Burkina: Zida Premier ministre, les civils inquiets   
19/11/2014

La transition civile Ă  peine entamĂ©e au Burkina Faso, le lieutenant-colonel Isaac Zida, qui avait pris le pouvoir fin octobre Ă  la chute de Blaise CompaorĂ©, a Ă©tĂ© nommĂ© mercredi  19 novembre  Premier ministre, signe que l’armĂ©e va conserver...



...toute son influence dans le jeu politique.
Ce maintien de l’armĂ©e au coeur du pouvoir a suscitĂ© une relative inquiĂ©tude de la sociĂ©tĂ© civile et un mĂ©contentement parmi la plupart des habiatnts de Ouagadougou, interrogĂ©s par l’AFP. 
Le président de la transition Michel Kafando "décide que (...) M. Yacouba Isaac Zida est nommé Premier ministre", selon un décret officiel lu à la presse. Michel Kafando, dans un entretien à Radio France internationale (RFI) avait laissé entendre qu’il était prêt à ce que l’officier, inconnu il y a encore trois semaines, "puisse jouer un rôle essentiel dans la stabilisation" du pays, insistant sur "la place" nécessaire de l’armée dans la transition, au vu du rôle qu’elle a joué ces dernières semaines.
   La dĂ©signation d’un militaire comme chef du nouveau gouvernement semble cependant contraire aux voeux affichĂ©s de la communautĂ© internationale, qui souhaitait une transition strictement civile après la chute du prĂ©sident Blaise CompaorĂ©, chassĂ© par la rue le 31 octobre après 27 ans de règne.
   Isaac Zida, numĂ©ro 2 de la garde prĂ©sidentielle, avait alors soufflĂ© le pouvoir au chef d’état-major des armĂ©es, qui s’était pourtant officiellement dĂ©clarĂ©. "Il a fait un vrai coup d’Etat", remarquait un diplomate.
   Au terme d’intenses nĂ©gociations impliquant l’armĂ©e, les partis politiques et la sociĂ©tĂ© civile, une charte de transition avait Ă©tĂ© adoptĂ©e en fin de semaine et un nouveau prĂ©sident intĂ©rimaire dĂ©signĂ©, Michel Kafando, chargĂ© d’organiser des Ă©lections gĂ©nĂ©rales d’ici novembre 2015.
   La dĂ©signation de Kafando, un diplomate expĂ©rimentĂ© au profil de technocrate -soutenu par l’armĂ©e- avait Ă©tĂ© saluĂ©e par la majoritĂ© des Burkinabè.
   
    One man show
Celle du colonel Zida est en revanche diversement commentée.
"Il n’y a pas de problème que Zida soit à la Primature" sachant que la constitution intérimaire "n’interdit pas que le Premier ministre soit un militaire ou un civil", a commenté Ablassé Ouédrago, l’un des chefs de l’opposition.
   "Nous sommes inquiets, mais pas plus que ça", a dĂ©clarĂ© Ă  l’AFP Me Guy HervĂ© Kam, porte-parole du Balai citoyen, un mouvement dont les capacitĂ©s de mobilisation de la jeunesse ont comptĂ© dans la chute de CompaorĂ©.
   Sams’K le Jah, chanteur et co-fondateur du Balai citoyen, dit attendre ses actes pour juger Zida, et relève que, au pouvoir, des civils sont parfois "pires que des militaires".
    "Il va falloir voir dans quelle mesure cette nomination est de nature Ă  changer l’orientation de la transition", a commentĂ© Siaka Coulibaly, politologue et membre de la sociĂ©tĂ© civile.
   Mais pour Moussa YabrĂ©, hĂ´telier de 29 ans Ă  l’air triste, "la rĂ©volution vient d’échouer".
   L’armĂ©e "veut nous voler notre lutte", peste Assane Ilboudo, Ă©tudiant de 25 ans.
   MĂŞme Ă©cho chez Hama OuĂ©draogo, un fonctionnaire de 28 ans, qui dĂ©nonce "une confiscation du pouvoir qui ne dit pas son nom" par le lieutenant-colonel qui semble faire un "one man show".
   Mais VĂ©ronique Kando, une commerçante de 36 ans, se rĂ©jouit: "Je le pressentais Ă  ce poste. Il va continuer les balayages (limogeages)".
   Car dans les faits, le nouveau Premier ministre avait dĂ©jĂ  pris la main dans des domaines publics importants. Les patrons de la SociĂ©tĂ© nationale burkinabè des hydrocarbures (Sonabhy) et d’électricitĂ© (Sonabel), proches du clan CompaorĂ©, ont en effet Ă©tĂ© limogĂ©s "pour sabotage".
   Ces mesures s’ajoutent Ă  la suspension des conseils municipaux et rĂ©gionaux, dans lesquels les pro-CompaorĂ© Ă©taient fortement majoritaires.
   Mais le Burkina Faso reste un pays pauvre, aux faibles ressources, qui ne peut se passer de l’aide extĂ©rieure. La rĂ©action de la communautĂ© internationale -qui avait fortement contribuĂ© Ă  un rapide retour Ă  la transition civile- Ă  la nomination de Zida, sera donc dĂ©terminante.
   La formation du nouveau gouvernement est prĂ©vue pour jeudi. La place qui occuperont les militaires -Zida va-t-il notamment y cumuler les fonctions de ministre de la DĂ©fense comme le faisait CompaorĂ©?- devrait dessiner les contours de cette transition civile mais dĂ©jĂ  fortement prĂ©emptĂ©e par l’armĂ©e.



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