Au tout début du IXeme siècle de l’hégire (XV eme siècle de l’ère chrétienne) , c’est-à -dire à l’époque du déclin du puissant Etat des Sanhadja du désert, il semble que l’avant-garde des envahisseurs Hassanes venus du Nord était composée, essentiellement, d’une multitude de fractions de la tribu des Oulad Nasser. De cette puissante tribu qui avait, suite à une sainte alliance avec l’ancêtre des Kenta, ouvert les hostilités contre l’Etat des Abdoukel, seules quelques branches restèrent, à la fin de la guerre, dans le pays. La majorité des Oulad Nasser avait fait le chemin du retour vers le Nord.
Il convient, d’ailleurs, de souligner que jusqu’à nos jours les principales fractions de cette tribu résident dans le Oued Noun (Sud marocain). Il s’agit, notamment, de Oulad Amar, Oulad Ely, Lekrarma , Oulad Massoud, Oulad Mhamed . Des branches issues de ces fractions forment, pour l’essentiel, les effectifs des actuels Oulad Nasser qui se trouvent à l’Est de l’actuelle Mauritanie. D’autres fractions comme les Oulad Chikh, Oulad Abass, Oulad Sghir, Oulad Taleb, Oulad Emrine , Oulad Anawal , originaires de la même tribu vivent encore au Nord (Maroc). Il est curieux, d’ailleurs, que la catégorisation, toujours actuelle, de ces fractions soit strictement identique à celle qui a été avancée dans le livre intitulé la «Haswa al bissanya » par l’illustre historien et généalogiste Salah Ben Abdel Wahab A Nassiry (m. 1271 de l’hégire-1854 ap.JC.) Pour revenir à la guerre larvée que les Oulad Nasser avaient livré à l’Etat Abdoukel, il importe de préciser qu’elle eut pour conséquence immédiate l’affaiblissement du pouvoir de cette puissante confédération lemtounienne. En effet, cette guerre intervint dans un contexte où l’Emirat Abdoukel était miné par des graves conflits internes qui l’avaient exposé aux agressions des autres groupements Sanhadja et, en particulier, à celle de la confédération tribale Anieurzig. Cette confédération appartenant à l’ensemble Sanhadja avait, parallèlement à celle des Abdoukel, fondé un grand Emirat à l’Ouest ainsi qu’au Sud Ouest de l’actuel territoire mauritanien. Des sources portugaises citent, également, Izar Zigui dans les environs de Ouadane. Il semble que la confédération Anieurzig s’était constituée à partir d’une alliance entre des puissants groupements au sein des An Gadés. Les An Gadès : il s’agissait d’un rassemblement de neuf tribus dont chacune possède un chef et un tamtam. Ces tribus sont : Id Weider, Ahl Ahmed Id Inan, Idow Zaghar, (Ou lad Ishak ) , Idegh Chanje (Id Wechilli) , Id Deyndek, Id ouedher ( Id o Ich), Id Deindkan, Dikartan, Dylan. A l’intérieur de l’ensemble An Gadès, il y’avait également des tribus Zawiyas (maraboutiques) qui sont : Ahl Youssef, Ahl Ifarraj Allah, Ahl Bettar, Ahl Moctar Ghali. La confédération de Anieurzig comprenait également d’autres groupement tribaux comme les Taghredjent : Id deyday, Lekhbabcha, Id Dagh Maham, Oulad Baye Id Kbadja : Ahl Agda Ahmed, Ital, Id ow Bidja, Id Niabik, Iffoullan Id Eghabanou, qui étaient particulièrement féroces et qui comprenaient dans leurs rangs, les tribus Ghaiywatt, Baran et Harran. Il convient de souligner que les groupements guerriers qui constituaient la force de l’Emirat de Anieurzig allaient progressivement se séparer les uns des autres à la suite de l’effondrement de cette entité fédérale des Sanhadja qui fut provoqué par les attaques destructrices des Hassanes Oulad Rizg vers la fin du IX eme siècle de l’hégire (XV eme siècle ). Il faut, à ce stade, garder à l’esprit que la cause immédiate , au sens des historiens, de la guerre entre les Sanhadja et les Hassanes fut le conflit qui avait opposé l’ancêtre des Kenta à l’Emirat Abdoukel . Mais il y’avait, bien entendu, les causes lointaines de cette guerre qui devait changer profondément le cours de l’Histoire moderne du territoire des hommes voilés. Outre le facteur économique lié au déclin du commerce caravanier lequel passait par «la route nationale» des Abdoukel, il y’avait également ces conflits fratricides qui opposaient les Sanhadja entre eux. En effet, frustrés et, durement, affectés par la répression ainsi que par la cruauté du pouvoir tyrannique des Abdoulkel, d’autres groupements Sanhadja, en particulier, ceux issus de la confédération Anieurzig multiplièrent les révoltes et les pillages aux confins de l’Emirat et contre les principaux centres d’intérêts de celui ci C’est dans ce contexte troublé, qu’une alliance entre les tribus Hassanes et les Oulad Rizg est intervenue pour faire de la guerre «la solution finale» à la terrible et longue domination des redoutables Abdoukel. (A suivre) Hama hou Allah Ould Salem Professeur d’Histoire à l’Université de Nouakchott Lauréat du Prix Chinguitti 2006.
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