Le second temps des Sanhadja : 1145- 1232 (3eme partie): L’Emirat des Lemtuna Bdoukel , un petit Etat almoravide   
07/05/2007

L’Etat Abdoukel fut, sans doute, l’une des plus importantes entités politiques qui avaient surgi de la division de la Mhalla (la grande armée) almoravide. On estime en général et de manière approximative que la date de la fondation de cet émirat lemtounien se situe dans la première moitié du VIIéme siècle de l’hégire (XIIIéme siècle de l’ère chrétienne).



Fondé par une famille lemtounienne quasiment inconnue des historiens, l’émirat des Abdoukel avait, à coup sur, un noyau issu de l’ensemble Lemtouna. A ce sujet l’érudit historien Moctar ben Hamidoun estime que les Idekoudi, qui sont des descendants des anciens Abdoukel, sont des Almoravides. Ce qui laisse penser que malgré l’existence de chefferies lemtouniennes au sein des Anbat, des Ido ich et des Ideychilli, la confédération tribale des Abdoukel serait, en fait, la principale héritière des Almoravides du Sahara.
Dans ce sens, il faut rappeler que l’Etat Almoravide continua d’exister jusqu’au début du VIIème siècle de l’hégire dans le Sahara après avoir été anéanti, au Nord, sous les coups mortels des Almohades. Il semble que le noyau dirigeant de cet Etat rescapé était constitué, en dépit des dissensions internes, par l’Emirat des Abdoukel. C’est, d’ailleurs, pour cette raison que Cheikh Sidi Mohamed Al Kounty, avait, dans son épître intitulée «Al Ghallawiya», qualifié cet Emirat d’ Â«Etat almoravide».
Sur l’origine de l’appellation Abdoukel on sait que ce terme berbère qui évoque l’idée d’un rassemblement, celle d’un chevauchement ou encore celle d’une alliance dérive du mot Tebdoukla qui signifie «l’accompagnement».
Le sens de ce terme indique, en tout cas, que les Abdoukel étaient, en fait, un rassemblement de plusieurs tribus aux diverses filiations qui se sont regroupées autour du noyau lemtounien de l’Emirat.
On sait, également, malgré le peu de renseignements qui existent en ce qui concerne la famille émirale des Abdoukel que l’un des grands princes issus du noyau lemtounien fut Achent Leden qui est l’ancêtre des oncles maternels de Cheikh Sidi Mohamed Al Kounty lequel expose la filiation de sa mère comme suit : Â«Ahwa ( Hawa ?) bint Mohamed Alouma ben Kinta ( d’où le surnom al kunty qui fut attribuer à Cheikh Sidi Mohamed) ben Zem ben Temlik ben Tenfit An Bebbe ben Achent Leden ( le chef suprême des Abdoukel) .
On ne sait pas grand-chose des tribus guerrières qui appartenaient à cette puissante confédération laquelle, on le verra prochainement, fut anéantie par les attaques successives des Arabes Hassanes, Oualad Nasser. 
Mais nous savons par Walid Ibnou Khalouna Attagaty que parmi les tribus maraboutiques (Zawaya) de l’Emirat de Abdoukel, il y’avait «les Taggat, les Idag ejmalla, les Tachidbit et les Idjekoudy». Ces derniers seraient selon le chroniqueur des descendants d’une ancienne tribu dénommée Idnan.
De même, Cheikh Sidi Mohamed Al Kounty rapporte dans son épître précitée que les Idawa Al Hadj de Wadane étaient parmi les maîtres spirituels des guerriers de Abdoukel. Il rapporte, dans ce sens, que « les guerriers des Abdoukel désireux de se repentir et d’abandonner le mode de vie belliqueux se réfugiaient chez les Idawa Al hadj».
L’Emirat des Abdoukel avait exercé une domination sur l’ensemble territorial de la Saguiya al hamra au Nord jusqu’au confins du Sud de l’ actuel Adrar et il était limité par un espace soumis à la tutelle des royaumes soudanais, notamment l’empire du Mali et celui du Songhaï.
L’Etat Sanhadja des Abdoukel avait, essentiellement, pour ressources les impôts qu’il levait sur les caravanes ainsi que sur les mines de sel, en particulier celle de la Kedia Idjil. De même, cet Etat soumettait les habitants des cités au payement de redevances.
Jusqu’ à la fin du VIIIéme siècle de l’hégire (XIVéme siècle de l’ère chrétienne), les Abdoukel on assuré un contrôle sur la route commerciale qui reliait le Wad Draa (Sud marocain) au territoire du Soudan. C’est à cette période que les tribus arabes des Maghil qui venaient de faire une apparition à proximité de l’espace territorial de l’Emirat Sanhadja se sont emparés de la route qui allait de Tafilalet au Sousse. Cette apparition porteuse d’insécurité pour les caravanes avait conduit les commerçants à abandonner la route Oualata-Sousse au profit de celle qui va du Touat algérien vers Toumbouctou.
La décadence du commerce caravanier au Nord venu s’ajouter à la pression des envahisseurs Hassanes avaient précipité le déclin de l’Emirat des Abdoukel déjà affaibli par des graves dissensions internes qui se sont soldées par le pillage systématique des cités.
C’était, précisément, l’époque , le grand Cheikh Sidi Mohamed Al Kounty, l’ancêtre de l’auteur de l’épître précitée s’est insurgé, à la suite d’une injustice qu’il a subie, contre l’autorité des Abdoukel , ses oncles maternels en dénonçant, véhément, le pillage des caravanes de la cité de Tinigui .
C’est, donc, vers la fin du VIIIème siècle de l’hégire ( XIVème siècle de l’ère chrétienne), avec l’arrivée, aux confins de l’antique territoire des Sanhadja des premiers Arabes hilaliens que ce puissant Emirat lemtounien s’effondra pour annoncer le début de ce qu’on peut appeler : Le temps des Hassanes. 

Hamahou Allah Ould Salem
Professeur à l’Université de Nouakchott, lauréat du prix Chinghuit 2006

 

NB: A suivre la nouvelle série intitulée, Â«Le Temps des Hassanes Â» dans nos futures éditions


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