Moi, un âne à Nouakchott   
17/01/2008

A Nouakchott, plusieurs animaux domestiques partagent notre vie de citadins. De par la place qu’ils occupent dans notre société, ils ne sont bien évidemment pas tous logés à la même enseigne.  En tout cas, une chose est certaine : ils ont tous leur utilité et ne serait-ce que pour cela, ils méritent qu’on les traitent avec un brin d’humanité. Aussi, sur la liste des animaux qui auraient bien aimés émigrer vers des horizons plus cléments, un vient en pole position.



Il répond au signalement suivant : quadripède court sur pattes à robe grise ou baie, sa tête légèrement volumineuse rappelle celle d’un cousin à la noblesse plus affirmée à la différence des oreilles que notre bête a en plus grand. Il est plutôt de nature placide même si les mauvaises langues dénigrent son entêtement. Signe particulier : il  lui arrive de s’exprimer bruyamment, quand on s’y attend le moins et de préférence, la nuit, quand la terre est froide. Il est, et c’est l’image la  plus courante, la bête que l’on voit et, c’est affligeant, croulant sous les poids astronomiques qu’on lui met sur l’échine. Si vous ne voyez toujours pas, allez ! J’ai nommé l’âne. Oui,  cette bête que l’on rencontre à chaque coin de rue dans notre capitale. Mais, le baudet est en maltraitance sous nos cieux. Ça crève les yeux. Devant cette situation si révoltante, l’on est en colère sans réserve à l’endroit des personnes qui exploitent ces pauvres bêtes. En effet, il est difficile de soutenir le spectacle des ânes ahanant, soufflant, avançant en tirant des dizaines de paquets de fer que la caisse d’un camion pourrait contenir. L’on demeure tout autant ému lorsque l’on assiste au spectacle de l’oreillard, debout au milieu de la rue, perdu devant les files de voitures, les narines dilatées sous l’effort d’innombrables colis de marchandises qu’un commerçant radin n’a pas eu le cÅ“ur d’embarquer dans un véhicule. Et comme si cela ne suffisait pas, il doit aussi assurer le transport de son maître. Ce dernier, sans le moindre scrupule, prend place sur la charrette que tire l’animal et ne se prive pas de le rouer de coups pour le faire avancer. Et les jurons ! C’est connu : un charretier, ça jure, mais, avez-vous  vu comment jurent ceux de Nouakchott ? Ce sont sans conteste les meilleurs dans l’art de proférer des perles d’insanités. Ils maudissent les pauvres bêtes avec un tel acharnement qu’il arrive parfois que l’on se retourne croyant être leur cible. S’ils ne s’en tenaient qu’à cela ? En définitive, le sort des ânes à Nouakchott mérite qu’on en parle. C’est sûr qu’un âne n’est rien moins qu’un animal et qu’il est un bien, mais c’est avant tout d’abord un être vivant, par conséquent, il doit être traité avec humanité. L’on peut faire travailler un animal en lui assignant un rythme convenable, en lui donnant une alimentation proportionnelle aux tâches qu’il exécute, en lui allouant un temps de repos nécessaire à la récupération. Ce qui est loin du cas de nos baudets nationaux qui ne sont épargnés que la nuit et même cela, c’est avec les pattes entravées mâchouillant du papier cellophane. Il sera loin le jour où nos ânes seront déchargés de leurs bâts mais pour l’heure faisons en sorte de limiter leur calvaire en réglementant les poids de charge. C’est tout sauf de l’utopie.
Biri N’diaye


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