En vue de trouver, dans une approche consensuelle, une solution permettant le retour du pays à une situation constitutionnelle normale, les Etats Généraux de la Démocratie( EGD) se sont tenus du 27 décembre 2008 au 5 janvier 2009, au Palais des Congrès à Nouakchott.
Les Etats généraux ont réuni prés de mille cinq cents participants issus de l’ensemble des horizons politiques et socioprofessionnels de notre pays : parlementaires, élus locaux, représentants des partis politiques, des institutions publiques indépendantes, des organisations non gouvernementales, des organisations syndicales et patronales, magistrats, avocats et autres auxiliaires de justice, ulémas, représentants des professions libérales, presse privée, universitaires et personnalités indépendantes.
Dans une démarche originale, ils ont associé et pour la première fois, des représentants venant de toutes les régions du pays et des représentants des colonies mauritaniennes à l’étranger. Dans son discours d’ouverture, le Général Mohamed Ould Abdel Aziz, Président du Haut conseil d’Etat (HCE), Chef de l’Etat a estimé que cette rencontre
« constitue le début d’un tournant important dans l’histoire de notre processus démocratique, car donnant l’occasion au peuple mauritanien, à travers ses représentants légitimes au parlement, dans les communes, les partis politiques et la société civile, d’examiner la situation politique actuelle et de définir les mécanismes nécessaires à l’organisation d’élections présidentielles démocratiques et transparentes, (…) de rechercher les points de faiblesse dans notre jeune système démocratique et les lacunes qui l’entravent pour l’adapter à notre situation politique, sociale et culturelle ».
Elle doit en particulier permettre «de définir la durée de la période de transition et la date des prochaines élections présidentielles ». A cet égard, il a tenu à souligner «l’engagement du Haut Conseil d’Etat, à respecter les décisions et les recommandations qui feront l’objet d’accord de la part de la majorité des participants à ces Etats Généraux ouverts devant tous les acteurs politiques dans le pays sans exclusion». En signe de solidarité agissante avec le peuple frère de Palestine meurtri par l’agression barbare de l’armée israélienne lancée à l’aube du 27 décembre 2008 et qui perdure depuis, les participants ont tenu à observer une minute de recueillement en souvenir des glorieux martyrs de Gaza- et ont su multiplier tout au long de la manifestation, au diapason de la rue mauritanienne, les signes et déclarations de solidarité à l’endroit de la Palestine, y compris celles demandant la rupture des relations diplomatiques de la Mauritanie avec l’Etat d’Israël. Les Etats Généraux de la Démocratie sont placés sous supervision d’une Commission nationale, présidée par une personnalité nationale indépendante, en la personne de Monsieur Abdallahi Ould Cheikh et comprenant trois membres du Gouvernement, cinq parlementaires et deux maires. Les Etats Généraux sont organisés en sept ateliers thématiques :
- Organisation des pouvoirs publics (atelier I) ; - Institutions politiques (atelier II) ; - Organisation des élections (atelier III) ; - Supervision et observation des élections (atelier IV) ; - Calendrier électoral (atelier V) ; - Société civile, médias et élections (atelier VI) ; - Les maires comme acteurs de développement et le rôle
des élus locaux dans le processus démocratique et électoral (atelier VII).
