Me Ebety au sujet de l’affaire Chafi   
17/01/2012

Intervention au cours de la confĂ©rence organisĂ©e par l’Initiative "Nous sommes tous Moustapha CHAFI" autour du thème : L’instrumentalisation de la justice par le pouvoir politique Ă  des fins de règlement des comptes politiques (illustration par l’affaire Moustapha Ould Limame Chafi)



Intervention de Me Brahim Ould Ebety sur le sous thème « les libertĂ©s individuelles Ă  travers les pratiques de la justice mauritanienne : poursuite, arrestation et dĂ©tention : illustration par le mandat d’arrĂŞt Ă©mis par un juge d’instruction Ă  la demande du procureur contre Moustapha chafi.


A examiner de près le sujet qu’il nous est demandé de traiter sur la base des textes et notamment la constitution, le statut de la magistrature et l’organisation judiciaire, il s’en dégage sur le plan théorique que la justice mauritanienne est de type indépendant dans un pays démocratique.

C’est ainsi que les articles 89,, 90, 91 de la constitution consacrent formellement cette indĂ©pendance des pouvoirs lĂ©gislatif et exĂ©cutif, que le PrĂ©sident de la RĂ©publique est garant de cette indĂ©pendance, que le juge n’obĂ©it qu’ Ă  la loi, qu’il est protĂ©gĂ© contre toute forme de pression de nature Ă  nuire Ă  son libre arbitre ; et que nul ne peut ĂŞtre dĂ©tenu arbitrairement et qu’enfin il est formellement prescrit que le pouvoir judiciaire, gardien de la libertĂ© individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prĂ©vues par la loi.
Quant au statut de la magistrature, il dispose expressément que les magistrats du siège ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions juridictionnelles qu’à l’autorité de la loi, qu’ils sont inamovibles et ne peuvent être affectés que sur leur demande ou à l’occasion d’une sanction disciplinaire pour nécessité majeure de service après avis conforme du Conseil Supérieur de la Magistrature.

Pour bien consacrer et protĂ©ger les droits de la dĂ©fense, principes sacrĂ©s dans tout système dĂ©mocratique et donc de justice indĂ©pendante, l’organisation judiciaire prescrit que nul ne peut ĂŞtre jugĂ© sans ĂŞtre mis en mesure de prĂ©senter les moyens de sa dĂ©fense ; que la dĂ©fense et le choix du dĂ©fenseur sont libres. Les avocats (qui exercent une profession libĂ©rale et indĂ©pendante) ont libre accès devant toutes les juridictions et nul ne peut ĂŞtre distrait de ses juges naturels.

Il s’agit donc d’un ensemble de principes sacrés qui sont formellement prescrits par l’arsenal juridique interne tout comme les instruments internationaux que notre pays a ratifiés et qui seront largement explicités et développés par le spécialiste de la question, mon ami et confrère LO GOURMO. Il en ressort alors qu’il s’agit d’un ensemble de garanties à même d’assurer un fonctionnement normal, dans un Etat de droit normal, de tout système judiciaire.

Mais qu’en est-il de la pratique et du vécu qui nous intéressent aujourd’hui dans ce débat à savoir les poursuites, l’arrestation et la détention qui sont les paramètres qui permettent de mesurer le niveau d’indépendance des juges et donc de la justice, c’est-à-dire comment elle se comporte lorsqu’il s’agit de déclencher une poursuite, d’arrêter et/ou de détenir. Est-ce que cette justice prend du recul pour statuer ou pour donner suite à toute demande présentée par le représentant de l’exécutif devant les juridictions – étant soumis à l’autorité du Ministre de la justice - qu’est le Ministère Public. Est-ce que cette justice prend un minimum de temps pour étudier, effectuer toutes les recherches, entendre des témoins, les mis en cause et leurs défenses pour réunir un ensemble d’éléments pour ne pas statuer sur la seule version présentée par le Ministère Public soumis à l’autorité du Ministre de la Justice et donc du pouvoir exécutif.

