Le mirage démocratique mauritanien, chronique d’une illusion collective, par Sidi-Mohamed Ould Abdelwahab   
27/09/2008

Au lendemain du 3 août 2005 et du 19 avril 2007 nous avons cru, naïvement semble-t-il, au sentier promoteur de la vox-pupulis (la voix du peuple) et son corollaire de consolations: stabilité politique, fin des coups d’Etats, séparation effective des pouvoirs et succession au Palais suivant les règles de l’art démocratique.Les autres accompagnateurs (OUA, CEE, USA) ont eux aussi jubilé face à un exploit militaro-civil à valeur d’exemple.



Un peu plus d’une année aurait suffi pour mettre le "modèle démocratique mauritanien" dans la tourmente. Tel  "une opérette viennoise qui se terminera par une tragédie Shakespearienne" dirait O.Beheit (Le bal masque de la démocratie tribale , Le Méhariste, juin 2007 ) en comparant ironiquement la transition du CMJD à un théâtre et le pays à cadavre qu’on tente d’ensevelir après.
Le spectacle démocratique révélera ses terribles limites comme le néant sulfureux d’un mirage saharien. Le reflets du liquide vital à l’horizon si proche se révèle comme une vue d’esprit, un effet de réfraction, une soif de l’imaginaire hanté par le rude et pénible chemin, une projection de l’espoir sur le terrain crevassé d’ici bas.
Le premier régime de la seconde ère démocratique aurait ainsi échoué durant la deuxième année de son rodage institutionnel sous le poids de ses contradictions internes, au vu et au su du monde, dans une précipitation qui ne semble épargner "involontairement" les acteurs de sa déchéance: ceux qui supposaient en pérenniser l’incarnation, protéger l’équilibre et en garantir les débordements.
Les principales institutions de la République (Présidence. Parlement, Armée) ont, semble t-il, trempé, par "effet de réaction" diront certains, dans cette chronique de l’ "espoir brisé" pour reprendre le titre d’un article de Shbih O.Sheikh Maalainine (paru dans Mauritanie Nouvelles, 1992) datant d’une autre époque, celle des élections contestées du temps de O.Taya.
L’espoir étant ici le commun souci de "normalité " politique et de bon fonctionnement des institutions pour le bien-être du peuple.
Comme par "malédiction" les mécanismes de régulation inter-pouvoirs ont cédé sans trop de résistance, les ponts de solidarité républicaine ont craqué et les canaux de la concertation positive se sont vite bouchés, débouchant sur le constat d’un chambardement hybride: Un exécutif renouvelé, un Parlement partiellement "remodelé" au sommet et à la base, un re-positionnement des partis politiques suivant la ligne du pour et du contre (par rapport au changement) et une interrogation sur les modalités de cette seconde transition contestée.
 

Comment est on arrivé la? s’exclamait quelques mois avant Med.Y.O.Breideleil dans son fameux "éviter l’infamie" en parlant d’un "brouillard épais d’une nature jamais connue" qui recouvre le pays. Ce brouillard, de jadis, à tendance maintenant à prendre de l’ampleur sous l’effet conjugué de l’attente d’un "agenda" de sortie de crise, des probables sanctions internationales et de la dernière attaque terroriste de Tourine.
En termes plus optimistes l’ambassadeur mauritanien à Dakar, Med.Vall O.Bellal dira après le "putsh" qu’une démocratie "subit des revers, trébuche pour se redresser ensuite" en évoquant les raisons liées à "la surcharge de l’échiquier politique national" (mode de scrutin, statut de l’opposition) et au "fossé entre les aspirations et la réalité" (Entretien avec l’Agence de Presse Africaine).
Plusieurs hypothèses explicatives furent avancées concernant cette volt face dans la praxis démocratique mauritanienne et sa genèse disputée.
