L’occupation sauvage des terrains communément appelée « Gazra »consistant à squatter des espaces publics et à y édifier des habitats continue à se porter comme un charme à Nouakchott. Le procédé étant infaillible, les retombées plus que substantielles, des hommes et des femmes continuent à dormir dans des baraques en tôles au milieu de détritus. A côté de ce semblant de vie, mille et un dangers les guettent.
Depuis que certains ont découvert tout le bénéfice que l’on pouvait tirer d’une terre en s’y installant sans la moindre autorisation rien qu’en faisant prévaloir la carte du premier venu, la périphérie de Nouakchott s’est continuellement vue se couvrir d’habitats des plus rudimentaires. Quelques matériaux suffisent à ériger une cabane : des planches de récupération, des feuilles de zinc sauvées des maisons démolies, du carton, des bouts de toile, des clous et le reste est l’affaire de charpentiers de fortune qui se feront un devoir de monter un habitat. Il ne reste plus qu’à attendre que les pouvoirs publics décident du lotissement des espaces et en ce moment là , l’on récolte les dividendes de l’attente. En effet, le lot occupé est attribué officiellement avec un permis d’occuper en bonne et due forme. Ce qui se passait c’était que les nouveaux propriétaires terriens s’empressaient de brader les terrains acquis à de vils prix et partaient aussitôt s’installer sur d’autres espaces et rebelote ! Les quartiers de Carrefour, Ten Soueilim, Dar Naïm et l’immense Gazra de Arafat sont passés par ce stade. S’il est vrai que des poches de résistance persistent toujours dans ces localités, c’est au niveau de la mougahataa d’El Mina que le squat continue à sévir encore de façon démesurée. En effet, la « Kebba Mendez » a été progressivement lotie aux profits de quartiers nouveaux que sont Basra et Neteg dans une moindre mesure. Mieux, il y’a trois ans, la zone qui part de la base marine jusqu’à la lisière d’El Mina, couvrant la zone de l’abattoir appelée «Marbatt » a été totalement assainie, les autorités y ont construit des maisons qui ont été mises à la disposition des squatteurs contre des rétributions modiques. De plus, elles ont édifié des toilettes publiques très bien élaborées et de grande capacité pour familiariser les populations locales à l’utilisation systématique des sanitaires afin de juguler les maladies d’origines fécales. Cette action a eu pour mérite de voir un quartier au plan bien dessiné et aux rues larges et bitumées. Le soir, l’on se croirait dans un lieu résidentiel tant l’éclairage publique est au point. Une plaie au milieu du front
Aussi, c’est avec plaisir que l’on circulerait sans se lasser dans cette partie de Nouakchott si au détour du Marbatt, l’on ne tombait pas sur un décor chaotique fait de baraquements et grillages de fortune. Oui, la gazra est encore là . Celle là a la peau dure et s’étend à perte de vue. C’est la kebba de «l’ ekhriga ». Lorsqu’on embrasse du regard l’horizon, l’on ne voit que cette nature ocre. A l’intérieur, des familles y vivent comme dans n’importe quelle structure sociale. Situé en bordure de la route du port, la baraque de Yezid Ould Djouti ne diffère en rien de celle de ses voisins. C’est une pièce unique qu’il a aménagé pour abriter sa famille de six personnes. Elle est protégée des voitures et des animaux errants par une clôture conçue à l’aide des grillages de protection des containers. Docker de son état au Port Autonome de Nouakchott, l’homme ne semble pas mécontent de sa situation : « j’habite ici depuis neuf ans. Je vis avec ma femme et mes quatre enfants. Chaque jour, je monte au port en priant Dieu de m’accorder de quoi faire mon dîner. Mes enfants vont pêcher au wharf. Il m’arrive d’y aller personnellement s’il n’y a pas bateaux au port. Avec mes gains et leurs prises, nous nous en sortons. De plus, la baraque m’appartient et je ne paye pas de loyer. En tout cas, on n’a pas faim. » Ils sont des centaines de familles à avoir adopté cette solution de facilité en vivant dans un inextricable labyrinthe de fer et de cartons. Et comme pour mieux jouir de cette félicité, ils se servent mais, frauduleusement des avantages qu’offrent toutes les grandes villes. Parmi celles-ci, l’électricité. En effet, ce qui frappe à première vue l’œil du visiteur de passage dans cet endroit, c’est l’anachronisme des lieux. En fait, la quasi-totalité des toits sont hérissés d’antennes paraboliques. Ce qui se passe c’est que toutes ces familles se sont «branchées» au courant électrique de la SOMELEC par des câbles qui sillonnent toutes les ruelles. Ils ne sont pas enfouis et traînent partout. De plus, les branchements se font et défont par les mains inexpertes des riverains. La seule facture qui est payée est une somme de 1.000 UM que les «abonnés» versent à des tiers qui disposent de compteurs. La question qui reste posée: la SOMELEC n’est-elle pas au courant de ces pratiques ? Elle n’est pas sans savoir les risques qu’encourent ces personnes et l’ensemble des nouakchottois quant à l’éventualité d’un grand court-circuit qui embraserait tout. Sans compter avec les ravages que pourraient occasionner les eaux de pluie quand on sait que l’eau qui est un conducteur d’électricité et qu’il pleut ces dernières années à Nouakchott. Un autre danger menace la santé de ces populations : c’est la proximité d’avec les décharges d’ordures. Pendant que les rues de la capitale sont depuis quelques temps nettoyées et astiquées, les abords de Kebba l’ekhriga sont submergés par des tas d’ordures. Le problème est qu’on les brûle systématiquement en répandant des fumées toxiques que ses personnes respirent. Par ailleurs, les bonnes habitudes sanitaires ne semblent pas avoir été comprises par ces concitoyens qui continuent à se soulager au grand air. C’est pourquoi, il faut agir. Biri N’Diaye
|