Courrier: L’imposture/ par Ahmed Samba Ould ABDALLAHI   
08/06/2010

Le 03 aoĂ»t 2005, l’armĂ©e s’est emparĂ©e du pouvoir dans notre pays. Le rĂ©gime renversĂ© du prĂ©sident Maawiya  Ould Sid’Amed Taya, connu par  sa dictature et son sanglant passif humanitaire, Ă©tait fortement contestĂ© par l’opposition qui voulait sa fin par tous les moyens. Le coup d’Etat a Ă©tĂ© soutenu par la quasi-totalitĂ©....



...de la classe politique et mĂŞme par le Parti RĂ©publicain, DĂ©mocratique et Social (PRDS), la formation du dictateur dĂ©chu. Nous n’avions Ă  l’époque, comptĂ© que des soutiens en faveur de cette action militaire, pourtant anticonstitutionnelle. Le pouvoir qu’on venait de renverser Ă©tait  tellement dĂ©criĂ© qu’aucune formation politique ou de la sociĂ©tĂ© civile n’a acceptĂ© de le dĂ©fendre, exceptĂ©s quelques rares personnes sans  influence qui avaient, en lui, des intĂ©rĂŞts clientĂ©listes Ă©troits.  
          Les putschistes ont Ă©tĂ© accueillis comme des hĂ©ros, tant le dĂ©sir de changement avait alignĂ© tout le monde contre le pouvoir dĂ©guerpi. Après la confusion du coup d’Etat, la situation  commença Ă  se clarifier petit-Ă -petit. La junte fait passer un communiquĂ© dans lequel elle dit : «  ĂŞtre venue pour corriger les erreurs de l’ancien  rĂ©gime et  Ă©tablir une rĂ©elle dĂ©mocratie, après une brève transition qui n’excĂ©dera pas deux ans ». Les nouveaux dirigeants semblaient  ĂŞtre  sincères.
             Après deux Ă  trois mois d’exercice du pouvoir, voilĂ  qu’ils annoncent de nouveau, sans qu’ils ne soient contraints par la coercition d’une quelconque force politique, la diminution de la pĂ©riode de transition de 5 mois en la ramenant de 24 Ă  19 mois. Non seulement, le court dĂ©lai de la transition satisfaisait l’opposition, mais la promesse d’organiser des  Ă©lections  libres et transparentes Ă  la fin de cette transition -  Ă©lections auxquelles ne participerait aucun militaire, fut-il  des principaux instigateurs du coup d’Etat - l’exaltait euphoriquement. Personne ne pouvait rien dire contre les putschistes, il Ă©tait clair qu’ils sont venus pour corriger les distorsions et remettre le pouvoir aux civils. Ils veulent servir leur pays loyalement sous le drapeau, fidèlement Ă  leur serment d’officiers supĂ©rieurs.
         Effectivement, après une transition de 19 mois, le pouvoir malgrĂ© quelques tentatives malignes de l’usurper une nouvelle fois par le vote blanc, est restituĂ© aux civils Ă  la faveur d’élections transparentes saluĂ©es par tout le monde. Nos militaires ont donnĂ© une leçon au monde entier : le tiers monde peut ĂŞtre dĂ©mocratique et nos armĂ©es croient bien en la dĂ©mocratie et peuvent  servir leur pays en  les mettant sur la voie de celle-ci.
           Un peu avant la fin de la transition, des bandits de la rĂ©publique tentent de dĂ©router, comme Ă  leur accoutumĂ©e, le prĂ©sident du CMJD. Ils lui demandent de garder le pouvoir en essayant de le convaincre que c’est çà la volontĂ© du peuple. « Oui, le peuple rejette tous les candidats ce qui  signifie, qu’il veut que vous restiez au pouvoir » ; « Vous ĂŞtes le seul mauritanien, et mĂŞme, le seul  ĂŞtre humain digne de ce fauteuil.  Ne le donnez pas aux mĂ©diocres, ne le donnez pas aux incapables. Gardez-le pour vous  car vous ĂŞtes le meilleur» lui intimaient-ils. Le PrĂ©sident Ely OULD Mohamed Vall qui, comme tout homme, a ses faiblesses,  faillit ĂŞtre pris dans le piège qu’il avait lui-mĂŞme et ses paires, tendu, avant Ă  Ould  Taya. Heureusement, la vigilance et l’intransigeance de notre classe politique, notre presse et surtout la communautĂ© internationale, fait paraitre Ă  ce premier complot.  D’aucun disent, que Med  Ould  Abdel Aziz s’était opposĂ© aussi ;  car cela compromettrait  Ă  sa conspiration future, qu’il ourdissait dĂ©jĂ . Il fit alors, selon ses thurifĂ©raires, obstruction au projet d’Ely et demanda Ă  ce que la parole donnĂ©e au peuple, soit tenue.  Sagement,  notre prĂ©sident Ely, revient Ă  la raison et les Ă©lections furent organisĂ©es Ă  la date prĂ©vue. 
         Un nouveau prĂ©sident a Ă©tĂ© Ă©lu Ă  travers un scrutin saluĂ© par tous les compĂ©titeurs et par la communautĂ© internationale.  Le prĂ©sident SIDI O/ CHEIKH ABDALLAHI,  est Ă©lu a la magistrature suprĂŞme. La junte militaire a tenue sa promesse.