Contrairement Ă  toutes ces donnĂ©es, nous sommes habituĂ©s dans notre pays et dans la plupart des cas et singulièrement dans les poursuites d’ordre ou de connotation politique et/ou l’exĂ©cutif est impliquĂ© Ă  ce que les poursuites soient dĂ©clenchĂ©es, la personne arrĂŞtĂ©e, dĂ©tenue, pour commencer les recherches d’indices qui peuvent justifier la poursuite, l’arrestation et la dĂ©tention alors que c’est par lĂ  qu’il fallait commencer. Mais comme les poursuites, l’arrestation et la dĂ©tention sont toujours ordonnĂ©es Ă  la demande du Ministère Public, elles ne peuvent qu’être satisfaites sans prendre le moindre recul, la moindre prĂ©caution de lire au moins le dossier prĂ©sentĂ©, d’interroger des tĂ©moins, d’effectuer des investigations pour dĂ©cider en toute indĂ©pendance. En fait les paramètres auxquels les juges nous ont habituĂ©s ne sont autres qu’ l’obĂ©issance aveugle aux demandes du Ministère Public, mĂŞme si les donnĂ©es ne permettent point de lui donner satisfaction.

Pour illustrer mes propos et sans aller trop loin j’évoquerais quelques cas vĂ©cus qu’aucun ne peut contester pour tirer la leçon et dĂ©terminer le niveau de l’instrumentalisation de la justice par le pouvoir exĂ©cutif depuis 2009, instrumentalisation assimilable aux procĂ©dĂ©s antĂ©rieurs Ă  2005 :

Les dossiers que je vais exposer ne sont pas les seuls où il y a eu un système généralisé de violation grave de la loi caractérisé par une soumission aveugle à la volonté du Ministère Public. Ces dossiers que j’ai gérés personnellement constituent un modèle d’illustration de d’instrumentalisation de la justice.

Le dossier du docteur Yahya Ould Mohamedou Nagi : Il avait Ă©tĂ© condamnĂ© dans une affaire de chèque sans provision Ă  une peine d’emprisonnement avec sursis et devant ĂŞtre libĂ©rĂ© immĂ©diatement dès le prononcĂ© du jugement. Le Ministère public s’est opposĂ© Ă  sa libĂ©ration et l’a maintenu en dĂ©tention en dĂ©pit des sommations servies au rĂ©gisseur, au directeur des prisons et ampliations servies au Procureur de la RĂ©publique. C’est ainsi qu’il fut par la suite extrait de la prison sans mandat pour ĂŞtre condamnĂ© Ă  une peine d’emprisonnement ferme pour permettre au procureur de le maintenir en dĂ©tention. Ce dossier a fait l’objet d’une plainte contre le Procureur de la RĂ©publique, le rĂ©gisseur et le commissaire de police pour dĂ©tention arbitraire et cette plainte est en instance depuis 2009, sans suite.

 

 

le dossier du Premier Ministre Yahya Ould Mohamed Waghef et ses co-dĂ©tenus qui avaient bĂ©nĂ©ficiĂ© en mai 2009 d’une libertĂ© provisoire ordonnĂ©e par la chambre pĂ©nale de la cour suprĂŞme, prĂ©sidĂ©e par son prĂ©sident en titre que le procureur gĂ©nĂ©ral a refusĂ© de libĂ©rer en exĂ©cution des instructions de l’exĂ©cutif.