Les travaux de ces ateliers se sont poursuivis du 27 décembre 2008 au 5 janvier 2009, dans une atmosphère de liberté, de responsabilité, de franchise et de tolérance. Il faut reconnaître que cela a été facilité par une organisation particulièrement efficace, en dépit de l’ampleur de la manifestation et du nombre élevé des participants. Les rapports de ces ateliers et la résolution de l’Assemblée Nationale sont annexés au présent Rapport et en constituent partie intégrante. Compte tenu des importants enjeux de l’exercice et du principe de la liberté de parole donnée aux participants, les Etats Généraux de la Démocratie n’ont pas échappé à la tentation du débat général. Dans ce cadre, plusieurs intervenants ont émis le souhait que le dialogue national ainsi amorcé soit ouvert à l’ensemble des acteurs politiques nationaux, dans une perspective de concorde nationale, de tolérance et d’esprit de pardon, en vue de parvenir rapidement à une sortie de crise consensuelle pour une Mauritanie réconciliée, forte, démocratique et prospère. Certains participants ont tenu à rappeler, en revenant sur l’histoire lointaine et immédiate du pays, les problèmes et les opportunités d’aujourd’hui dans le cadre de l’évolution inexorable du pays vers plus de démocratie : ainsi chacun a pu donner ou entendre une version sur l’évolution politique du pays, la crise institutionnelle qui a conduit au mouvement du 6 août 2008 et ses répercussions actuelles, et sur les meilleurs solutions pour ancrer définitivement la démocratie dans le pays… Les participants et parfois les partis politiques ont rappelé l’intérêt stratégique de certaines valeurs nationales majeures ou demandes sociales : l’Islam et sa place centrale dans la société, la démocratie, l’unité nationale, l’éradication des séquelles de l’esclavage à travers notamment l’application effective de la loi criminalisant cette pratique, le retour et la bonne insertion des réfugiés, la prise en compte du problème des rapatriés du Sénégal, la régularisation de la situation des militaires exclus de l’armée, le règlement définitif du passif humanitaire, l’officialisation et la promotion de toutes les langues nationales, la révision des grilles de programmes des médias officiels, le partage équitable du pouvoir et des richesses nationales, la réforme de l’état civil. De nombreux orateurs ont souligné la nécessité de promouvoir la bonne gouvernance et le contrôle citoyen, de moraliser la vie publique, notamment par la lutte contre la corruption et le respect des règles de transparence.
Une forte demande de justice sociale a été exprimée à travers le rejet de l’exclusion, l’appel à l’égalité des chances et à la lutte contre la pauvreté et l’ignorance. Le statut de la femme et sa place dans la société et la vie politique a intéressé plus d’un orateur, généralement très favorables.
Les participantes ont d’ailleurs tenu à défendre et ont su faire accepter, dans une démarche collective et pacifique, l’acquis du quota de 20% réservé aux femmes pour l’accès aux postes électifs, en attendant que ce quota soit porté à 33% en 2015, conformément aux Objectifs du Millénaire pour le Développement. Le renouvellement de la classe politique ou encore la promotion de la participation des jeunes aux centres de décisions et aux postes électifs ont été évoqués. Ces différents points de vue qui ont eu des échos différenciés pour ne pas dire contrastés pour certains d’entre eux ont permis aux intervenants d’évoquer ou de revenir sur des questions jugées importantes pour souligner les avancées, les retards, les cohérences ou incohérences des politiques suivies en la matière et faire les propositions qui leur paraissent appropriées pour ancrer le pays dans la stabilité, la démocratie et le développement durable. A l’appui de ces interventions, plusieurs contributions écrites fort riches ont été généreusement soumises.
Ces différents points de vue étaient souvent soulevés en relation avec les thèmes principalement soumis au débat, à savoir : la constitution, les institutions et les élections.
I) La Constitution
Les participants ont revisité l’histoire politique du pays, mettant en évidence les principales dates de l’évolution constitutionnelle nationale.
En particulier et à l’issue d’un rappel des données de base du droit constitutionnel et parfois de ses théories les plus pointues (régime parlementaire/régime présidentiel, Etat de droit, charia et démocratie), ils ont procédé à une analyse critique et à une évaluation de la Constitution du 20 juillet 1991, à la lumière de la crise politique qu’a connu le pays ces derniers temps et qui a conduit à l’intervention des Forces Armées et de Sécurité, dans le cadre du mouvement du 6 août 2008 et dans la perspective de sortie de cette crise. A cet égard, trois points de vue se sont nettement dégagés :