      Le prĂ©sident SIDI  OULD  CHEIKH  ABDALLAHI, fait montre d’une tranquillitĂ©, et d’une volontĂ© telle qu’il n’eut pas grand peine Ă  s’attaquer, avec habiletĂ© et courage aux grandes questions pendantes, l’esclavage, le passif humanitaire et l’enracinement de la dĂ©mocratie. Dès les premières semaines de son mandat le prĂ©sident, s’est attaquĂ© de façon frontale et sans Ă©quivoque Ă  ces  problĂ©matiques rĂ©currentes.
             Des textes rĂ©glementaires furent Ă©laborĂ©es et votĂ©s pour mettre fin a l’impunitĂ© juridique de la pratique de l’esclavage. DĂ©sormais l’esclavage est criminalisĂ©, la justice le voit autrement maintenant, ce n’est plus un fait ou un Ă©tat anoblissant, au contraire l’esclavage, est devenu un crime passible de peine et d’amende. Un mĂŞme traitement est rĂ©servĂ©  Ă  la question du retour des  dĂ©portĂ©s et du passif humanitaire. Ces actions courageuses, font de cet « homme de Dieu » un prĂ©sident fort,  capable de rĂ©soudre les grands problèmes sans susciter la sensibilitĂ© d’un quelconque groupe fut-il –dominant ou dominĂ©.
           Ce fut dans cette pĂ©riode, et pour la première fois dans l’histoire de ce pays, que le pouvoir et l’opposition se concertent sur toutes les politiques et toutes les actions publiques. Le parlement qui n’était qu’une chambre d’enregistrement et d’applaudissement des actions du gouvernement, a recouvert tout ses droits et toutes ses prĂ©rogatives, et, est devenu un parlement digne du nom. Le pays commençait Ă  prendre l’allure d’un Etat dĂ©mocratique, le pouvoir Ă©tait ouvert Ă  la critique, acceptait la contradiction, et tout le monde commençait Ă  se sentir en sĂ©curitĂ© dans le pays et Ă  rĂŞver  d’un avenir meilleur.
          Nos vaillants militaires ont tenus leur  promesse de rendre le pouvoir aux civils dissipant, dans l’esprit de ceux qui doutaient de la loyautĂ© de la  junte, la crainte que ce ne fĂ»t que ruse. Mais subitement, et contrairement Ă  toute attente, nous fumes secouĂ©s, comme pour nous  rappeler que  nous  dormions  et que la dĂ©mocratie que l’on avait construite au tour de nous, n’était qu’un songe. En effet, le 6 aoĂ»t 2008, tout s’envole subitement, un nouveau coup d’Etat tombe sur les tĂŞtes. Nos militaires nous ont trahis!
              Mais les membres du  CMJD ne peuvent,  tout de mĂŞme, pas ĂŞtre des menteurs ! Ils ne peuvent pas tous ĂŞtre sans parole d’honneur!  Ils comptaient effectivement parmi eux, des officiers honnĂŞtes et Ă©mĂ©rites ; des hommes de parole d’honneur qui ne trahissent pas leur peuple.
             Cette fois au complot, personne n’a parlĂ© de Ely  O/ Med Vall, ni du colonel Ould Boubacar, mais de colonel Med O/ AbdelAziz  et le colonel Ould Ghazouani. Oui que de ces deux officiers : le chef d’Etat major particulier, Med O/ AbdelAziz  et le chef d’Etat major nationale Med O/ Gazouani. Ils furent pour tant, tous deux membres du CMJD ; ils avaient promis,  comme leurs pairs naguère, de garantir et de prĂ©server les rĂ©sultats des Ă©lections : la dĂ©mocratie.
           Mais ces deux officiers, tout fraĂ®chement promus gĂ©nĂ©raux, se conduisaient de manière Ă©quivoque ; leur conduite suscitait beaucoup de questions. La loyautĂ© qu’ils affichaient au prĂ©sident n’était nullement sincère. La crise suscitĂ©e pour gangrener  la scĂ©ne politique, le Parlement  manipulĂ© contre l’exĂ©cutif, les dĂ©putĂ©s qui menaçaient de dĂ©poser une motion de censure contre le gouvernement…, tout n’était que manifestations d’une conspiration savamment prĂ©parĂ©e par eux. Ils voulaient la tĂŞte du gouvernement, ils n’étaient pas contents de la nomination de OULD WAGF. Et pourtant, ils ne l’étaient, non plus pas contant du premier ministre Zein O/Zeidane. Que se passait-il alors?
             Des tentatives de rĂ©conciliation entre l’exĂ©cutif et le lĂ©gislatif, menĂ©es par le  l’illustre prĂ©sident de l’assemblĂ© Nationale, Monsieur Messaoud OULD BOULKHAIR, malgrĂ© tout l’effort fourni par l’homme, ne donnent pas de rĂ©sultat.  Et puis les tireurs des ficelles de la fronde apparurent au grand jour, ils ne se cachaient mĂŞme plus, ils convoquent  les dĂ©putĂ©s, tiennent avec eux des rĂ©unions dans leur bureaux  Ă©tablis Ă  la prĂ©sidence mĂŞme.