Signalons parmi ces courantes explications sur les racines de la rupture du consensus caractérisant l’après investiture de SIDIOCA: le mécontentement au sein de la majorité après la désignation des instances dirigeantes du Parti ADIL (favorisant un camp réputé proche de l’ancien président O.Taya dit réactionnaire ou réfractaire au changement), la formation du gouvernement dit Waqef 1 (premier gouvernement sous la présidence de Yahya O.Ahmed El waqef , succédant à celui de Zein O.Zeidane) comprenant des figures qui symbolisent les ravages financiers du temps de Maawiya, l’insatisfaction grandissante dans le rang des députés de la majorité face au choix des ministres mentionnés, l’intervention "souterraine" des chefs militaires dans ce qu’il fut baptisé "fronde des parlementaires" ou "grogne des députés" , l’action de l’entourage présidentiel à travers l’expansion fulgurante de la Fondation KB, les réactions tendant vers l’escalade de part et d’autre dans un climat où plane le spectre d’un complot latent émanant des forces (BASEP)  auparavant protectrices de l’ordre en place.
 
Le serment brisé, les alliances rompues et les solidarités d’hier renvoyées aux calendes sahariennes; le rideau est levé sur une imprévisible chaîne de réactions, un Show rappelant les renversements d’alliance dans les révolutions africaines quand elles dévorent précocement leurs fils.
La rapidité avec laquelle le camp de la majorité constitué au lendemain des élections présidentielles du 19 avril 2007 s’est effondré  en morceaux juxtaposés, le Parti dit "présidentiel" (ADIL-PNDD) s’est disloqué suite à la fracture de sa "colonne vertébrale" parlementaire et le pays tout entier s’est retrouvé en "guerre de tranchées" comme le titre un quotidien nouakchottois invite à des réflexions plus approfondies sur cette situation "entre Charybde et Scylla" ( entre le risque calculé et le tout ou rien ) suivant l’expression du Pr.Ely Moustapha (Blog.haut et fort.com).
La communauté internationale, prise au dépourvu d’une éclipse démocratique non prévue dans l’astrologie onusienne, ne pouvait cacher sa consternation et son agacement, par condamnation ou silences, suivies de menaces de sanctions économiques.
 
Quelques éléments éclaircissent la difficile lisibilité de ce virage accidentel (une arrivée au pouvoir par accident dirait le nouvel homme fort de Nouakchott sur les ondes de RFI), cette bataille par décrets matinaux et cette transformation du paysage national en "POURS": "Pour la rectification" ( çàd soutient au nouveau Haut conseil d’Etat, HCE) et "pour le retour à l’ordre constitutionnel" (coalition des Partis du Front National pour la Défense de la Démocratie ou FNDD pro.SIDIOCA).
 L’héritage de la première transition
Deux points récurrents liés au temps de la transition ne cessent de rebondir comme facteurs à effet de retardement. Il s’agit de l’acceptation, voir l’encouragement, des candidatures indépendantes lors des élections parlementaires et du soutient, de certains membres de l’ex-CMJD (Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie)  à SIDIOCA durant les présidentielles.
Le premier facteur aurait rendu le parlement difficilement contrôlable tout en affaiblissant les partis politiques "classiques".Dans une analyse sur cet aspect Isselmou O.Mohamed parlera de "majorité morcelée" titrant son article tout simplement "qui sème le vent...".
Le second élément, tout en mettant en relativité la transparence et l’impartialité des autorités de l’époque aurait créé une sorte d’ "alliance secrète", un pacte de solidarité aux contours flous et un crédit avancé dont le remboursement inconcreto s’avèrerait problématique.
Ibrahima Moktar Sarr parlera, à juste titre, de " transition en dérive". 
Parmi les raisons qui ébranleront cet édifice de compromis pré-électoraux la cooptation au sein de l’exécutif d’une part de l’ancienne armada administrative mise en hibernation le temps d’une pause en attente du "gouvernement politique", ultra-politique cette fois.
Un gouvernement dont l’ouverture à des partis de l’ex-opposition (UFP, TAWASSOUL) fut brouillée par l’émergence d’une autre coterie (Les Roumouz) qui précipitera sa déchéance. 
 L’allergie vis à vis des "Roumouz" ou l’effet Maawiya
Dans un fameux discours au Palais des Congrès de Nouakchott (en été 2006) , Ely Ould Mohamed Vall, tout en signalant l’impossibilité de revenir sur cet immense labyrinthe des malversations administratives, qui risquait d’engloutir tout le monde, suggère l’option de tourner cette sombre page, remettre "le compteur à Zéro" et déclarer la fin de l’impunité pour l’avenir.
