Alors que l’industrie pharmaceutique en Afrique atteindra une valeur comprise entre 40 et 65 milliards US d’ici 2020, traduisant le fort besoin des populations en médicaments, le coût d’accès à ces produits représentera encore un énorme défi financier.
Investir davantage dans la mĂ©decine traditionnelle, qui demeure jusqu’ici peu valorisĂ©e, pourrait s’avĂ©rer judicieux. Au regard du potentiel que renferme ce segment alternatif, le continent pourrait rĂ©duire ses importations en mĂ©dicaments et maximiser ses chances de rĂ©aliser le 3ème objectif de dĂ©veloppement durable. Actuellement, le continent africain produit moins de 5 % des mĂ©dicaments que consomment ses populations alors que 95 % sont importĂ©s, rĂ©vèle Proparco dans son rapport 2018 intitulĂ© «?Le mĂ©dicament en Afrique: rĂ©pondre aux enjeux d’accessibilitĂ© et de qualitĂ©?». Selon la filiale de l’Agence française de dĂ©veloppement bien que certains pays comme l’Afrique du Sud et le Maroc rĂ©ussissent Ă couvrir 70% Ă 80 % de leurs besoins pharmaceutiques, de nombreux pays comme certains d’Afrique centrale dĂ©pensent encore une part considĂ©rable de leur budget public pour importer 99 % des mĂ©dicaments que consomment leurs populations. Le volume de mĂ©dicaments importĂ©s sur le continent, qui reprĂ©sentait un marchĂ© de 4,7 milliards USD en 2003; puis 20,8 milliards USD en 2013, devrait atteindre une valeur comprise entre 40 et 65 milliards US d’ici 2020, selon le cabinet conseil McKinsey. La progression tĂ©moigne du fort besoin des populations africaines en mĂ©dicaments. Mais la faible production locale nuit encore Ă l’accessibilitĂ© des coĂ»ts pour les populations. Dans de nombreux pays d’Afrique, les dĂ©penses en mĂ©dicaments reprĂ©sentent encore jusqu’à 30 % du budget allouĂ© Ă la santĂ©, qui lui-mĂŞme pèse pour près de 60% dans le budget des mĂ©nages. En conjuguant sa richesse botanique, l’hĂ©ritage mĂ©dicinal traditionnel transmis par divers peuples au fil des annĂ©es, et les recherches scientifiques modernes, l’Afrique Ă toutes les clĂ©s en main pour rĂ©soudre un elarge part de ses problèmes de santĂ©. Mais cette situation peut ĂŞtre renversĂ©e grâce Ă la mĂ©decine traditionnelle ou naturelle. En conjuguant sa richesse botanique, l’hĂ©ritage mĂ©dicinal traditionnel transmis par divers peuples au fil des annĂ©es, et les recherches scientifiques modernes, l’Afrique Ă toutes les clĂ©s en main pour rĂ©soudre un elarge part de ses problèmes de santĂ©. Peut-ĂŞtre pas tous, mais au moins les plus communs tels que le paludisme, la fièvre typhoĂŻde, etc. qui reprĂ©sentent encore les sources principales de dĂ©cès. Lors de la ConfĂ©rence internationale sur la mĂ©decine traditionnelle pour les pays d’Asie du Sud-Est, en fĂ©vrier?2013, la directrice gĂ©nĂ©rale de l’OMS, le Dr?Margaret Chan, affirmait que «?les mĂ©decines traditionnelles dont la qualitĂ©, la sĂ©curitĂ© et l’efficacitĂ© sont avĂ©rĂ©es, participent Ă la rĂ©alisation de l’objectif de donner Ă tous un accès aux soins. Pour plusieurs millions de personnes, les mĂ©dicaments Ă base de plantes, les traitements traditionnels et les praticiens traditionnels constituent la principale, voire l’unique, source de soins de santĂ©?». Elle soulignait que «?ces soins sont proches des gens, faciles d’accès et financièrement abordables. Ils sont Ă©galement culturellement acceptables et un grand nombre de personnes leur font confiance. Le caractère financièrement abordable de la plupart des mĂ©dicaments traditionnels les rend d’autant plus attrayants Ă l’heure oĂą les frais de santĂ© explosent et oĂą l’austĂ©ritĂ© est quasiment universelle. La mĂ©decine traditionnelle apparaĂ®t Ă©galement comme un moyen de faire face Ă l’inexorable montĂ©e de maladies chroniques non transmissibles?». Un faible encadrement La mĂ©decine traditionnelle, associĂ©e Ă la mĂ©decine conventionnelle dans l’approche thĂ©rapeutique en Afrique, a le potentiel d’amĂ©liorer efficacement la situation sanitaire du continent et lui permettre d’atteindre plus rapidement l’objectif de dĂ©veloppement durable n°3 des Nations Unis?:?