 

le dossier Hanevi Ould Dehah qui avait Ă©tĂ© condamnĂ© en 2009 Ă  une peine d’emprisonnement de 6 mois en tant que directeur d’un site Ă©lectronique, Ă  un moment oĂą il n’y avait aucune codification en Mauritanie relative Ă  la presse Ă©lectronique telle que l’a formellement reconnu le Ministre de la Communication lors des dĂ©bats devant les chambres du parlement sur la loi relative Ă  la presse Ă©lectronique et ce, en violation du principe, nulle infraction nulle peine sans texte. Monsieur Hanevi qui avait pourtant purgĂ© sa peine Ă  l’expiration de laquelle il doit ĂŞtre immĂ©diatement libĂ©rĂ©, le parquet gĂ©nĂ©ral l’avait maintenu en dĂ©tention, en exĂ©cution des instructions de sa tutelle jusqu’à ce que la juridiction de renvoi siège un mois plus tard pour le condamner Ă  une peine plus longue, pour ĂŞtre graciĂ© quelques semaines plus tard. Ce dossier fait l’objet d’une plainte contre le rĂ©gisseur, le procureur de la rĂ©publique, le procureur gĂ©nĂ©ral près la cour d’appel et la directrice des prisons pour dĂ©tention arbitraire depuis 2009 et est toujours pendante sans suite.

 

 

Le dossier de Mohamed Lemine Ould Dadde. Il s’agit lĂ  d’une dĂ©tention prĂ©ventive qui est arrivĂ©e Ă  son terme, la loi prescrit que le rĂ©gisseur doit conduire le dĂ©tenu par devant le procureur pour que celui-ci le prĂ©sente au juge d’instruction pour le libĂ©rer immĂ©diatement. En dĂ©pit des dispositions de la loi, des sommations, mises en demeures des autoritĂ©s responsables des prisons et des autoritĂ©s pĂ©nitentiaires et les informations portĂ©es devant les plus hautes autoritĂ©s du pays (PrĂ©sident de la RĂ©publique et Premier Ministre), les dĂ©bats Ă  l’assemblĂ©e nationale sur la question orale posĂ©e par le dĂ©putĂ© Yacoub Ould Moine, la dĂ©nonciation par les organisations des droits de l’homme tant nationales qu’internationales, de la sociĂ©tĂ© politique, des parlementaires mauritaniens et français, il est toujours en dĂ©tention arbitraire et ce depuis le 27 septembre 2011 ; bien sĂ»r en exĂ©cution des instructions de la tutelle du Ministère Public.

 

 

Nous pouvons Ă©galement citer d’autres cas oĂą la justice a Ă©tĂ© instrumentalisĂ©e par le pouvoir exĂ©cutif en la personne du Ministre de la Justice :

La demande de radiation et de rĂ©trogradation des magistrats prĂ©sentĂ©e par le Ministre de la Justice le 06 septembre, mise en mouvement le 07 septembre et exĂ©cutĂ©e le 11 septembre conformĂ©ment Ă  la demande du Ministre par la radiation du PrĂ©sident de la Chambre et la rĂ©trogradation des conseillers comme s’il s’agit d’une matière pĂ©rissable et d’un pĂ©ril en la demeure ; alors que dans le mĂŞme dossier oĂą il est reprochĂ© aux magistrats d’avoir acquittĂ© les prĂ©venus, le PrĂ©sident de la RĂ©publique avait par dĂ©cret n°028/2011 du 15 fĂ©vrier 2011 accordĂ© la grâce prĂ©sidentielle et des remises de peines aux prĂ©venus concernĂ©s dans ce dossier. Dans ce cadre il convient de rappeler aussi que le PrĂ©sident de la RĂ©publique lors du dernier Conseil SupĂ©rieur de la Magistrature tenu le 26/12/2011 a dĂ©clarĂ© qu’il n’avait pas demandĂ© la radiation du Magistrat, ce qui sous entend qu’il avait ordonnĂ© une sanction.

 

 

 

la déclaration du Ministre de la Justice sur Radio France Internationale le 10 novembre 2011 à08 h 30, par laquelle il déclare que le juge d’instruction attend le retour du dossier (il s’agit du dossier de Mohamed Lemine Ould Dadde en communication à la cour suprême) pour pouvoir le renvoyer devant la juridiction compétente. Et le juge d’instruction – peut-être pour ne pas être radié comme l’a été Mohamed Lemine Ould Moctar- a ordonné le renvoi par ordonnance notifiée au prévenu et à sa défense le 04 décembre 2011.