un premier courant de pensée majoritaire, préconise une modification partielle de la Constitution, notamment sur trois points : l’élection du Président de la République et sa destitution, l’équilibre des pouvoirs du Président de la République et du Parlement et la définition d’un statut constitutionnel pour les Forces armées. D’autres ont préconisé le rééquilibrage du pouvoir exécutif (Président de la République et Premier Ministre), l’institution de l’obligation pour le Président de la République de nommer le Premier Ministre parmi la majorité parlementaire ainsi que la systématisation du vote de confiance sur les déclarations de politique générale du Gouvernement. Dans la même optique, quelques intervenants ont suggéré le réaménagement, la suppression ou la fusion, sous plusieurs variantes, des autres institutions constitutionnelles (Sénat, Haut conseil Islamique, Conseil constitutionnel, Cour des comptes…). Un deuxième courant récurant, considère que la Constitution actuelle qui ne diffère pas beaucoup de celles en vigueur dans d’autres pays de même tradition juridique que notre pays est en soi une bonne constitution ou est à tout le moins une constitution dont la modification ne constitue pas une urgence, surtout dans le contexte politique difficile d’aujourd’hui. Ils expliquent les problèmes institutionnels actuels plus par la pratique que par l’imperfection des dispositions de la Loi fondamentale. Entre ces deux points de vue, un troisième courant estime, au contraire, qu’il est nécessaire de procéder à l’adoption d’une constitution nouvelle pour mieux prendre en compte les spécificités sociopolitiques du pays, notamment en ce qui concerne l’unité et l’identité nationales, et le partage équitable du pouvoir politique entre les différentes ethnies. Il est difficile de dégager le sens des débats sur cette question de la réforme constitutionnelle, tant les opinions des intervenants ont été nombreuses et nuancées. A cet égard et dans une tentative de synthèse, on peut estimer que les deux premiers points de vue se détachent nettement. Mais il ne faut pas en conclure pour autant que notre corpus constitutionnel a fait l’objet d’un satisfecit absolu : même les tenants du deuxième courant admettent la nécessité d’enrichir ou de faire compléter ce corpus sur certains points, notamment en recourant à la loi organique et aux autres possibilités ouvertes par la loi ou le règlement des Assemblées. C’est dans ce cadre que sont intervenues à plusieurs reprises les propositions visant à définir les conditions d’organisation et de fonctionnement des Conseils et Comités supérieurs de la Défense nationale, de la haute trahison et des sessions extraordinaires du Parlement (les articles 34, 53, 92 et 93 de la Constitution). Pour être exhaustif, il convient de noter qu’à la faveur des débats sur la Constitution, les participants ont unanimement souligné l’importance de l’encadrement du citoyen par un enseignement civique de qualité, la rationalisation du régime des partis politiques, le renforcement du rôle du Médiateur de la République et la mise en place d’un Etat fort mais respectueux des droits et libertés.
II) Les institutions a) L’Armée
Au cours du débat sur les modifications constitutionnelles, de nombreux intervenants ont souligné l’importance des Forces Armées dans le cadre d’un Etat moderne.
Ils ont mis en relief l’importance de l’armée, sa spécificité par rapport aux autres corps de l’Etat, la noblesse de sa mission caractérisée par l’esprit du sacrifice, sa force en tant qu’institution organisée, son rôle de bouclier et de rempart contre les dangers intérieurs ou extérieurs et surtout sa neutralité par rapport aux éventuels conflits qui peuvent diviser la classe politique ou la Nation. Dans ce cadre, ils ont mis en relief le rôle joué par les Forces Armées nationales tout au long de l’histoire du pays, en particulier en cas de blocage institutionnel. Evoquant la dernière crise politique, ils ont préconisé l’octroi d’un statut constitutionnel pour les Forces Armées et de sécurité.
A cet égard, et sans contester l’importance qui s’attache aux Forces armées, ni le respect qui leur est dû, une forte opinion réclame la réforme et la modernisation de l’institution militaire pour en faire une armée nationale et républicaine consacrée à sa mission normale de défense de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale, mais elle souligne en même temps la nécessité de laisser cette institution en dehors du champs politique et à l’abri des conflits politiques. Au-delà de cette différence d’approche, les tenants de ces deux points de vue se rencontrent sans doute sur la nécessité d’adopter les instruments juridiques nécessaires à la bonne application des normes constitutionnelles régissant la défense nationale et d’assurer ainsi une meilleure visibilité de l’institution militaire au sein de l’Etat et la clarification de ses rapports avec le pouvoir politique en démocratie. De même la modernisation de l’armée et le renforcement de ses capacités ainsi que l’instauration du service militaire obligatoire ont fait l’objet d’un consensus.