Ce pardon républicain, annoncé sans confession ni repentir, ne pouvait dissiper les ombres qui planaient sur plusieurs personnalités réputées d’une excellente expertise dans la gestion patrimoniale des biens publics.
Cette Tawba à sens unique n’effaça les craintes de la récidive, les astéries de l’indexation publique, la présomption de culpabilité permanente et le penchant de vouloir saper,en sourdine, les bases de l’Etat nourricier par les anciens timoniers de la République.
De telles figures ont auparavant occupé des postes clefs au temps de Maawiya (ministres, directeurs d’établissements publics, gouverneurs de régions, chefs de corps armés) au point de symboliser l’une des facettes les plus controversées de son régime.
En se présentant au cours des dernières élections parlementaires, plusieurs perdront des sièges, auparavant assurés, dans leurs fiefs électoraux; comme par délit de figuration dans la fameuse liste des "Roumouz El-vessad" (litter.Symboles de la Gabegie) du blog X-OULD-Y.
Cette donne imperceptible, inintelligible, incompréhensible et in-identifiable (comme les OVNI) pour les observateurs étrangers non avertis, fait parti du vocabulaire courant (au niveau populaire et dans les médias) et constituera un élément important dans la suite des évènements.
La réapparition de plusieurs figures notoires dans la composition du premier gouvernement du Président du PNDD (Pacte National pour la Démocratie et le Développement) Ould Ahmed Elwaqef, notamment à des postes ministériels clefs, déclenchera l’onde de choc au niveau d’une partie des députés "déçus" par un choix qu’ils qualifient de "retour en arrière" et même de trahison post-électorale.
Cette résurrection in-tempérea soulèvera de grandes interrogations sur la volonté du Président SIDIOCA qui promettait durant sa campagne la réédification de l’Etat sur de nouvelles bases d’intégrité, de moralité, de civisme et de respect de la chose publique. Promesses avancées dans le programme de campagne, dans sa réponse au courrier de l’Initiative Citoyenne, réitérées lors du débat avec Ahmed Ould Daddah et dans le discours d’investiture.
A t-il cédé à des pressions énormes, a t-il changé de conception depuis l’accession à cette mansion convoitée?, le pouvoir aveugle t-il les princes retranchés dans leurs forteresses à l’image du personnage d’Oscard Wild dont les larmes n’ont coulé qu’à titre posthume et après avoir été en état de statue observant le peuple ordinaire dans une place publique: OH! si je voyais tous ça!!!,  mon Dieu, si je savais...et à temps.
En tous cas une certaine allergie, largement partagée au niveau populaire et parmi l’élite du pays, vis à vis de certaines figures notoires de la mise à sac des finances publiques constitue un paramètre pathétique, quasi hystérique, incontournable dans la composition du mécontentement qui aboutira à l’achèvement précoce du mandat démocratiquement gagné.
En dépit de sa sélectivité discutable et du purisme douteux des dénonciateurs dont certains ont trempé dans cette marre brumeuse, cette notion de "Roumouz" constitue un thème favori dans les palabres de salon et dans l’inconscient collectif d’une communauté soumise aux effets de la rareté et de l’action de ce que O.Hreytani appelle "les criquets administratifs " qui dévorent les budgets suivant une alchimie phénoménale.
La question du partage des richesses nationales apparaît comme un thème central et passionné des discussions officielles et officieuses.
Désormais il agace beaucoup d’entendre ou de voir les autres "brouter" tranquillement dans l’enceinte des grands ministères en passant son temps sur les chaises de l’hémicycle (entrain de voter des projets de lois ou s’accabler de rapports interminables), dans un bureau "sec" ou quelque part loin du juteux butin.
Le choix présidentiel d’éviter le cumul des fonctions (parlementaires et gouvernementales) était-il en sa faveur?
Chacun veut sa part de la Moucharia nationale (le bien public) "ici  et maintenant" pour reprendre une expression pressée et tranchante de J.O.Yessa.