 C’est eux qui pilotent la conspiration, ces deux que reçoivent les dĂ©pitĂ©s Ă  leurs ordres. Med O/  Abdel Aziz  et Ghazouani Ă©taient les principaux instigateurs de la fronde ; ils cherchaient Ă  dĂ©stabiliser le pouvoir. Mais au fond, quelles Ă©taient leurs raisons ?  Cherchaient-ils le pouvoir?
            Med  O/ Abdell Aziz et Ghazouani  voulaient prendre le pouvoir, ils avaient ourdi la crise pour reprendre le pouvoir. Nos hĂ©ros,  nous avaient-ils donc menti ? N’étaient-ils pas des vrais hĂ©ros ? Qui Ă©taient-ils alors vraiment?  Etaient-ils seules ou soutenus par d’autres puissances ? Leurs promesses n’étaient-elles donc pas sincères ? Certes, non !  Ils nous avaient trompĂ©s ; ils projetaient de faire  un nouveau  coup  d’Etat, mais cette fois, contre une rĂ©elle dĂ©mocratie.
           Un plan pour renverser le pouvoir, Ă©tait dĂ©jĂ  Ă©laborĂ©, il avait Ă©tĂ© en effet dĂ©cidĂ© d’organiser une marche contre la prĂ©sidence dirigĂ©e par les dĂ©putĂ©s frondeurs avec la conspiration  du BASEP : il Ă©tait prĂ©venu qu’arrivĂ© Ă  la prĂ©sidence le BASEP, chargĂ© de la protection du PrĂ©sident, allait ouvrir grandes les portes  du palais et laisser les manifestants marcher violement contre ses occupants.  Un plan d’une lâchetĂ© extrĂŞme, pour instaurer la peur et le dĂ©sordre  et porter atteinte Ă  la vie du PrĂ©sident et sa famille pour justifier la reprise du pouvoir par le BASEP, en sauveur de la nation,  en arrĂŞtant  le dĂ©sordre qu’il aurait lui-mĂŞme suscitĂ©, après que le prĂ©sident soit tuĂ© ! Un  plan qui ne sera heureusement pas rĂ©alisĂ© ; des fuites eurent lieu ;  le PrĂ©sident en sera informĂ© deux a trois jours avant son exĂ©cution.
          Pour  parer au  complot, il ne restait plus que affronter les rebelles et de les limoger avant qu’il ne soit trop tard. Mais hĂ©las, l’industrie du coup d’Etat Ă©tait dĂ©jĂ  enclenchĂ©, c’est trop tard, le complot est ourdi. Le 6 aoĂ»t, très tĂ´t le matin,  les quatre chefs d’Etat major sont limogĂ©s et, au lieu de se soumettre comme le ferait tout officier d’honneur, les loups s’emparent du pouvoir. Quelle imposture !

Ahmed Samba OULD ABDALLAHI
Ex-Porte parole du Président Sidi Mohamed OULD CHEKH ABDALLAHI


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