b) Les partis politiques
Plusieurs intervenants ont déploré le caractère pléthorique des partis politiques et ont demandé la mise en oeuvre des mesures incitatives pour leur regroupement en entités viables, à cet égard, ils ont mis en exergue la personnalisation excessive des partis politiques et le caractère presque inexistant de leur écrasante majorité qui n’arrive pas à mobiliser des électeurs, ni à définir une ligne politique déterminée et ont déploré le déficit de communication, de démocratie et de concertation au sein de ces institutions. Les participants s’accordent en général sur la nécessité de revoir et d’améliorer le régime juridique des partis politiques, de soutenir ces institutions en termes d’appui aux capacités, de mettre en place un système de financement adéquat et équitable et surtout de combattre le « nomadisme politique » qui sape la volonté de l’électeur et affaiblit les institutions : en somme, il s’agit de promouvoir l’émergence de partis politiques solidement constitués sur une base démocratique et pour la sauvegarde de l’unité nationale, qui sont à même de remplir leur mission constitutionnelle qui consiste « à la formation et à l’expression de la volonté politique ». Dans cette optique et à la lumière des solutions en vigueur en droit comparé, ils suggèrent notamment de mettre en place des mécanismes juridiques pour interdire le « nomadisme politique » en cours de mandat. Le thème de l’interdiction des candidatures indépendantes a été plus abondamment abordé. De très nombreux orateurs se sont inscrits en faux contre cette solution qu’ils accusent d’avoir affaibli les partis politiques et d’avoir été la source du blocage institutionnel constaté.
Il est vrai que d’autres, préfèrent au contraire s’en tenir au principe de la liberté politique.
c) La société civile
Déplorant la prolifération des ONG, la faiblesse voire l’absence de leur impact sur le terrain, le manque de moyens et le défaut de professionnalisme de ces acteurs non étatiques, les participants requièrent qu’une attention particulière soit apportée à ces partenaires institutionnels, notamment en termes de financements, formations et autres appuis nécessaires.
Dans ce cadre, ils soulignent la nécessité d’une gestion transparente des subventions publiques. Les participants aux Etats Généraux ont unanimement réclamé la refonte du cadre juridique organisant la société civile, la rationalisation des rapports entre l’Administration et les acteurs non étatiques, à travers notamment une plus grande reconnaissance du rôle de la société civile dans le processus du développement durable.
Les Etats Généraux préconisent un recensement des ONG et leur implication de manière effective dans le processus d’observation des élections et dans le processus de développement économique et social.
d) Les médias
Les participants aux Etats Généraux ont montré leur attachement au professionnalisme en matière de presse, qui doit être le critère de référence en matière de nomination des directeurs d’organes de la presse publique.
Ils insistent sur la nécessité d’une protection et d’une formation appropriées des personnels, et sur l’importance d’une aide adéquate à la presse privée.
Ils regrettent le fait que les nombreuses recommandations formulées à l’issue des séminaires et ateliers précédents sur la presse n’ont pas connu un début d’exécution. En ce qui concerne le régime juridique actuel, ils déplorent le caractère très répressif de la loi sur la presse qui doit être modifiée.
Ils recommandent l’adoption d’une loi sur la liberté audiovisuelle et d’une loi sur la presse électronique et souhaitent que la HAPA puisse être en mesure d’exercer l’ensemble de ses attributions, en particulier celles qui relèvent de la régulation du secteur de la presse. Enfin, les participants demandent le libre accès de la presse aux sources de l’information, l’ouverture des médias publics au pluralisme. Ils aspirent en général à un égal traitement entre presse publique et presse privée, et à l’implication des organes de presse dans le processus d’observation électorale.
Ils appellent à la promotion de l’entreprise de presse, à l’avènement d’une publication décentralisée des organes de presse et à la diminution des frais d’impression des journaux.
e) Les maires et autres acteurs locaux
En ce qui concerne la décentralisation, les participants aux Etats Généraux recommandent la mise en place de programmes de développement au niveau local, la décentralisation effective à travers le transfert réel des compétences surtout en termes de gestion, de moyens et d’attributions domaniales. Ils souhaitent la création d’un département ministériel chargé de la décentralisation et du développement local, une diminution du poids de la tutelle en même temps qu’une association des maires à la prise de décisions par l’Etat, l’étude et la mise en oeuvre d’un nouveau découpage électoral plus juste, la formation des maires en matière de gestion et d’élaboration des budgets ainsi que le renforcement des compétences du maire en matière d’état civil, surtout en milieu rural.
Ils demandent en particulier la révision du statut particulier des communes de Nouakchott pour garantir l’autonomie administrative et financière de chaque commune. En ce qui concerne le régime électoral communal, les participants préconisent le retour au régime majoritaire et le retour au système de l’élection automatique de la tête de liste majoritaire au poste de maire.