 

 

la mise Ă  disposition du Ministère de la Justice d’une soixantaine de magistrats en dĂ©cembre 2010, dont certains Ă©taient prĂ©sidents de chambre sans savoir pourquoi et sans qu’il y ait la moindre poursuite ; et ces mĂŞmes magistrats Ă  deux ou trois exceptions près viennent d’être rĂ©intĂ©grĂ©s au sein des juridictions sans savoir encore pourquoi ;

 

 

 

le 20 novembre 2011, un sĂ©minaire organisĂ© Ă  Nouadhibou en collaboration entre la Banque Mondiale et le Ministère de la Justice au profit des magistrats de la rĂ©gion a Ă©tĂ© interdit par le Wali, alors que parmi les sĂ©minaristes il y avait le procureur gĂ©nĂ©ral près la cour d’appel, le procureur de la RĂ©publique et les prĂ©sidents des diffĂ©rentes juridictions et les sĂ©minaristes dĂ©logĂ©s par le commandant de la brigade de Nouadhibou en exĂ©cution des instructions du Wali ; et les participants, magistrats qu’ils sont, ont acceptĂ© d’obĂ©ir et de se soumettre aux ordres de Monsieur le Wali. Dans de telles conditions, comment peut on parler de justice et de juge ? n’est-ce pas que les administrations considèrent ainsi les juges comme de petits commis Ă  leur service? et comme ils acceptent de se soumettre et que la libertĂ© s’arrache, ils resteront ainsi tant qu’ils n’ont pas dĂ©cidĂ© de s’affranchir de la main mise et de la tutelle du pouvoir exĂ©cutif.

 

 

plus grave, au courant du mois de dĂ©cembre 2011, le club des magistrats a dĂ©cidĂ© l’organisation d’un scrutin au niveau des cours d’appels de Nouakchott, de Nouadhibou et de Kiffa pour le renouvellement de son instance dirigeante. A cet effet des bureaux de vote ont Ă©tĂ© ouverts et des urnes installĂ©es pour le bon dĂ©roulement des opĂ©rations de vote aux fins de renouvellement de cette instance.

 

 

A la surprise des Ă©lecteurs magistrats, mais aussi de l’opinion et Ă  deux jours de la fin des opĂ©rations de vote qui Ă©taient programmĂ©es sur une pĂ©riode d’un mois, les Procureurs GĂ©nĂ©raux près les cours d’appel ont fait procĂ©der – en exĂ©cution des instructions de leur tutelle - Ă  l’enlèvement des urnes pour empĂŞcher les opĂ©rations de dĂ©pouillement et donc la dĂ©signation de l’instance dirigeante du club des magistrats. Comment pouvons nous alors parler de juges et de justice dans un pays oĂą le Ministre de la justice par l’intermĂ©diaire des procureurs empĂŞche les magistrats d’élire leur instance dirigeante.

lors de la dernière session du conseil supérieur de la magistrature, le juge d’instruction qui avait convoqué le Gouverneur de la Banque Centrale pour l’entendre dans le dossier appelé communément le ’’dossier SONIMEX’’ a été mis à la disposition du Ministère de la justice et laissé sans fonction et donc relevé de ses fonctions de juge d’instruction comme si le fait de convoquer le Gouverneur de la Banque Centrale Constitue une faute sanctionnée de telle sorte.