Paradoxalement chaque camp accuse l’autre de convoitises mercantilistes et de nostalgie des pratiques de pillage et de mise à sac des ressources publiques.
Qui a raison dans cette dialectique d’accusations mutuelles?.D’autres zones d’ombre subsistent.
 L’impossible consensus ou l’absurde à la mauritanienne    
La succession des évènements cités exprime une tendance dominante de la logique de l’escalade, du penchant à la surenchère, aux tractations ténébreuses et au culte de l’autosuffisance entre-deux des protagonistes que tout portait à bien s’entendre pour le bien de la cité.
L’aptitude à contenir tout dérapage, à arranger des concessions raisonnables, à concevoir des compromis de part et d’autre céda la place rapidement à une logique de bras de fer dont les moments forts étaient la démission du gouvernement de O.Elwaqef, la querelle entre certains Sénateurs et la première dame par médias  interposés, la menace de dissolution du Parlement, l’annonce d’une autre motion de censure contre le nouveau gouvernement (Waqef 2) avant l’avalanche des décrets contradictoires du mercredi agité le 06 août 2008.
Cette atmosphère continue et s’accentuera par la suite au tour du contrôle du "Kratos" (pouvoir).
Une grande part du non dit politique ombrage la lisibilité du citoyen ordinaire, du peuple et du monde face au basculement précipité de la République vers une trajectoire encore à définir, à faire accepter et à crédibiliser à tous les niveaux.
L’acquisition d’une majorité parlementaire confortable après les élections présidentielles était elle un cadeau fatal comme ce magnifique cheval en bois, rempli des guerriers armés, qui ouvriront les portes de la ville de Troie pour les grecs après un long siège ?, le site-in populaire évoqué était -il un préambule à la marche programmée sur le Palais gris et devrait -il autant agacer le tranquille et pieux Président?.
La crise atteignant son paroxysme suite au limogeage "matinal" des chefs militaires, la rupture définitive interviendra dans le camp de la majorité, tel un schisme brusque,  au niveau du "noyau dirigeant" dira Conscience et Résistance dans son communiqué "La devanture du système craque".
Ce retour à "un autre parfum d’août ", un autre renversement de l’ordre constitutionnel,  pour paraphraser autrement Ahmed Baba Miske qui parlait d’août 2005 lui rappelant l’atmosphère de la création de la Nahda en Août 1956 à Kaedi (Interview de Nouakchott Info, nov.2006), inaugurera une nouvelle parenthèse institutionnelle.
L’incompréhensible aussi restera cette stratégie présidentielle de donner tant de pouvoirs et d’honneurs à quelques proches collaborateurs avant de décider le retrait brusque de tels privilèges. Machiavel aurait conseillé autrement.
Un autre mystère réside dans le blocage "communication-nel" entre le Président renversé et les membres de sa majorité parlementaire malgré son ouverture d’esprit et son sens de dialogue avec les différents acteurs de la scène politique nationale (chefs de partis, représentants de la société civile).
L’image du prince-marabout venant paisiblement à la prière du vendredi à la mosquée saoudienne de la capitale accompagné de son illustre chef d’état major particulier, comme au temps des Almoravides ( dans l’île de Tidraa non loin de Nouakchott, repris actuellement dans un feuilleton sur la TVM montrant les chefs politique et militaire dans une proximité indéfectible) rend difficile la réalité d’une telle rupture, de si près.
Un "malin génie" habite t-il ce Palais où l’ombre de l’ancien architecte des destins d’hier circule entre les feuillages de palmiers et la faïence baroque comme une nostalgie d’éternité, une énième tentation de Venise?.
La réaction du peuple spectateur ne se ferait pas attendre.
 La Salsa mauritanienne
L’on se demande parfois, pourquoi chaque changement de Président est suivi d’une liesse populaire, un ouf de soulagement collectif et d’une vibration "patriotique" venant des coins les plus reculés du pays sous forme de manifestations spontanées ou organisées par les autorités locales.
Maître Moktar ould Daddah, paix sur son âme, en ressentira un effet déconcertant en juillet 1978, en écoutant la radio lors de son "séjour au Génie" à Nouakchott avant le transfert vers Oualata.
