Le nouveau fleuve de Tintane   
17/09/2007

Ceux qui doutent que l’eau est la force la plus phĂ©nomĂ©nale de la nature peuvent faire un tour Ă  Tintane. LĂ  bas, ils auront la preuve des ravages qu’elle peut causer.
Totalement submergĂ©e, la dĂ©pression qui sĂ©parait le cotĂ© Nord et Sud de Tintane et qui abritait le poumon de cette ville a complètement disparu sous les eaux et avec elle, une bretelle d’un kilomètre du goudron qui reliait Tintane Ă  Aioun, le chef lieu de la Wilaya du Hodh El Gharbi.



Dans la soirĂ©e du 7 aoĂ»t 2007 et après un cumul de pluies de 200 mm (Ă  Tintane et ses environs), des eaux ruisselantes des montagnes surplombant le flanc Sud de Tintane : (Benmoura, Tounkara et Lemdhayegue) renforcĂ©es par les torrents venus du bassin versant d’El Aguer ont envahi le centre de la ville Ă  partir des quartiers Tweimirett, El Angar, Zoueiratte, El Beytara, Darak, Zgeylmaya jusqu’aux pieds des montagnes de Demberi, situĂ©es Ă  l’extrĂ©mitĂ© Nord-Est de Tintane.
Sur 17 quartiers du centre ville, douze ont été inondés.

Toute la soirĂ©e les populations ont accouru vers le flanc Sud de la ville situĂ© sur une Ă©lĂ©vation. Deux personnes sont mortes et plus de 3000 familles pour la plupart Ă  revenu modeste ont tout perdu. Certaines de ces familles Ă©taient des parias avant les inondations. Elles sont devenues des misĂ©rables juste après. D’autres familles Ă©taient nanties ; elles sont devenues pauvres. L’inondation du centre ville a en effet touchĂ© le marchĂ© de Tintane, une grouillante plateforme d’échange dans la rĂ©gion et avec le Mali, crĂ©ant une nouvelle catĂ©gorie de sinistrĂ©s : celle des riches commerçants de Tintane dont les commerces dĂ©vastĂ©s en partie, ont subi des dĂ©gâts Ă©valuĂ©s Ă  quelques centaines de millions d’ouguiyas.
Des maisons, des hangars, des commerces, des Ă©coles, le central tĂ©lĂ©phonique, le commissariat de police, la brigade de gendarmerie et le tribunal croulent ou baignent sous une immense mare d’eau : le nouveau fleuve de Tintane dont la longueur avoisinerait les 10 kilomètres.
Plus d’un mois après les inondations, un constat s’impose : la bĂ©nĂ©diction ou la colère du ciel (c’est selon) a tout balayĂ© sur son passage, et l’Etat mauritanien tout comme la solidaritĂ© internationale peinent Ă  affronter les consĂ©quences.
RegroupĂ©s dans quelques camps de fortune Ă  Bouniya, et Taiba notamment, les victimes des inondations rĂŞvent de reconstruire leurs vies dans les carcans d’une nouvelle condition oĂą le confort du bĂ©ton, du banco et mĂŞme des hangars a cĂ©dĂ© place Ă  la simplicitĂ© des tentes. Sous ces tentes les sinistrĂ©s reçoivent leurs rations alimentaires dans la cacophonie du travail des commissions municipales chargĂ©es de leur recensement. Un travail dĂ©licat tant les familles mais aussi les recenseurs tombent sciemment ou pas, dans le dĂ©doublement fonctionnel des sinistrĂ©s. La tache est dĂ©jĂ  difficile dans la distribution des vivres mais elle le sera davantage quand il s’agira d’attribuer les parcelles assainies. En attendant, les sinistrĂ©s s’accommodent de leur nouvelle vie. Ils s’abreuvent en eau avec des citernes en caoutchouc et se soulagent dans des latrines publiques : c’est la vie des camps de rĂ©fugiĂ©s Ă  laquelle les nomades et les sĂ©dentaires des grands espaces, ne sont guère habituĂ©s. Mais ils font avec comme on dit, et suivent attentivement les travaux engagĂ©s par l’Administration pour viabiliser les dunes situĂ©es sur le cotĂ© Sud de Tintane pour les reloger. Si le sinistrĂ© lambda n’attend que sa future parcelle assainie de 20 mètres sur 20 pour redĂ©marrer dans la vie espĂ©rant-il faut le dire- un dĂ©dommagement pour les pertes subies , il y en a d’autres qui ne veulent pas du tout ĂŞtre relogĂ©s sur le nouveau site choisi par l’Administration. Il s’agit d’une catĂ©gorie formĂ©e essentiellement de commerçants et de propriĂ©taires fonciers qui souhaite et se bat pour que les eaux du nouveau fleuve de Tintane soient Ă©vacuĂ©es ailleurs pour accĂ©lĂ©rer ainsi le dessĂ©chement de l’oued oĂą ils habitaient et travaillaient, afin qu’ils puissent s’y rĂ©tablir .Comme si de rien n’était.
IOM


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