 

 

 

En novembre 2001, le citoyen mauritanien Mouhamedou Ould Sillahi avait Ă©tĂ© remis en catimini sans la moindre procĂ©dure aux amĂ©ricains pour le conduire en Jordanie et en Afghanistan pour le soumettre Ă  toutes les formes de torture pour le transporter par la suite Ă  Guatanamoo Bay oĂą il est sĂ©questrĂ© depuis aoĂ»t 2002. En ma qualitĂ© d’avocat de la famille et en raison de la gravitĂ© de la remise de Ould Sillahi aux autoritĂ©s amĂ©ricaines comme la livraison de toute marchandise, surtout que cette remise est proscrite par la constitution et tous les instruments internationaux ratifiĂ©s par la Mauritanie, j’ai saisi le 17/11/2011 le Procureur de la RĂ©publique par plainte contre x pour enlèvement et sĂ©questration de Ould Sillahi pour demander l’ouverture d’une information Ă  l’effet de dĂ©terminer les conditions de l’enlèvement pour que les auteurs soient identifiĂ©s et poursuivis. A ce jour, cette plainte n’a connu aucune suite en dĂ©pit de la consistance des documents joints soumis Ă  l’apprĂ©ciation du procureur, alors que lors du dĂ©bat de la question orale du dĂ©putĂ© Yacoub Ould Moine adressĂ©e au Ministre des affaires Ă©trangères et de la coopĂ©ration telle qu’exposĂ©e par le dĂ©putĂ© Abdarrahamne Ould Mini a recueilli le consensus de tous les dĂ©putĂ©s et mĂŞme du Ministre. Pourquoi alors le procureur ne veut pas donner suite Ă  la plainte sauf s’il attend encore de recevoir les instructions de la chancellerie.

 

 

VoilĂ  quelques Ă©lĂ©ments Ă  titre d’illustration pour dĂ©crire le niveau dans lequel se trouve aujourd’hui notre justice. Comment alors dans de telles conditions pouvons nous parler de juges ou de justice ? N’est-ce pas que le juge obĂ©it aux ordres de la chancellerie et ne peut que donner suite Ă  toute demande prĂ©sentĂ©e par le reprĂ©sentant de la chancellerie. C’est ainsi que pour rĂ©gler le compte Ă  l’opposant politique Moustapha Chavi, que la justice a Ă©tĂ© instrumentalisĂ©e par le pouvoir exĂ©cutif.

Comment ?
Après avoir refusĂ© le renouvellement de son passeport et ceux des membres de sa famille et le refus de visas pour son Ă©pouse et ses enfants le 23 dĂ©cembre 2011 pour se rendre Ă  Nouakchott Ă  l’effet de rester au chevet de son père fatiguĂ© par l’âge et la maladie, le procureur, en exĂ©cution des instructions de sa tutelle se fait dĂ©livrer un mandat d’arrĂŞt contre lui par le juge d’instruction chargĂ© du terrorisme. Sans vouloir Ă©voquer pour le moment le chef ou les chefs d’inculpation que nous ignorons, nous ne pouvons qu’être surpris par la dĂ©livrance d’un mandat par un juge, dans les conditions dĂ©crites ci-dessus que traverse la justice mauritanienne contre une personnalitĂ© connue :

en Mauritanie pour son opposition au rĂ©gime en place depuis l’organisation du coup d’Etat du 06 aoĂ»t 2008 contre le premier PrĂ©sident Ă©lu dĂ©mocratiquement en Mauritanie et dans le monde arabe et qui n’a cessĂ© de s’exprimer pour dĂ©noncer le coup d’Etat, les mĂ©thodes de gestion du pays et tous les procĂ©dĂ©s de règlement du conflit et notamment la politique prĂ´nĂ©e et suivie de lutte contre le terrorisme ;

dans la sous – région et notamment au Mali, au Niger, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire et au Sénégal mais aussi en France, en Espagne, au Canada et en Grande Bretagne, pour son action en dépit des risques et dangers auxquels il s’exposait ainsi que les sacrifices qu’il a consentis pour mener des négociations qui ont conduit à la libération de paisibles et innocents citoyens enlevés par des groupes terroristes. De telles actions connues de notoriété singulièrement en occident, dont les ressortissants en ont bénéficié resteront des exploits enregistrés aux palmers des réalisations de Ould Chafi.