Ils suggèrent de donner plus de poids aux maires dans le système de parrainage des candidats à l’élection présidentielle. Ils demandent qu’une solution soit apportée au cas des populations dites « non communalisées ». Les participants préconisent une répartition équitable du Fonds régional de développement entre les différentes communes et l’augmentation du nombre des maires au sein du Conseil économique et social.
III) Les élections
a) Organisation des élections Les participants aux Etats Généraux demandent, au bénéfice des expériences passées, de prendre, dès le départ, toutes les précautions pour établir une liste électorale à la fois exhaustive et fiable. Par ailleurs, les participants aux Etats Généraux recommandent que les dispositions appropriées soient prises pour garantir à nos compatriotes, établis à l’étranger, la possibilité de participer aux futures élections présidentielles : il estiment qu’il s’agit là d’un droit élémentaire pour les intéressés et d’un devoir pour la communauté nationale à leur égard. A cette fin, ils retiennent le principe d’une révision extraordinaire de la liste électorale pour les prochaines élections. Toutefois, cette révision devra tenir compte des électeurs qui n’avaient pas été pris en compte en 2006 (réfugiés, nouvellement rapatriés, colonies résidant à l’étranger, jeunes arrivés à la majorité électorale depuis, populations des zones à forte migration saisonnière…).
Dans cette optique, ils suggèrent également de ramener l’âge de la majorité électorale à 16 ans ou 17 ans. Compte tenu des synergies entre l’état civil et l’établissement des listes électorales, les participants recommandent l’établissement des pièces d’état civil à tous ceux qui n’en disposent pas.
Dans ce cadre, la décentralisation des services de l’Etat civil et la revalorisation du statut des auxiliaires de l’état civil doivent être envisagées. Les participants se sont également penchés sur le problème de l’éligibilité: Sur ce point, trois thèses ont été développées : - la première estime que l’éligibilité doit être libre pour certaines catégories de corps (magistrats, armée…), - la seconde soutient que l’inéligibilité doit être relative pour les magistrats et les membres des forces armées et de sécurité conformément à la réglementation en vigueur, - tandis que la troisième opte pour le système de l’inéligibilité absolue pour certaines catégories de corps (magistrats, armée…)
Il faut reconnaître que cette question a été très discutée : si la thèse de l’éligibilité pure et simple n’a pas fait long feu, les tenants des deux autres thèses ont âprement confronté leurs points de vue respectifs. A cet égard, les partisans de l’inéligibilité relative des militaires en activité, invoquant l’analogie avec les magistrats et un argument de texte tiré du Code électoral, estiment qu’il ne serait pas justifié de refuser aux militaires un droit à l’éligibilité que la Constitution reconnaît à tous les citoyens et que la loi organique aménage explicitement à leur profit. Pour leur part, les partisans de la thèse de l’inéligibilité absolue estiment que dans le contexte actuel, une candidature des membres des Forces Armées et de Sécurité consacrerait le choix des régimes militaires qui se sont succédés au pouvoir depuis trois décennies et que seule l’interdiction d’une telle candidature serait de nature à emporter la conviction du citoyen au sujet de la possibilité d’organiser des élections véritablement libres et démocratiques, en dehors de toute influence de l’institution militaire. En somme sur ce point, on peut estimer que les arguments juridiques des uns s’opposent aux arguments politiques des autres… Devant cette situation, on doit constater la prépondérance des tenants de la thèse de l’inéligibilité relative et son ancrage juridique.
Par ailleurs, d’autres conditions d’éligibilité (caution, règles de parrainage plus complexes, limitation du nombre de candidatures, condition de résidence sur le sol national, âge des candidats, bonne moralité…) ont été envisagées par certains orateurs.
Dans ce cadre, l’accent a été mis sur l’absence d’antécédents judiciairement constatés en matière de corruption, mauvaise gestion et détournement de fonds publics. La campagne électorale que certains voudraient porter à trois semaines pour l’élection présidentielle devrait de préférence se dérouler pendant les vacances scolaires et en dehors de la période d’hivernage. Les dépenses de campagne devraient à être plafonnés. Les financements extérieurs doivent être proscrits ou, à tout le moins, soumis à déclaration préalable. Les participants ont insisté sur la nécessité d’une campagne apaisée et responsable, l’Administration devant veiller scrupuleusement au respect de l’ordre public en période électorale et à la protection des candidats et électeurs contre toute forme de violence.
