Courrier: C’est flagrant, c’est révoltant!   
22/12/2010

Tôt, en cette matinée du lundi 20 décembre 2010, l’information tombe comme un couperet : Biram Ould Dah Ould Abeidy et ses compagnons, tous militants des droits de l’homme, ont été mis sous mandat de dépôt et écroués à la prison civile de Nouakchott suite à leur découverte...



...d’un cas d’esclavage avéré.
Ainsi se joue le second acte - qui ne sera certainement pas le dernier – de la rocambolesque affaire d’esclavage de mineures dans la Moughataa de Arafatt.

En agissant de la sorte, les autorités mauritaniennes délivrent à l’opinion publique nationale et particulièrement aux Harratines, un message d’une clarté sans équivoques : l’état mauritanien fait entrave à l’application de la loi incriminant l’esclavage et protège les esclavagistes.
D’ailleurs, comment pourrait-il en être autrement quand les auteurs de flagrants délits d’esclavage sont relâchés alors que ceux qui ont osé dévoiler leurs forfaits, subissent les brutalités de la police et sont écroués dans les prisons sous des prétextes fallacieux, fabriqués de toutes pièces et rappelant curieusement les procédés abjects d’une époque supposée être révolue.
Personne n’est dupe ; et tout le monde connaît bien les modes de fonctionnement de nos pseudos institutions. La police n’aurait pas mis un tel acharnement à provoquer et à agresser des citoyens venus réclamer l’application de la loi, si elle n’avait pas reçu des ordres ou se savait protégée par la haute hiérarchie.
Il est vrai aussi que, par ses diatribes, ses anathèmes et autres propos à l’emporte-pièce, le président de IRA/Mauritanie agaçait et indisposait beaucoup de mauritaniens dont je suis.
Malgré cela, ses discours n’ont jamais comporté matière susceptible de le traduire devant les juridictions de l’état. J’en veux pour preuve que les autorités n’en ont jamais usé et cela ne pourrait être que parce qu’elles étaient à court de preuves et d’arguments pour le juger. 
Une telle frustration les a conduites à échafauder ce stratagème mal conçu et mal exécuté pour essayer de régler certains comptes de manière lâche et stupide.
La diffusion des « aveux Â» des fillettes et de leurs parents dans la matinée du 20décembre sur les ondes de la radio nationale puis la même soirée à la TVM, a fini par discréditer les pouvoirs publics dont personne ne doute désormais de leurs mauvaises intentions et de leurs partis pris.

De mon humble avis, cette affaire aura des conséquences aux antipodes de ce qui a été planifié ou voulu par l’état.
D’un côté, elle a déjà contribué grandement à crédibiliser davantage et donner un sens au combat de monsieur Biram Ould Dah Ould Abeidy et ses camarades, rien que parce que le cas d’esclavage pour lequel ils ont Ã©té incriminés, est avéré et ne fait l’ombre d’aucun doute. 
D’un autre côté, elle a approfondi la faille et déchiré un peu plus le tissu social de la composante maure (Bidhanes et Harratines) du pays dont la relation est rendue turgescente par ce regain de tension inutile qui met en péril soudain une situation sociale qui se précarise de jour en jour.
Ceci est d’autant plus regrettable et préoccupant qu’il intervient à un moment où, de diverses manières, une vague de fond s’exprime en ce moment au sein des milieux maures blancs (Bidhanes) traduisant une nouvelle prise de conscience de l’urgence d’apporter un
début de solution à la sempiternelle condition de marginalisation et de misère particulières des masses Harratines.

 

Les générations actuelles n’ont pas le droit de léguer en héritage à la postérité le feu de la haine qui couve sous les cendres et qu’elles ont allumé et entretenu par leurs comportements égoïstes, hypocrites, lâches et irresponsables.
N’oublions pas qu’en cette période de recrudescence des particularismes, l’histoire nous enseigne que la multitude de passerelles et de relations humaines, tissées à travers les siècles, peuvent être annihilées et voler en éclat en quelques instants.
Les pogroms ethniques en ex-Yougolavie, au Rwanda, au Burundi et même chez nous dans les années 89-90 sont là pour nous rappeler qu’on n’est pas à l’abri de tels désagréments.
S’ajoute à cela, la menace d’AQMI qui pointe vigoureusement à l’horizon avec pour ultime objectif la fondation, à termes, d’un Emirat Taliban en Mauritanie.
Pourrait-on, dans ces conditions, continuer à jouer avec le feu et favoriser le développement des abcès de fixation des plaies béantes et des tares congénitales de la Mauritanie moderne ?
Il est temps d’accepter que l’esclavage ou ses séquelles ou ses conséquences, structurent toujours notre société.
Il est aussi temps d’accepter que l’inégalité de naissance ne peut plus continuer à être relayée, entretenue, voire renforcée par l’inégalité des chances.
Il est, en outre, plus qu’évident que l’état patrimonial, au service d’une nomenklatura militaro fasciste, a fait son temps ; vouloir l’imposer plus que de raison nous mène tout droit à la catastrophe.

Ne laissons donc plus ces problèmes à la discrétion du pouvoir – n’importe quel pouvoir - et rassemblons-nous au sein de mouvements citoyens, regroupant toutes les bonnes volontés de toutes les couches, de toutes les races, de toutes les ethnies, de toutes les couleurs politiques pour endiguer ces dérives et trouver des solutions justes et équitables aux défis qui menacent l’avenir de notre patrie.

 


COMMANDANT
Mohamed Vall Ould Handeya

 


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