Ould Moctar Nech : «La démocratie n’est pas une fatalité»   
09/04/2009

Tahalil hebdo : Vous vous étiez déjà exprimé dans nos colonnes sur l’actualité mauritanienne depuis le putsch du 6août 2008, comment analysez vous la situation aujourd’hui Ã  la veille de la démission du Général Aziz?
Mohamed Nacer Ould Moctar Nech : En effet, je pense et je reste sur cette position que la solution devra être, avant tout, un compromis pour la Mauritanie et non un accord réalisé sur une trame de fond constitutionnel


pour plaire à toutes ou aux parties des formations politiques en présence.



Au niveau des nations, la stabilité prime le droit et il suffit d’observer notre environnement international aujourd’hui pour s’en rendre compte.

Dans notre cas, un accord faisant fi du problème posé au pays et qui est en réalité fondamentalement le résultat des errements démocratiques du pays durant les quinze premiers mois du quinquennat présidentiel précédent, serait seulement faire reculer le moment de vérité aussi bien pour la majorité que les opposants. En réalité, le pays est à l’arrêt. Nos partenaires sont en train de se détourner de nous en orientant les ressources de développement ailleurs, faute de mieux. Notre classe politique fait malheureusement comme si «ses problèmes» sont le problème de tous les mauritaniens ignorant ou feignant d’ignorer que les mauritaniens ont d’autres préoccupations plus déterminantes pour leur quotidien et pour leur avenir : la sécurité, l’emploi, la santé, l’éducation, notamment. A mon avis, le Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi , et je pense que cet homme est un homme mesuré et sage, et la coalition qui le soutient gagneraient à tourner la page et à agir de concert avec l’armée et la communauté internationale pour sortir le pays de cette impasse politique.


Tahalil hebdo : Mais ces objectifs ne peuvent être réalisés que sous la démocratie !


M.N.O.M.N. : De quelle démocratie parlez-vous ? Sous nos cieux ce terme a été vidé de sa substance en fonction des orientations que chacun veut donner au fonctionnement de nos institutions. Tout se passe comme si la démocratie est une formalité de police qu’on range aux oubliettes une fois ces formalités accomplies. Très vite s’installe le népotisme, le tribalisme, l’affairisme, bref tous les ingrédients de l’injustice et de l’inéquité dans la manière de gouverner la Mauritanie.
La preuve que la démocratie est diversement définie par les acteurs politiques est par exemple la réaction du Président du RFD, M Ahmed Ould Daddah, juste après le changement du 6 août 2008 et qui montre bien que la démocratie n’est pas un concept immuable comme pour une doctrine universelle mais il s’agit bien d’un concept de bonne gouvernance avant tout. Ce qui, il faudra l’admettre, a fait très largement défaut durant les quinze premiers
mois du quinquennat précédent, mandat, on le sait, tourné en queue de poisson pour les raisons que personne ne peut aujourd’hui ignorer.


Tahalil hebdo : Donc pour vous c’est le général Aziz avec la baraka ?


M.N.O.M.N. : Il est vrai que le Général Ould Abdel Aziz personnifie aux yeux de tout le monde l’image du mouvement militaire ayant pris le pouvoir par la force depuis 2005. Pour ce qui me concerne, j’ai une autre approche : Si le Général Ould Abdel Aziz est aujourd’hui aux commandes, c’est parcque les civils ont Ã©té incapables de rassurer le peuple sur son avenir et lui donner les moyens économiques de vivre comme il peut y prétendre au vu des énormes potentialités du pays. Rappelez-vous de ce que nous avons tous enduré depuis 2007 ! Toutes les politiques de développement se sont vu réduites à de la communication markéting autour des responsables de l’exécutif sans réalisation notable aucune dans le cadre de la politique économique et sociale. Les axes stratégiques de croissance ont été mutés en simples actions de gestion de projet comme pour une sous structure de ministère. Ce n’est pas cela la bonne gouvernance…


Tahalil hebdo : Vous trouvez que nous vivons mieux aujourd’hui ?
M.N.O.M.N. :
A mon avis, oui ! Toutes choses étant, cependant, Ã  relativiser. Et il reste l’espoir d’un lendemain meilleur, si tout se passe bien et que nous dépassions sans heurts la prochaine échéance électorale et je crois à cet égard que tout se passera très bien. Je vous rappelle que, personnellement, j’estime que le suffrage universel direct est une gageure dans un pays comme le nôtre pour les motifs que j’ai souvent développés dans vos colonnes, mais il nous est toujours loisible de revoir notre concept électoral par étapes, par exemple, après avoir conçu une bonne politique de décentralisation à la fois économique et politique sur notre territoire, cela durant les 3 premières années ou même sur toute la durée du mandat du futur président.


Tahalil hebdo : Vous avez réponse à tout !
M.N.O.M.N. :
J’exprime tout simplement mon sentiment sur les questions que vous évoquez. Mais peut être avez vous raison que chacun et chacune dans ce pays réfléchit et agit en ordre dispersé. Si c’est cela le sens de votre remarque, je vous donne raison. Les mauritaniens doivent se consacrer au développement de notre pays en s’occupant chacun, chacune, de ce qu’il sait bien faire et, en l’occurrence, je vous accorde que je n’ai jamais fait de politique durant toutes ces années !


Tahalil hebdo : Quel est selon vous l’avenir du FNDD ?
M.N.O.M.N. :
Je ne puis prédire les évènements comme un oracle peut le faire dans la légende. Ce qui est sûr, c’est qu’il y aura un recentrage des idées et des actes, une fois que tout le monde, y compris du côté du pouvoir actuel, aura compris que le peuple mauritanien se moque éperdument de la démocratie qu’ils défendent. Tout comme pour la dictature, la démocratie n’est pas une fatalité !Ce que le peuple Mauritanie veut voir tout de suite et sans attendre, c’est une nouvelle façon de gouverner qui préserve la sécurité du citoyen, protège ses intérêts en lui assurant la justice, un gagne-pain honorable et l’espoir d’un lendemain meilleur.

 Propos receuillis par IOM



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