Analyse du document publié par Aljazeera relatif à une lettre attribuée à Aqmi   
19/11/2016
Tout a commencé le 2 mars 2016 quand les Américains font part de la découverte au Pakistan dans la cache de Ben Laden qu’ils ont tué en mai 2011 d’un document par lequel Al-Qaida au Maghreb Islamique (Aqmi) lui soumettait un projet de trêve avec la Mauritanie.



Ne pouvant expliquer quand et comment le dit document avait atterri au Pakistan, ni donner d’indications sur l’identité de son véritable expéditeur ou sur la suite qui lui a été réservée par Ben Laden de son vivant, les experts américains du Renseignement interrogés à l’époque (par Reuters), concluent qu’il n’y a pas de preuves qu’il y eut trêve ou même qu’elle fut discutée entre la Mauritanie et Aqmi.
Mais qu’à cela ne tienne, des milieux hostiles au Gouvernement mauritanien par opposition à ses politiques ou par jalousie de ses succès en matière de lutte contre le terrorisme, sautent sur l’occasion. Des pays et des medias internationaux, régionaux, et même nationaux se saisissent également de la trouvaille américaine.
«L’information» publiée le 17 novembre 2016 par Al Jazeera.net s’inscrit dans le même cadre. Elle est venue réchauffer un plat devenu froid. «L’information» est relative à une lettre non datée, adressée par Aqmi à deux de ses responsables opérant dans le Nord-Mali : Abou El Houmam et Bilal Al Jazairy. Ce dernier a été tué par l’armée mauritanienne en juillet 2010. La lettre se veut une réponse à une consultation exprimée sur une «neutralité réciproque» par laquelle Aqmi s’abstiendrait d’attaquer la Mauritanie, laquelle à son tour, libérerait les détenus pour terrorisme, croupissant dans ses prisons, pour certains, depuis 2007.
Aqmi y demandait des précisions sur la signification de la neutralité en question, indiquant que son conseil consultatif de l’époque) avait déjà décidé de ne plus s’attaquer aux Armées de la région que pour se défendre, préférant cibler les étrangers ou commettre des attentats dans les forteresses des «apostats». Ce qui veut dire que les Armées des pays de la région continueront néanmoins à être des cibles.
D’autres impressions se dégagent également de la lecture de la lettre d’Al Jazeera.net :
1- Il s’agit d’une lettre dont l’authenticité prête à équivoques à la fois dans la forme et dans le fond. En outre, sa conception n’exige que quelques cliks. N’importe qui, peut donc, en être l’auteur ….
2- En terme de contextualisation, elle est supposée avoir été rédigée en 2010 avant la mort en juillet, de l’un de ses destinataires : Bilal Al Jazairy
3- Il n’y a pas eu de libération des terroristes détenus en Mauritanie surtout ceux, souvent réclamés par Aqmi aux négociateurs, car ayant été dans ses camps ou ayant du sang sur les mains, exception faite, de l’échange de deux détenus avec des otages espagnols ou avec le gendarme enlevé en décembre 2011 à Adel Begrou .
4- Il n’ya pas eu non plus de trêve sur le terrain . Jugez-en vous-même !
- Janvier 2010 : L’armée mauritanienne démantèle un groupe de trafiquants de drogue lié à Aqmi à Lemzarrab en territoire malien dont les membres seront plus tard livrés à leur pays d’origine.
-Février 2010 : Des militaires mauritaniens enlèvent en territoire malien « Omar sahraoui » le ravisseur des otages espagnols en novembre 2009 et le présentent au parquet à Nouakchott.
-Juillet 2010 : Les militaires mauritaniens avec un soutien logistique français
détruisent un camp d’Aqmi au nord-ouest de Hassi Sidi (Mali). 7 terroristes sont tués dont Bilal Al Jazairy, cité dans la lettre publiée par Al jazeera.net.
-Août 2010 : L’armée déjoue un attentat au véhicule piégé à l’entrée de la garnison de Nema. Le kamikaze est abattu au bord de son véhicule.
- Septembre 2010 : Les forces mauritaniennes avec l’appui de leur aviation s’enfoncent en territoire malien pour détruire les bases d’Aqmi dans la région de Hassi Sidi. Yahya Abou El Houmam cité dans la lettre d’ Al Jazeera. net est blessé dans les affrontements.
- Décembre 2010 : Les forces spéciales mauritaniennes neutralisent des trafiquants au nord de Lemgheity. Une cargaison de drogue, des armes sont saisies et des trafiquants faits prisonniers.
-Février 2011: Un projet de double attentat aux véhicules piégés envoyés depuis le massif du Tigharghar au Nord-Mali est déjoué aux abords de Nouakchott. Un des véhicules est détruit, l’autre est neutralisé et plusieurs terroristes tués ou arrêtés.
-Juin 2011 : Les forces spéciales mauritaniennes mènent dans la forêt de Waghadou des opérations à l’intérieur du territoire malien, en concertation avec le Mali,
-Juillet 2011 : Aqmi lance une attaque sur Bassiknou (1400 km à l’est de Nouakchott) . La colonne d’Aqmi est mise en déroute et ses combattants fuient emportant leurs morts et blessés, laissant derrière eux la dépouille de l’Algérien « Eness Abou Fatima ».
-Décembre 2011 : Aqmi kidnappe le gendarme mauritanien Ely Ould El Moctar à Adel Begrou.
C’est à partir de 2012 qu’Aqmi s’est détournée de la Mauritanie pour deux raisons principalement :
1- L’armée mauritanienne a réussi à boucler ses frontières et à faire subir à Aqmi de lourdes pertes deux années durant, notamment avec l’action combinée de ses groupes spéciaux d’intervention et de son aviation.
2- Aqmi de son coté s’est engagée dans une aventure politico-militaire visant à instaurer un Etat islamique au Nord-Mali laquelle a échoué grâce à l’énergique action de la France qui est parvenue à chasser les groupes armés lesquels dans leur fuite se sont retirés vers les parties Sud des territoires algérien, tunisien et libyen.
Début 2012 c’est un tout nouveau contexte avec le chaos au Nord-Mali . Des centaines de milliers de refugiés affluent en Algérie, au Burkina, au Niger et en Mauritanie.
Les groupes armés ont de nouvelles priorités et se désintéressent de la Mauritanie qu’ils ont ciblé depuis 2005 et qui les a férocement combattu depuis 2009 sans soutien des pays du voisinage, lesquels malgré tout l’ ont sollicité à s’engager dans l’ opération française Serval lancée en janvier 2013 et toujours en cours sous deux bannières : internationale et française.
IOMS


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