colonel El Hassen Ould Selme, Dr Hadrami Ducros et feu Sid’Ahmed Ould Lab, etc.
Si la conviction sincère de l’IGE est que ces gens ont perçu un argent indu, c’est à eux qu’elle doit demander le remboursement.

Pour terminer, je dois dire que beaucoup de mes amis, frères et camarades m’ont instamment demandé de ne pas payer ces sommes indues, car le payement équivaudrait à une reconnaissance de facto des accusations portées contre moi. Ma réponse a été que le payement a le mérite de fausser le jeu de ceux qui me veulent du mal, étant entendu par ailleurs que je ne crains pas la prison et je l’ai faite à plusieurs reprises pour mes convictions politiques. Mais, cette fois, on veut me jeter en prison pour des raisons politiques déguisées sous l’étiquette d’une prétendue lutte contre la gabegie et les "Roumouz el vessad". Je l’éviterai de mon mieux, mais je ne baisserai pas les bras pour autant, afin de préserver ma dignité et mon honneur. Je me battrai pour que justice soit faite dans cette affaire.

 

Boydiel Ould Houmeid


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