Que cherche Aqmi avec son communiquĂ© du 12 janvier? (Analyse)   
14/01/2012

Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) a fait diffuser le 12 janvier un communiquĂ© sous le titre: "Avertissement urgent", dans lequel, elle dit avoir appris de ses «sources fiables», l’imminence d’une "opĂ©ration internationale" menĂ©e par le "front des croisĂ©s" en vue de libĂ©rer les otages qu’elle dĂ©tient, 6 français...



...un suédois, un néerlandais et un anglais .

Aqmi a menacĂ© de les tuer si une telle opĂ©ration est lancĂ©e et appelĂ© Ă  une solution «pacifique et juste», demandant aux familles de faire pression sur leurs gouvernements afin qu’ils retirent leur soutien Ă  cette opĂ©ration ; et Ă  la presse, de braquer ses projecteurs sur cette «aventure politique» menĂ©e des gouvernements qui «font peu de cas du sang de leurs ressortissants».

Les «sources» d’Aqmi gĂ©nĂ©ralement bien informĂ©es sont d’une relative efficacitĂ©, laquelle a deja permis Ă  cette organisation de liquider des agents spĂ©ciaux lancĂ©s Ă  ses trousses et recemment, de cueillir des otages dans des chambres d’hĂ´tel.

Elles ont vraisemblablement senti des prĂ©paratifs sur le terrain accrĂ©ditant l’éventualitĂ© d’une opĂ©ration semblable Ă  celles menĂ©es pour libĂ©rer Germaneau et les jeunes enlevĂ©s en janvier 2011 Ă  Niamey.
L’objectif du communiquĂ© serait donc de retarder, sinon d’empĂŞcher une telle opĂ©ration, en Ă©bruitant ses prĂ©paratifs.
Il s’agit de dire Ă  ses organisateurs -qui ne sont pas forcĂ©ment français-, qu’ils ne peuvent plus compter sur l’effet surprise.

Et que l’organisation Ă  donc le temps de compter sur son extrĂŞme mobilitĂ© et sur sa stratĂ©gie de dissĂ©mination des otages sur de vastes zones : Boukahil (AlgĂ©rie), TĂ©nĂ©rĂ© (Niger) et Tigharghar (Mali).

Ce qui fera, qu’il deviendra dĂ©s lors nĂ©cessaire de mener plusieurs opĂ©rations concomitantes et non pas, une seule.
Et en insistant sur la menace qui pèse sur la vie des otages (plus que sur le risque de perdre l’argent et l’intĂ©rĂŞt qu’ils reprĂ©sentent)  et en faisant appel aux familles et aux medias, Aqmi exerce un chantage maintes fois utilisĂ©.

La mort Ă©ventuelle des otages ne serait donc pas imputable aux ravisseurs, mais aux gouvernements prĂ©sentĂ©s comme insensibles aux revendications et Ă  leurs otages,  ou en quĂŞte d’actions d’éclats, pouvant leur donner des coups de pouce en matière de politique intĂ©rieure.
Bien que l’option militaire pour libĂ©rer les otages ait dĂ©montrĂ© ses limites depuis 2003, elle semble ,pour plusieurs raisons, ĂŞtre sĂ©rieusement envisagĂ©e sur le terrain.
D’abord, parce que les "moyens pacifiques" (paiement de rançons et libération de jihadistes) permettent, c’est vrai, de libérer des otagesen captivité , mais ne prémunissent pas, de nouvelles prises d’otages.
Ensuite, Ă  cause du plafond fixĂ© dans les revendications d’Aqmi : Evacuation de l’Afghanistan, negociation avec AlQaida centrale, libĂ©ration de jihadistes dĂ©tenus en France, en Mauritanie, au Mali et en AlgĂ©rie,  paiement de fortes rançons.

Enfin, pour des raisons politiques propres aux pays concernés par les otages et les conditions exigées pour leur libération, lesquels n’en peuvent plus de fermer des dossiers d’otages, pour en ouvrir de nouveaux.

Toutes ces considĂ©rations font qu’il y a prĂ©sentement un grand bocage dans les nĂ©gociations.

«Sarkozy et ATT sont sur le point de partir, les otages ne les intĂ©ressent vraiment plus» nous a dit une source en relation avec le dossier, chez lequel l’honnĂŞtetĂ© n’est pas –hĂ©las- une qualitĂ© première.

L’affaire Chafi nous en a donnĂ© une preuve supplĂ©mentaire. Mais ça c’est une aute histoire.

La rupture du fil de la mĂ©diation entamĂ©e par des notables et sĂ©curitaires maliens, suivie par une efficace Ă©quipe BurkinabĂ© et relancĂ©e par un ex-officier français travaillant pour le compte d’Areva ,qui a eu des dĂ©boires avec les Maliens qui ne voulaient pas ĂŞtre doublĂ©s, fait penser que la confrontation est de plus en plus privilĂ©giĂ©e Ă  la nĂ©gociation.
Sur le terrain, les observateurs notent un mouvement assez inhabituel des aĂ©ronefs des forces spĂ©ciales françaises, notamment Ă  l’aĂ©roport de Menaka (Mali).

A cela s’ajoute le dĂ©ploiement exceptionnel de l’armĂ©e malienne dans l’axe Tinzouatene- Gao-Tombouctou ainsi que la prĂ©sence de militaires algĂ©riens aperçus pour la première fois au Nord-Mali en dehors de leurs frontières probablement dans le cadre des activitĂ©s de l’état major conjoint de Tamanrasset crĂ©Ă© il y a deux ans pour lutter contre Aqmi et qui n’a menĂ© depuis lors aucune opĂ©ration.
Mais au delà de l’intention prêtée au «front des croisés» ou aux militaires à Tamanrasset, de faire pression sur les ravisseurs ou de libérer les otages par la force, il convient de se demander si une telle option préservera leur vie ou si au contraire, elle les sacrifiera.
Isselmou Ould Moustapha


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Commentaires
A-

2012-01-17 15:28:25

Merci IOM pour cet excellent resumé et donne l’envie de lire ce communiqué. J’ai trouvé hier soir une copie du communiqué sur un site (lien ci-dessous et en arabe). http://azelin.files.wordpress.com/2012/01/al-qc481_idah-in-the-islamic-maghrib-22urgent-warning-to-the-countries-of-the-european-prisoners-of-the-organization-aqim22.pdf

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