La quiétude des heures de prière doit être préservée, et le vote doit se dérouler désormais de préférence un samedi. Le principe du bulletin unique a été confirmé mais ce bulletin doit être confectionné de manière à faciliter et à garantir le bon choix de l’électeur, notamment en renonçant au système actuel (lettre « b » arabe) qui déroute plus d’un votant et en améliorant la visibilité des logos et photos des candidats. L’organisation des bureaux de vote, leur localisation et leur répartition géographique doivent être rationalisées. Dans ce cadre, les orateurs ont souligné la nécessité de limiter le nombre des inscrits par bureau de vote à 300 pour les centres ruraux et à 600 pour les centres urbains et d’engager un vaste processus de sensibilisation des électeurs. D’une manière générale, la neutralité et l’impartialité de l’Administration doivent être strictement observées. Les moyens de l’Etat ne doivent, en aucun cas, être mis à la disposition ou utilisés au profit d’un candidat particulier. A cette fin, un code de bonne conduite électorale devra être signé par tous les candidats qui doivent accepter de participer à des débats publics contradictoires. En ce qui concerne la proclamation des résultats et le contentieux, les participants recommandent notamment de prolonger le délai de saisine et de veiller à une stricte application de la réglementation en la matière.
b) Calendrier électoral La question du calendrier électoral est largement tributaire de la question de la durée de la transition : à cet égard, des orateurs ont souligné la nécessité de laisser au HCE tout le temps nécessaire pour aplanir les difficultés et de faire une bonne transition. Dans ce cadre, certains participants ont jugé nécessaire une transition de trois ans au plus, cette période devant être mise à profit en vue de résoudre les grands problèmes que sont l’unité nationale, le passif humanitaire, l’esclavage et le retour des réfugiés...etc.
Dans la foulée, les auteurs de telles propositions en appellent quelquefois à la candidature d’une personnalité donnée à l’élection présidentielle envisagée… D’autres orateurs ont cependant préconisé une transition plus courte de six mois au plus. En ce qui concerne le processus électoral proprement dit, les participants ont en grande majorité estimé que seules des élections présidentielles étaient nécessaires, même si certains intervenants ont souhaité la tenue d’élections législatives et municipales. La date des élections a donné lieu à trois points de vues distincts : - le premier, majoritaire, préconise la tenue de ces élections au plus tard le 30 juin 2009, - le second préfère la tenue de ces élections dans un délai de 10 à 14 mois, - tandis que d’autres, faisant passer les exigences d’une bonne transition accordent, comme on l’a vu, un délai plus long.
Dans le cadre de la proposition majoritaire, les participants ont opté à titre indicatif pour un chronogramme électoral qui prévoit la tenue du premier tour de l’élection, le samedi 30 mai et le second tour, le samedi 13 juin 2009.
c) Supervision et observation du processus électoral
Les participants aux Etats Généraux recommandent fortement de tirer profit de l’expérience de la CENI, en dotant l’organe qui sera chargé de garantir la transparence et la régularité de l’opération électorale, de pouvoirs et moyens conséquents de nature à lui garantir à la fois l’indépendance et l’efficacité mais aussi et désormais la permanence. A cet effet, ils préconisent de confier à cet organe la supervision de l’ensemble des aspects de l’opération électorale, y compris la centralisation et la proclamation des résultats. Les membres de l’institution seront choisis sur la base de critères objectifs. Sur ce point, le ministère de l’Intérieur sera chargé, comme pour les dernières élections, de l’organisation proprement dite du scrutin, en concertation avec l’organe de supervision de l’élection.
Un système de collaboration entre l’organe de supervision et les services de l’administration pour le suivi des élections à l’intérieur du pays devra être aménagé. Par ailleurs, les participants ont préconisé la mise en place d’un observatoire national des élections qui serait une structure autonome et pérenne. Dans le même sens, ils optent pour un processus d’observation internationale particulièrement ouvert du scrutin envisagé. /. Je vous remercie. Nouakchott, le 5 janvier 2009 La Commission du Rapport Général
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