Il ne peut s’agir d’une hypocrisie collective, d’une simple versatilité liée à l’intérêt escompté, d’un positionnement automatique au coté du plus fort (Ezzir lemtyne) ou d’une manipulation pavlovienne du peuple.
Probablement il existe au fond de chaque âme nomade une irrésistible tentation du nouveau, une révolte inexplicable contre la durée et une soif d’un changement de décor à l’image de la navigation du campement entre les pâturages.
L’instinct d’adaptation, le réflexe de survie, la propension au détachement et la morale du "moindre mal" en sont -ils pour quelque chose?
La reconnaissance enthousiaste du nouveau guide est, elle aussi, liée à une millénaire tradition Malekite de respect au prince régnant (waliyi El Amr) dont le positionnement contesté de l’actuel Imam de la mosquée principale de Nouakchott ne constitue qu’une raisonnable continuité.
L’actuelle existence d’un front opposé ouvertement au nouveau régime et organisant des activités (meeting, manifestations, conférences..) à l’intérieur et à l’extérieur du pays exprime t-elle une maturation de l’expérience politique nationale?.
Certains y voient un mélange de révolte légaliste "pour l’honneur", un malaise accentué par une perte de privilèges et la sacralisation d’une cause minoritaire au prix de l’anarchie.La devise "Après nous, le déluge" semble bien gagner de fervents adeptes.
En tous cas quelques autres données locales rendent toute simplification hasardeuse comme la confusion sur le contenu du patriotisme et la faiblesse de l’ancrage idéologique chez plusieurs partis ou acteurs de la scène politique nationale.
 le flou patriotique
A l’occasion de chaque tremblement politique majeur un vent "patriotique" souffle dans les esprits tiraillés de part et d’autre: "pour la Mauritanie", "le pays avant tout", "la Mauritanie d’abord", "les intérêts suprêmes de la nation", ’"le devoir national ", "l’appel patriotique"...
Le problème sémantique qui émerge à ce niveau concerne les limites floues de cette notion de "patrie" due à plusieurs interférences dont l’absence d’une histoire officielle de la nation mauritanienne, la pertinence des considérations segmentaires (claniques, tribales, régionales, ethniques), l’effet de balai effectué par chaque régime contre son prédécesseur (surtout concernant l’héritage fondateur du régime de Moktar O.Daddah), la dépossession de la mémoire collective par peur de réveiller les démons de la nation, l’embargo sur les enseignements de la lutte anti-coloniale, les séquelles non traitées des déchirures nationales ( héritées de la guerre du Sahara et des évènements ethniques d’avril 1989), la relation mercantiliste avec l’Etat...
Il n’est pas surprenant des lors que plusieurs mouvements politiques, depuis les indépendances, émergent avec des boussoles tournées de ou vers l’extérieur (Maroc, Chine, Egypte, Sénégal, Iraq, Iran...) en plus des regroupements sur la base de l’intérêt tactique du moment (dit social, démocratique, de justice...) ou autour d’une personnalité charismatique.
Ce facteur fragilise la constellation politique et rend les valses locales d’une subtilité particulière.La moindre raison subjective peut justifier une permutation individuelle ou collective, un changement d’étiquette, une nouvelle identité tactique.
Aussi le retournement brusque du Parti ADIL-PNDD sur ceux qu’il était sensé promouvoir l’action n’était elle qu’une inattendue métamorphose comparable à l’occupation de l’ancien siège du PRDS (le Parti de Maawiya) par l’Agence Nationale d’Insertion des Réfugiés (ANAIR).
L’absence d’un référentiel théorique directeur mine ici l’esprit de l’entente et la pertinence de la continuité.
 Le néant idéologique
A l’exception de quelques formations dont le référentiel théorique est discernable (l’UFP héritier du MND gauchiste, SAWAB pan-arabiste, TAWASSOUL dit islamiste, l’APP englobant les nasseristes et une part de la mouvance El-Hor, les FLAM à connotation identitaire...), il n’est pas facile de retracer une ligne idéologique précise et constante pour des dizaines de Partis dont certains ne sont identifiables que par la personne de leur président ou d’un groupe de personnalités fondateur.
