La communauté Hamalliste de Kaédi   
27/08/2007

Dans le calendrier des événements annuels enregistrés dans la ville de Kaédi, il y en a un, propre Ã  la communauté soninké appelé : Â«Haqqe siginde», traduisez littéralement : célébration du mérite. En fait, il s’agit de la commémoration du rappel à Dieu du chef spirituel de la confrérie des yacoubistes, Yacouba Sylla, une branche de la grande confrérie religieuse qu’est le Hamallisme.



A Kaedi, il existe une communauté religieuse, frange de la confrérie initiale du grand Cheikh Ahmed Hamahoullah, guide spirituel d’une des sous-parties de la voie tidjanniya qui se caractérise par le wird à onze grains à la différence des autres adeptes de la voie tidjaniya dont le wird est à douze grains. C’est une communauté qui se singularise par une grande capacité d’organisation, un très grand sens de la discipline mais surtout par le fait que tous les membres de la confrérie portent le même type de vêtements. Les hommes portent de longs caftans sans manches de couleur généralement blanche ainsi que d’un bonnet assorti. Les femmes, elles ont pour habit, des robes longues assorties à des pagnes. C’est une mini société bien structurée autour de leur chef. Leurs activités tiennent surtout de l’économie et du travail collectif. Aussi pendant de nombreuses années, ils ont eu un quasi monopole sur le secteur du transport, essentiellement parlant de destinations en partance de Kaédi. Pendant longtemps, les autobus des Etablissements Paly Kaba ont desservi l’axe Sélibaby-Kaedi ou la route Kaedi-Toufoundé Civé. Les camions-remorques de la communauté ont également assuré durant de longues années le transport dans toutes les destinations depuis Kaédi.
Pour l’hisoire, il faut retenir que le hamallisme a été introduit à Kaédi par un homme au nom de Yacouba Sylla, venu du Mali dans les années 20, il a foulé le sol kaedien dans un premier temps dans un cadre purement professionnel car comme beaucoup de ses congénères, il était marchand ou dioula, selon l’expression courante. Il est revenu à Kaedi une seconde fois, cette fois, auréolé d’une mission qui lui a été confiée au nom du Cheikh Hamahoullah, celle de propager la nouvelle voie religieuse. La tâche n’a pas été facile, d’ailleurs, il a eu à dire à la communauté qu’il appelait à embrasser cette nouvelle tariqa de la voie Tidjaniya que les choses ne seront pas faciles. Il a expliqué qu’il avait une mission qui se résumait en trois principes : Â« Alla nbatiyé, Niamari batiye, kabehi toqqe Â» : Adoration de Dieu, Application des préceptes dictés par Dieu, Respect des interdits de l’Islam. Apres avoir dévoilé la quintessence de la mission qui est la sienne, il a en même temps mis en garde la communauté contre l’éventualité de problèmes majeurs susceptibles de surgir dans l’accomplissement de sa mission. Ainsi, il a prédit que les nouveaux adeptes de cette branche du Hamallisme devraient s’attendre à vivre trois expériences difficiles à savoir l’emprisonnement, l’éxil et la mort. Il a eu raison car un grand nombre de yacoubistes ont été embastillés par l’administration coloniale qui voyait en eux des éléments subversifs. A ce propos, elle a superbement joué la carte du «diviser pour mieux régner.» Ainsi, certains gardes-cercles de l’époque ont été pourvus de pouvoirs spéciaux qui leur donnaient le droit de traquer, molester et jeter en prison les éléments les plus en vue du mouvement lors des événement de 1933, communément appelés «Kayhayde katta» : le coup de Kaédi, aux premières heures de l’implantation du mouvement dans la communauté soninké de Kaédi. De la même façon et au même moment et pour les mêmes raisons, plusieurs yacoubistes ont été envoyés en exil parfois en territoire mauritanien comme ce fut le cas à Port Etienne ou à l’étranger particulièrement en Haute Volta. La troisième chose qu’avait prédite le futur guide religieux, s’est manifestée avec la sanglante bataille rangée des mêmes événements qui ont vu des dizaines de personnes mourir en une journée de 1933 à Kaédi. C’était une rixe qui avait mise aux prises partisans et détracteurs du hamallisme. La nouvelle voie religieuse selon la version de Yacouba Sylla a vu le jour à Kaedi dans ces conditions. Avant d’aller s’installer en Côte d’Ivoire, précisément à Ganioa.Yacouba Sylla a intrônisé comme chef de la confrérie au niveau de Kaedi , M’Paly Kaba Diakité. Une bâtisse en dur de style colonial répondant au nom de «Simon nka» : la maison en ciment a été érigée et tient lieu de lieu de rassemblement des Hamallistes. Ils s’y retrouvent toutes les fins d’après-midi pour des séances de «Hadra» pendant lesquelles, ils adorent Dieu.C’est donc depuis le décès du guide spirituel qu’est le Cheikh Yacouba Sylla le 15 août 1988 que ses adeptes ont décidé de lui consacrer un mémorial pendant lequel, tous les yacoubistes de Kaédi convergent vers la ville. En effet, l’événement est célébré partout dans le monde ou à travers la diaspora des yacoubistes et dure près d’une semaine à Ganioa, trois jours à Kaédi, un jour à Nouakchott et dans les grandes villes européennes et américaines. Le «Haqqe siginde» est également mis à contribution pour célébrer des mariages collectifs. Il s’agit de personnes qui se sont fiancées selon la sunna du prophète Mohamed PSL pendant l’année et dont on célèbre les mariages ensemble pour réduire des dépenses inutiles et permettre un meilleur départ dans la vie de couple. La vie et l’oeuvre de Yacouba Sylla ont été et demeurent une source intarissable de nouveautés pour la communauté soninké en général.
Biri N’Diaye


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