«?Bien-ĂŞtre et santĂ©?» pour tous Ă l’horizon 2030. C’est d’ailleurs pleinement consciente du potentiel de la mĂ©decine traditionnelle, que l’Organisation mondiale de la santĂ© (OMS) a multipliĂ© les stratĂ©gies de dĂ©veloppement y relative. Depuis 2002, l’institution internationale appelle les pays du monde, notamment les Etats africains, Ă dĂ©velopper la rĂ©glementation, amĂ©liorer la formation, les pratiques, la qualitĂ© des mĂ©dicaments, la recherche scientifique, la protection des droits de propriĂ©tĂ© intellectuelle des peuples indigènes et des communautĂ©s locales, ainsi que leur hĂ©ritage dans le domaine des soins de santĂ©, pour asseoir la crĂ©dibilitĂ© de la mĂ©decine traditionnelle auprès d’une plus grande frange des populations africaines et de la communautĂ© scientifique internationale. Moins de 25 pays africains ont mis en place des programmes nationaux de mĂ©decine traditionnelle. Moins de 20 ont crĂ©Ă© des services nationaux de mĂ©decine traditionnelle. Moins de 10 États ont des cadres nationaux d’expertise pour le dĂ©veloppement de la mĂ©decine traditionnelle. Mais ces changements attendus de chaque pays tardent Ă ĂŞtre mis en place. L’Union Africaine (UA), lors de la 32ème session de la ConfĂ©rence des chefs d’Etat et de gouvernement, tenue le 10 fĂ©vrier 2019 Ă Addis-Abeba, en Éthiopie, rĂ©vĂ©lait que malgrĂ© la dĂ©cennie 2001-2010, dĂ©clarĂ©e « dĂ©cennie de la mĂ©decine traditionnelle africaine », l’élaboration d’un cadre appropriĂ© pour l’évolution de ce secteur d’activitĂ© est demeurĂ© faible sur le continent. ConsĂ©quences, la majoritĂ© des pays africains maintiennent la mĂ©decine traditionnelle dans l’informel. Moins de 25 pays africains ont mis en place des programmes nationaux de mĂ©decine traditionnelle. Moins de 20 ont crĂ©Ă© des services nationaux de mĂ©decine traditionnelle. Moins de 10 États ont des cadres nationaux d’expertise pour le dĂ©veloppement de la mĂ©decine traditionnelle. Un marchĂ© pourtant porteur Au-delĂ de garantir l’accès d’un plus grand nombre aux soins de santĂ© de qualitĂ©, la mĂ©decine traditionnelle pourrait Ă©galement reprĂ©senter une richesse financière importante pour les Etats africains au regard de la forte demande en mĂ©dicament abordables. Dans son dernier rapport de recherche, Market Research Future (MRFR), indique que le marchĂ© mondial des mĂ©dicaments Ă base de plantes devrait atteindre une valeur de plus de 129 milliards dollars US d’ici 2023 avec un taux moyen de croissance annuelle de 5,88% sur la pĂ©riode de prĂ©vision 2018 Ă 2023. Le marchĂ© mondial des mĂ©dicaments Ă base de plantes devrait atteindre une valeur de plus de 129 milliards dollars US d’ici 2023 avec un taux moyen de croissance annuelle de 5,88% sur la pĂ©riode de prĂ©vision 2018 Ă 2023. Selon MRFR, l’utilisation croissante de produits chimiques de synthèse en mĂ©decine conventionnelle a dĂ©plu Ă une population importante qui exige de plus en plus des alternatives naturelles. Ce changement d’habitude a stimulĂ© la demande de plantes mĂ©dicinales Ă travers le monde, y compris dans les rĂ©gions dĂ©veloppĂ©es telles que l’AmĂ©rique du Nord et l’Europe, ainsi que dans les pays en dĂ©veloppement d’Asie Pacifique, d’AmĂ©rique latine et du Moyen-Orient et mĂŞme en Afrique. Le nombre croissant de consommateurs optant pour des alternatives naturelles Ă la mĂ©decine conventionnelle restera probablement le principal moteur du marchĂ© mondial des mĂ©dicaments Ă base de plantes d’ici 2023. C’est ce qui explique d’ailleurs l’intĂ©rĂŞt croissant d’investisseurs tels que des sociĂ©tĂ©s pharmaceutiques occidentales ou encore des sociĂ©tĂ©s de capital-risque en Chine, au Japon, en Inde ou encore en CorĂ©e du Sud, oĂą la mĂ©decine traditionnelle reprĂ©sente un business florissant. L’Afrique, en investissant dans la mĂ©decine traditionnelle, a beaucoup Ă gagner. Les exemples chinois et indien Aujourd’hui, grâce Ă une sĂ©rieuse codification, les mĂ©decines traditionnelles chinoise et indienne ont conquis le monde. Selon China Med, la valeur totale des exportations de mĂ©dicaments traditionnels chinois en 2016 Ă©tait de 3,426 milliards de dollars US. Les produits ont Ă©tĂ© exportĂ©s vers 185 pays et rĂ©gions. Les principaux marchĂ©s sont toujours restĂ©s en Asie, avec Hong Kong, le Japon, la Malaisie, la CorĂ©e du Sud ou l’IndonĂ©sie, mais aussi aux États-Unis. En 2016, la Chine a exportĂ© pour 526 millions de dollars US de mĂ©dicaments traditionnels chaz l’Oncle Sam. Pour ce qui est des soins ayurvĂ©diques, originaires d’Inde, Market Watch estime que le marchĂ© mondial qui pesait pour 3,4 milliards de dollars US en 2015 devrait atteindre 9,7 milliards de dollars US d’ici 2022, avec un taux moyen de croissance annuelle de 16,2%. (Ecofin Hebdo)
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