L’idéologie se confond à la personne du chef de Parti, aux alliances du moment, aux impératifs du complexe réseau de relations gérées comme un capital politique avec des programmes rapprochés axés sur le social, le développement, la démocratie, la justice, la lutte contre la pauvreté...
Il n’est pas des lors surprenant d’assister à un interminable nomadisme politique (changement de Parti par un individu ou un groupe de notabilités ou de cadres) doublé d’une fréquente instabilité des alliances lors des élections ou en temps de pause.
Cette confusion de principes de base, due à l’absence d’un socle de valeurs cohérentes partagées, explique la rapidité de la formation et de la déformation d’un parti grégaire comme ADIL-PNDD, l’échec de son agenda en un temps record et le tâtonnement de plusieurs groupements politiques après chaque secousse au sommet de l’Etat.
Ce que le Pr.Lo Gourmo appelle "un halo idéologique" facilite les tendances contradictoires et paradoxales de la possibilité de fusion d’un grand nombre de Partis en une Méga-formation (comme dans des pays à longue tradition démocratique) et le morcellement de la scène politique en une infinité de petites constellations à orbites changeantes.
Aussi existeraient il des "idéaux-logis" propres à nous comme celles de l’intérêt matériel (La Maslaha), du plus fort, de la solidarité tribalo-ethnique, de la revanche, de la promotion personnelle ou même du vent et de la pluie.
 Conclusion
Dans l’état actuel des choses deux principales logiques s’affrontent: celle du nouveau pouvoir (HCE et ses soutiens parlementaires et partis politiques) prônant une normalisation politique suite à de nouvelles élections et la logique de la coalition FNDD (Front National de Défense de la Démocratie) opposée au dernier changement et réclamant le retour à la légalité constitutionnelle dérivée des élections du 19 avril 2007; une "logique de principe" contre un "état de fait’, un "idéalisme démocratique" contre un "réalisme patriotique", une "légitimité électorale" contre un "élan de sauveurs" suivant la terminologie des uns et des autres.
L’interrogation sur le futur du siège présidentiel constitue le noeud gordien du problème; son futur prétendant consensuel constitue l’énigme du moment.
Entre ceux qui luttent pour le retour de SIDIOCA, quel-qu’en soit le prix, et ceux qui supportent le Général O.Abdelaziz; le vaisseau mauritanien cherche un rivage salutaire, une libération des entraves du prestige individuel et un horizon pour la collectivité nationale. 
 Informé d’avance sur sa prochaine destitution par les forces armées en 1978, le père fondateur de la nation mauritanienne écrira dans ses mémoires :"...après mures réflexions, je décide en mon âme et conscience de « laisser faire».Je préfère me sacrifier moi-même et subir les conséquences prévisibles de la perte du pouvoir, plutôt que de provoquer des heurts meurtriers et des divisions irréparables entre mes compatriotes et , en même temps, d’affaiblir nos combattants qui affrontent l’ennemi dans des conditions déjà difficiles. (...)Je pouvais comprendre, le fait d’être devenu un obstacle aux yeux de certains, dont les militaires." (Mr Moktar.O.Daddah,La Mauritanie contre vents et marées, p.19).Autres temps, autres raisons!
 Le renoncement inconfortable à cette charge suprême pour des raisons d’intérêt supérieur du pays reste au coeur du houleux débat national voir du destin collectif.
Encore faudrait-il des voies de sortie honorables, pour les uns et les autres, loin du lynchage médiatique unilatéral, de l’humiliation sociale ou du règlement des comptes entre des protagonistes qui rendent la patrie otage de certaines histoires.
Et plus que jamais, l’urgence d’une solution "Constitutionnelle" s’impose comme l’espère le diplomate international mauritanien Ahmedou O.Abdallah conseillant d’ éviter "le danger de mettre les intérêts personnels avant ceux du pays" ou de "confronter la communauté internationale"  dans son appel à la raison patriotique ( c’est l’avenir du pays qu’il faut préserver, Nouakchott-Info,site de l’ANI).
Les choses semblent aller autrement  à moins d’une troisième voie salvatrice.
La patrie mérite une autre chance.
Sidi-Mohamed Ould Abdelwahab   
  Indiana, USA
    


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