Depuis quelque temps, et plus exactement dans la foulée du coup d’Etat du 6 août 2008, des voix se lèvent, ça et là , pour souffler sur les clivages qui traversent la société mauritanienne en général et sur la question harratine en particulier, tirant sans ménagement sur la corde très sensible...
...de l’équilibre ethno racial de notre peuple dont la diversité, jusque-là source de force et ciment d’unité, se trouve utilisée pour allumer des dissensions et fomenter des conflits intestins. Le discours que tiennent ces pyromanes des périodes d’exception est, à mon avis, d’une facture si triviale, que je me suis toujours abstenu de m’en émouvoir outre mesure ; et jamais l’idée de prendre la plume pour porter la contradiction à ses énonciateurs ne m’aurait effleuré l’esprit, si de grandes personnalités politiques, technocratiques et des leaders syndicaux pour lesquels je nourris respect et admiration, n’étaient pas montés au créneau pour aborder le sujet.
En lisant certaines interviews et tribunes parues récemment dans la presse et la panoplie d’articles que déverse le Net sur la question, l’appel du devoir a été plus fort sur moi que l’appréhension de mêler ma voix à la cacophonie ambiante, au risque de paraître animé, comme certains, par l’opportunisme politicien très prenant dans des périodes comme celle que traverse aujourd’hui la Mauritanie. Mais qu’il me soit concédé que cette modeste contribution ne vise ni à soutenir une thèse contre une autre, ni même à proposer une voie idoine pour temporiser le débat et apaiser les joutes. . Dans une logique qui se nourrit de mon profond amour pour ce pays et de la conviction qui est la mienne que notre avenir tous se trouve bien dans la recherche de ce qui nous sert ensemble et nulle part ailleurs. Il s’agira seulement pour moi d’essayer de trouver une réponse à la question suivante : Mais qui a donc intérêt à jeter, ces jours-ci, les Bidan contre les harratines ? Les harratines eux même, le pouvoir en place ou l’opposition actuelle ?
Les harratines ? En tant que couche sociale, les maures harratines ont-ils aujourd’hui intérêt à s’engager dans une confrontation avec les maures Bidan avec lesquels ils constituent, en réalité, une même ethnie et une même culture, à telle enseigne qu’il ne sera pas évident, si les choses en arrivaient à ce stade, de tracer une ligne de démarcation parfaite entre ceux d’un camp et ceux de l’autre ? A coup sûr non ! Quel profit peut espérer cette communauté d’une guerre civile ou d’une quelconque autre forme de rivalité épousant de tels contours ? En tournant et retournant les choses dans tous les sens, aucun ! Plus « trivialement » encore, quelle issue attendre de la « négritude » des harratines au nom de laquelle on veut les séparer des maures Bidan insensé ment appelé « arabo-berbères » ? Je n’en vois pas ! Et d’ailleurs quelle vérité historique a-t-elle, cette thèse, sachant que ceux qu’on appelle « harratines » ne sont pas tous des fils d’anciens esclaves, ne sont pas tous noirs et, mieux encore, ne sont pas tous négro-africains de naissance ? Certes la société mauritanienne a connu malheureusement l’esclavage mais des progrès notoires ont été enregistres dans son éradication grâce au combat d une élite qui a très tôt porte le flambeau de la libération et de l’émancipation de cette frange qui d ailleurs n a jamais épouse de telles thèses contrairement a ce que des personnes tentent aujourd’hui d’insinuer. Donc, est-ce un revirement ? Certainement pas. L’engagement du FNDD dans toutes ses dimensions partisane, ethnique, régionale et tribale derrière la candidature du leader historique des harratines MESSOUD O / BOULKHEIR est une donne importante dans le traitement de la question harratine et qui ne mérite pas une pareille réponse en particulier un tel discours. Non, non les harratines n’ont, à coup sûr, aucun intérêt à poser la question harratine sous cet angle.
Le pouvoir actuel ? On peut envisager l’hypothèse que le pouvoir actuel, sacrifiant à la vieille thèse machiavélique de « diviser pour régner », puisse espérer quelque bénéfice à « occuper » les mauritaniens, la majorité maure en particulier, par des clivages intestins de nature à affaiblir les deux segments de l’opposition rassemblés, schématiquement, autour d’Ahmed Ould Daddah (les maures bidhans) et de Messaoud Ould Boulkheir (les maures haratines). Sachant le niveau de réflexion de certains « stratèges » embusqués dans le pouvoir actuel, on peut se laisser croire à l’existence d’un tel scénario, nonobstant son absurde fausseté. Mais même, en supposant qu’il puisse exister des démons autour de Aziz pour penser ainsi, quel intérêt le Chef de l’Etat et son régime ont-ils à déstabiliser si dangereusement un pays qu’ils veulent gouverner ? Aucun, à ce que je sache ! Quels moyens ont-ils pour faire face à l’effet boule de neige que peut avoir un tel scénario de « diversion » politicienne ? Aucun, non plus ! Le pouvoir ne peut tirer aucun résultat politique de la fomentation d’un conflit au sein de la majorité ethnoculturelle du pays ! Aucun !
L’opposition ? On peut, enfin, accuser l’opposition d’être l’instigatrice de ce « radicalisme harratine » et d’en faire tactiquement feu pour déstabiliser le pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz qu’elle combat. Souffler sur les foyers de tension sociale, encourager la multiplication des revendications de toute nature et ouvrir davantage de fronts hostiles aux gouvernants… ; c’est de bonne guerre en politique, peut-on être tenté d’arguer. Mais nous buterons toujours sur les mêmes questions : quels bénéfices, in fine, l’opposition peut-elle espérer d’une guerre civile, quels qu’en soient par ailleurs les contours ? Aucun ! Et quels remèdes croit-elle pouvoir apporter, une fois aux commandes du pays, à une telle catastrophe ? On n’en voit pas ! Est-ce que d ailleurs toute cette campagne n’est pas orientée contre Messoud lui même en tant que leader et que dirigeant du front anti putsch et de l’opposition démocratique après. C est donc sûr l’opposition n’a aucun intérêt dans une telle démarche.
Finalement, ni les harratines, ni le pouvoir, ni l’opposition n’ont d’intérêt à « réactiver » la question harratine sur le registre aujourd’hui entretenu par certain discours d’orfraie qui se nourrit d’amalgame et de manipulation de l’histoire. Mais à qui donc profite tout ce tapage ? Les mauritaniens ont grand intérêt à poursuivre l’investigation pour débusquer la ou les force(s) qui cherchent à jeter une partie de leur peuple contre une autre, de si belliciste manière !
SIDI OULD BILAL PROFESSEUR
Les opinions et avis exprimés dans ce courrier n’engagent pas nécessairement TAHALIL. Ils engagent leur(s) auteur(s).
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