 

En fait la dĂ©livrance de ce mandat n’est que l’expression du traitement que rĂ©servent les juges Ă  toute demande prĂ©sentĂ©e par le Ministère Public. N’est-ce pas – et mes confrères ne me dĂ©mentiront pas - que lorsque le procureur formule une demande tendant Ă  la dĂ©livrance d’un mandat quelconque, le juge, avant de prendre connaissance du dossier, d’entendre des tĂ©moins ou de rĂ©unir au moins des indices, accède immĂ©diatement Ă  la demande. Parfois mĂŞme nous avons vu des greffiers remplir le formulaire du mandat de dĂ©pĂ´t avant l’introduction du dossier dans le bureau du juge et en rĂ©ponse, ils soutiennent Ă  face Ă  tous ceux qui s’étonnent d’une telle pratique : n’est-ce pas qu’il s’agit d’un mandat demandĂ© par le procureur. VoilĂ  la pratique au quotidien. Permettez – moi de vous dire que je ne suis point surpris que le juge aie Ă©mis le fameux mandat d’arrĂŞt comme il avait dĂ©jĂ  dĂ©livrĂ© d’autres mandats dans les mĂŞmes conditions pour la seule raison qu’il s’agit de demande prĂ©sentĂ©e par un Procureur. Dans le cas d’espèce oĂą un opposant est victime de toutes les formes de persĂ©cutions, le fameux dĂ©lit de parentĂ© ou de faciès que nous avons connu en 2003 rĂ©apparaĂ®t par l’interdiction d’entrer sur le territoire mauritanien de son Ă©pouse et de ses enfants pour les empĂŞcher ainsi de rester au chevet du père fatiguĂ© par la maladie et l’age avant qu’il ne soit emportĂ© par la mort le vendredi 06 janvier 2012.

Un tel sentiment d’amertume, je dirais mĂŞme de dĂ©solation qu’inspire la situation de notre justice aujourd’hui permet de comparer sa soumission au pouvoir exĂ©cutif Ă  ce qu’elle Ă©tait en mars 1998 oĂą avec mes amis et collègues Cheikh Saad Bouh Camara, Boubacar Messoud et Fatimata M’baye avons Ă©tĂ© condamnĂ©s Ă  une peine de 13 mois d’emprisonnement ferme confirmĂ©e en appel le 24 mars 1998 et, de retour Ă  la prison le mĂŞme jour vers 15 heures, nous apprenons qu’un dĂ©cret de grâce est dans le circuit. Et vers 18 heures nous avons Ă©tĂ© libĂ©rĂ©s. Et aux journalistes qui m’avait accueilli pour demander mon opinion, j’ai rĂ©pondu tout simplement et Ă  chaud Ă  la porte de la prison : ’’j’ai honte pour la justice de mon pays ! Nous sommes condamnĂ©s Ă  15 heures et graciĂ©s aussitĂ´t !’’

Il s’en dĂ©gage alors qu’il va falloir poursuivre l’action en la diversifiant pour soustraire la justice mauritanienne de la mainmise effective du pouvoir exĂ©cutif et de son instrumentalisation pour que les conditions de la sĂ©curitĂ© des citoyens et de tout ressortissant Ă©tranger rĂ©sidant en Mauritanie soit assurĂ©e et que les conditions de l’investissement soient rĂ©unies pour attirer le capital Ă©tranger nĂ©cessaire Ă  toute entreprise de dĂ©veloppement pour la simple raison que de telles conditions ne peuvent ĂŞtre rĂ©unies que s’il y a une justice souveraine et rĂ©ellement indĂ©pendante.
Je vous remercie pour votre attention.
Nouakchott le 16 janvier 2012
Me Brahim Ould Ebety
Avocat Ă  la Cour,
SOCOGIM KSAR 141
BP 2570,
TĂ©l. 4525 16 07
Fax : 4525 02 23
Portable 3631 31 70
Nouakchott – Mauritanie
e-mail : hamdyfr@yahoo.fr


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