Au cours du premier millénaire qui a précédé l’ère chrétienne, les berbères ont, totalement, envahi le territoire de l’actuelle Mauritanie.. Les gravures rupestres attestant leur présence depuis cette époque se sont superposées à celles de leurs prédécesseurs. Il semble que, par rapport aux populations villageoises du proche néolithique, ces générations de berbères s’adaptaient mieux à la sécheresse engendrée par les nouvelles conditions climatiques. Les gisements de Fer et du cuivre ont, par ailleurs, largement, contribué à l’adaptation des nouveaux arrivants qui ont vécu dans les villages, progressivement, dépeuplés par leurs habitants..
Les berbères ont, sans doute, favorisé ce dépeuplement dans la mesure où leur arrivée a, profondément bouleversé les équilibres culturel et démographique et a provoqué, sous la contrainte, un exode des populations villageoises précitées. Néanmoins, il convient de souligner que la preuve de cette contrainte n’a, jamais, été apportée. A ce sujet, une discussion approfondie (colloque de Dakar 1976) a porté sur la véritable identité des populations appartenant à la race éthiopienne dont la présence au grand Sahara a été évoquée par Hérodote. On sait juste que pour désigner les habitants de cet espace, l’historien grec avait employé l’expression ’’les gens aux visages brûlés’’. Mais la portée réelle de cette expression n’a pas été, jusqu’à présent, éclaircie. Toujours est-il que dans la seconde moitié du deuxième millénaire avant JC, des chars à deux roues (parfois à quatre) tirés, généralement, par des chevaux et rarement par des bœufs, ont envahi le Sahara. L’introduction de ce type de chars soulève une difficulté bien précise qui, depuis longtemps, suscite un débat de spécialistes. En fait, tout ce qu’on sait, à propos de la présence de ces fameux chars, se limite à leur illustration par les dessins gravés sur des roches. Une étude portant sur L’emplacement de ces gravures estime qu’elles se trouvent éparpillées, à travers le Grand Sahara, dans 800 localités Mais à l’exception de l’environnement rocheux dans lequel ces chars ont été immortalisés, aucune autre indication, dans l’espace concerné, ne permet d’aborder, avec exactitude, ce sujet. .Pourtant l’origine de ces chars est, on ne peut plus, claire. En effet, il est constamment admis que le char à deux roues attaché à deux ou quatre chevaux constitue un armement traditionnel de guerre bien connu dans les environs de l’Est de la méditerranée et dont la présence remonte à plus de trois mille ans. Le char en question a été utilisé par la plupart des peuples de cette région et particulièrement les Romains mais aussi les Libyens, les Gara mantes et les Gétules. Les auteurs grecs notamment Hérodote, Diodore et Strabon signalent que la familiarisation de ces derniers peuples avec le cheval date de la fin du deuxième millénaire avant l’ère chrétienne. Ces utiles précisions sur les chars ont été rapportées par Bowba Ould Mohammed Naffee ainsi que par d’autres auteurs spécialistes de la préhistoire de la Mauritanie. Les ancêtres des berbères enturbannés Selon R. Mauny, les libyco - berbères sont les ancêtres des Sanhadja qui étaient, depuis des temps immémoriaux, présents dans la région. Parmi ces ancêtres, le peuple des Gara mantes est, sans doute, le plus connu. Les Gara mantes sont les anciens habitants de Fezzan (actuelle Libye) qui , semble-il, furent les fondateurs d’un Etat dont l’emprise sur les routes commerciales du Sahara était notoire. Leur capitale s’appelait Germa. .Hérodote fut le premier à les avoir cité, dans le livre IV en ces termes assez descriptifs : «c’est là où vivent des gens nombreux qui s’appellent les Gara mantes, qui possèdent des bœufs et qui se déplacent dans des chars aux quatre chevaux».. Il importe de souligner qu’une divergence de perception se dégage des descriptions relatives à la couleur des Gara mantes. Mais cette divergence ne concerne, visiblement, que le degré de leur noirceur. Les Gara mantes se disaient, eux même, plutôt foncés voire foncièrement noirs tandis que les Grecs les trouvaient justes un peu foncés.. Il est, en tout cas, certain qu’ils furent le seul peuple qui avait la possibilité de traverser le désert vers le sud. Il semble que les motifs de cette traversée tenaient, principalement, aux échanges commerciaux ou à la chasse aux animaux tels que les éléphants, les autruches etc. A ces Gara mantes, ancêtres de la majorité des Haratines de l’actuelle Mauritanie, certains historiens rattachent, également, les Touaregs dont la parenté avec les Sanhadja sera, ultérieurement, évoquée.. A présent, il faudrait garder à l’esprit, qu’il y’a eu dans l’évolution de ce peuple libyco-berbère, une période cruciale au cours de laquelle le Cheval s’est séparé du char pour devenir la monture qui permet l’invasion du Sahara. Cette invasion qui s’est transformée en habitude s’est renforcée, au début de l’ère chrétienne, avec l’arrivée du Chameau. Il est permis d’affirmer que la présence au Sahara des ces premiers berbères qui, au cours de leur mouvement vers le sud, introduisirent les chars au Sahara, date de trois mille ans pour la simple raison qu’avant cette date, les chevaux étaient inexistants dans cette région laquelle a été, par la suite, affectée par la sécheresse insupportable pour le cheval. Les ’’charretiers’’ ont investi un territoire habité par des populations qui pratiquaient l’élevage des vaches et qui ont, par la suite, été contraintes, par la mutation du climat, de se déplacer vers les confins du Sahara. Ainsi, les nouveaux arrivants sont devenus les maîtres des lieux et ont fourni, pour la postérité, la preuve irréfutable de leur présence en gravant leurs chars sur les façades intérieures des grottes ainsi que sur les roches. En outre, cette période a connu l’apparition d’un élément nouveau qui est celui de l’écriture dite ’’Tifnagh’. Mais on ne sait rien du lien entre cette nouveauté culturelle et les gravures qui ont été léguées par les premiers berbères pour lesquels, les chars étaient un symbole de prestige. Il est bien probable qu’en raison de leur technicité rudimentaire inadaptée aux zones difficiles à traverser, ces chars n’ont pas pu jouer un rôle important dans le commerce. Malgré une forte animosité entre les Romains et les Gara mantes, les deux parties ont tissé une curieuse alliance qui a été, à l’origine, de deux importantes campagnes dirigées par les Romains, à travers, Fezzan en direction des territoires du sud. Ces deux campagnes ont été menées sous le règne de Trajan (100 avant JC). La première campagne a pénétré dans les territoires du Soudan tandis que la seconde a atteint Agisimba dans les terres de l’Ethiopie. Il se peut que l’apparition du chameau aie été la cause directe du subite rapprochement entre les Gara mantes et les Romains. L’introduction au Sahara de cette nouvelle arme de dissuasion aurait sonné le glas de la sécurité que le désert en tant que refuge impénétrable offrait aux Gara mantes. Il auraient, donc, eu avec cette apparition révolutionnaire, dont l’effet est similaire à celui qui a été produit par le nucléaire sur la psychologie nipponne, besoin de l’appui de Rome pour faire face à ce redoutable défi. (A suivre)
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