Paysage gouvernemental recomposé : Quelles motivations, quelles attentes ?   
06/08/2007

La restructuration du gouvernement qui a donné lieu à la nouvelle architecture des ministères a été conçue et mise en route par le Premier ministre en concertation avec le Président, on ignore la part de responsabilité de l’un comme de l’autre. Le nouveau découpage des secteurs de la vie publique a dans tous les cas été élaboré en toute hâte, unilatéralement et n’a pas fait l’objet de concertations préalables ni d’études approfondies et sérieuses.



L’architecte ne s’était pas non plus soucié de l’impact financier d’une telle entreprise sur les ressources publiques, privilégiant un découpage qui a tendance à gommer tout le passé et qui représentait donc le cas le plus coûteux aussi bien en inventaire qu’en redéploiement.

Etaient aussi exclus de l’élaboration du nouvel organigramme tous les ministres qui ont eu en charge les portefeuilles au sein du nouveau gouvernement (ils ne seront consultés en vue de leurs nominations qu’après la mise en place de la nouvelle restructuration, et c’est à ce moment qu’ils en prirent connaissance comme tout le monde).
Si la grande majorité des observateurs s’attendaient à ce que le nouveau gouvernement prenne du temps avant de trouver sa vitesse de croisière et tourner à plein régime, ils ne se faisaient pas d’illusions sur la capacité de cette équipe à répondre rapidement aux attentes des populations, étant donné qu’il leur fallait du temps pour s’accommoder avec leurs environnements (fonctions, dossiers et personnels).
Le nouveau projet de Loi de finances rectificative en cours d’adoption par le parlement, permettra à l’équipe de Zeine Ould Zeidane d’augmenter les recettes de 10 milliards et 337 millions UM supplémentaires, et d’engager des dépenser à hauteur de 11 milliards 912
millions UM, par rapport à la loi de finances initiale qui était équilibrée à 198 milliards et 890 millions UM.
Cette augmentation qui servira à couvrir des dépenses additionnelles, sera en grande partie absorbée par l’effort de restructuration de l’appareil administrative.
Il est clair que la rentabilité n’est pas prise ici en considération, et qu’en tout cas elle ne prime pas –à ce qui paraît – dans l’esprit des concepteurs, sur le court terme.
L’idéal aurait été de procéder autrement en évoluant progressivement vers une partition idéale où, une plus grande place est laissée aux intervenants et partenaires directement concernés.
Il n’est même très sûr que l’idée de rendement et d’optimisation se soit suffisamment installée dans l’esprit de l’administration mauritanienne. Autre point négatif de la nouvelle
restructuration, elle a continué à consacrer le centralisme étatique (longtemps décrié par rapport à sa lourdeur, sa lenteur et ses coûts) au moment où le monde entier tourne le dos à ce mode de gouvernance et de gestion et s’achemine vers la responsabilisation collective des acteurs, et au moment aussi où tous les candidats à la magistrature suprême sans exception
ont, promis dans leurs programmes électoraux de promouvoir la décentralisation et de privilégier la déconcentration qui deviennent le mode de gestion et de prise de décision au plan international par excellence.
Les ministères issus de la nouvelle restructuration représentent des portefeuilles entre lesquels les tâches et par conséquent les moyens mis en jeu sont répartis de manière inéquitable. Aux supers ministères comme celui de l’éducation nationale (MEN) par exemple ou celui de l’économie et des finances, la lourdeur et le très haut niveau de concentration à la fois font qu’il est inconcevable que l’efficacité et la rentabilité soient de mise, tout comme il n’y aura pas d’économie d’échelle.
Des sources au niveau du Ministère de l’Economie et des Finances, estiment que Mohamed Abderrahmane Ould Hamma Vezzaz (photo en médaillon) en charge du département qui a une bonne cinquantaine de directeurs centraux sous sa tutelle, ayant parvenu au constat de l’impossibilité matérielle de voir tous son staff dans le cadre du travail, aurait songé dans un souci de commodité à créer un organigramme avec quatre ou six grands directeurs qui chapeautent tout le ministère, avec lesquels il aura à traiter directement et en reléguant tous les autres au rang de sous- directeurs.
Tentative qui n’aboutira pas en raison des résistances et de l’hostilité des concernés.
Même décor au MEN et au ministère de l’hydraulique de l’Energie et des Technologies de l’Information et de la Communication où, la lourdeur et la complexité rendent impossible toute gestion centralisée. Ce niveau de concentration des tâches va décroissant au fur et à mesure qu’on se déplace dans les autres départements ministériels. Il n’est pas impossible qu’avec les nouveaux organigrammes qui viennent d’être adoptés, les récentes déclarations de politiques sectorielles et les lettres de mission très tardivement adressées par le Premier ministre aux membres de son équipe (que faisait-il notre PM ?), on assiste à une mise à l’épreuve pour le nouveau gouvernement au cours des cinq prochains mois qui restent de l’année.
Il résulte de ce schéma, que l’action du nouveau gouvernement risque d’être déficiente si elle ne s’accompagne pas d’un effort de rapprochement et de coordination avec les autres acteurs hors gouvernement qui ont de plus en plus de rôles à jouer.
D’autre part, l’équipe gouvernementale actuelle qui a été choisie sur la base de critères à la fois technocratiques et partisans, aura à travailler sur deux registres, celui du gouvernement et celui de la famille politique.
Deux fidélités qui seront en jeu ; La fidélité à la politique et la fidélité à l’Etat vont s’affronter en l’âme et conscience de chaque ministre. La famille et la base d’un ministre ou d’un homme politique qui constitue sa source de légitimation, s’étaient toujours considérées en Mauritanie comme prioritaires dans le traitement par rapport aux autres citoyens, alors que théoriquement un responsable est là au service de tout le monde sans distinction. A l’emprise de la concentration et du centralisme, s’ajoute donc les tares du clientélisme politique qui, pour des mobiles bassement électoralistes, risquent de confiner certains ministres dans une
logique d’entrave qui peut coûter cher au trésor public et occasionner beaucoup d’erreurs de gestion.
TOB


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