Après l’Algérie en 2003, la Tunisie et le Niger en 2008, puis le Mali ces deux dernières années, c’est maintenant le tour de la Mauritanie d’être le théâtre d’enlèvement de ressortissants occidentaux, organisé par Al Qaida au Maghreb Islamique (AQMI, ex-GSPC).Trois espagnols ont été kidnappés en début de soirée du 29 novembre, trés loin du champ d’action traditionnel d’AQMI, pratiquement sur la côte atlantique et au milieu d’un axe routier reliant les capitales, politique (Nouakchott) et économique (Nouadhibou) de la Mauritanie. Un coup dur pour l’image du pays et pour des secteurs comme le Tourisme.
AQMI est l’organisation ayant des antécédents en la matière et l’unique structure qui compte dans ses rangs des combattants ayant mené des actions violentes contre la Mauritanie ainsi que des spécialistes des sentiers désertiques pouvant y mener à partir de ses camps et vice-versa. (Lire notre article: (http://www.journaltahalil.com/detail.php?id=2079&categ=19 ) La signature de l’enlèvement porte lui aussi la marque d’AQMI, avec le choix des cibles, le profil des ravisseurs et le désinterêt pour la voiture et les effets des disparus. La revendication interviendra comme d’habitude entre 2 jours sinon deux mois pour ce genre d’opérations menées généralement par des sous-traitants, des professionnels ou des amateurs. Contrairement aux sous-traitants qui travaillent pour l’argent, tels des livreurs de pizzas, les professionnels sont des doctrinaires affiliés aux "Katibas" (brigades) d’AQMI qui écument au Sahara-Sahel : "El Moulethemine", "Taregh ibn Ziyad", "El Vourghane" et "Al Ansar".
Les amateurs, eux, sont des «auto-radicalisés» ou des «loups solitaires». Ce sont des sympathisants inspirés par leur vécu et les idées reçues, plutot illuminés, non structurés et agissant par mimêtisme ou voulant (se) prouver quelque chose.
Ils commettent des erreurs fatales quand ils passent à l’action et se limitent souvent à exécuter leurs victimes, filmer de telles horreurs et revenir à leur mode de vie antérieur.
Le rapt du 29 novembre constitue le premier enlèvement réussi d’occidentaux en Mauritanie. Par le passé, des tentatives similaires avaient échoué. Elles ont visé un diplomate allemand (avril 2008) et des ressortissants français (juin 2009). Bien avant le gouvernement mauritanien, le ministre espagnol de l’Intérieur, Alfredo Perez Rubalcaba, n’est pas allé par quatre chemins.
Il a indiqué -lundi 30 novembre- craindre qu’AQMI ne soit derrière l’enlèvement en Mauritanie des humanitaires espagnols. "… Tout semble indiquer qu’il s’agit d’un enlèvement. Si c’est le cas, comme je le crains, tout indique qu’il s’agirait d’un enlèvement d’AQMI", a-t-il déclaré. M. Rubalcaba sait de quoi il parle ! Il était, fin juillet 2009 au Mali, où il avait annoncé que l’Espagne allait dépêcher dans ce pays -dont le Nord constitue la base arrière d’AQMI- des membres du Centre espagnol de coordination antiterroriste, une structure créée au lendemain des sanglants attentats du 11 mars 2004 à Madrid.
L’Espagne et le Mali ont signé en 2008 un accord de coopération en matière de lutte contre le terrorisme, qui prévoit en outre la formation de la police malienne, la livraison de matériel et l’échange d’information.
Est-ce pour cela, que des espagnols ont été visés en Mauritanie ? L’armée mauritanienne de son coté, a affirmé le 30 novembre avoir "bouclé tous les passages connus dans le désert" sur son territoire.
"L’étau se resserre, les ravisseurs ne pourront pas s’échapper. Nous sommes aux aguets, nous sommes prêts", a assuré une «source militaire» citée par une agence de presse occidentale.
Cette source militaire pas indiqué la nature des mesures qui pourraient être entreprises contre des ravisseurs dont la principale arme est désormais le «bouclier humain» que sont les otages pour la délivrance desquels, AQMI exigera -au cas où l’opération est menée par des professionnels- une forte rançon ainsi que la libération de détenus salafistes en Espagne et en Mauritanie. Cet enlévement aura prouvé que la lutte contre le terrorisme est un combat difficile qui ne peut être mené par un seul pays.
Il est intervenu quatre jours après celui d’un ressortissant français, Pierre Camatte 61 ans, kidnappé le 25 novembre à Ménaka dans le nord-est du Mali. Des medias occidentaux ont rapporté que cet otage français serait détenu par «l’aile dure» d’AQMI, guidée par l’Algérien Abdel Hamid Abou Zeid.
Des sources plus informées estiment que cette «aile dure» est plutôt dirigée depuis juin 2009, par un autre algérien dénommé: Yahya Abou El Hamam, «Emir» groupe salafiste armé, baptisé : «El Vourghane».
Et c’est ce groupe armé justement qui est au centre de toutes les actions attribuées à AQMI ces derniers mois, notamment la liquidation le 10 juin 2009 d’un colonel malien à Tombouctou, les accrochages de Tessalit (17 juin) et d’Arouane (4 juillet) au Mali, le meurtre d’un ressortissant américain à Nouakchott (23 juin) et l’envoi de plusieurs éclaireurs et de deux kamikaze en Mauritanie (juillet-aout). C’est également «El Vourghane» qui a tenté au milieu de novembre 2009 de kidnapper -sans y parvenir- un ressortissant américain dans un hôtel de Tahoua, au Niger.
C’est vraisemblablement «El Vourghane» qui est encore derrière l’enlèvement des espagnols chez nous et du ressortissant francais au Mali.
Une phase pénible s’annonce, laquelle, pourra être marquée par un vocabulaire contenant des mots comme: "revendication", "négociation", "rançon", et "libération". Bref, tous les mots autre que "éxécution", on l’éspere.
IOM
|