Culture :" Nguéntel" : célébration d’une nouvelle vie   
07/06/2006


Dans toutes les sociétés humaines, la naissance d’un enfant s’accompagne d’une fête, ou d’un baptême. Dans la tradition pulaar, l’octroi du prénom ("nguéntel") intervient 7 jours après la naissance du bébé…
Jeudi 1er juin 2006. Tout un village se réunit pour le baptême d’un nouveau-né de 7 jours qui se verra attribuer un prénom au tout début de l’événement. Le soleil badigeonne en or, toutes les concessions environnantes. Le prénom sera choisi devant l’imam de la mosquée du village.



Il s’appellera Mamadou, Ali, Demba ou Moussa en hommage à un parent, un ascendant du papa ou de la maman. Pendant la semaine où l’enfant n’a pas encore été prénommé, il est enfermé dans une chambre avec la maman, pour éviter le mauvais œil. Dans la cuisine, des femmes préparent les bols de "Nyiri é kossam", bouillie de mil au lait caillé sucré, premier plat matinal annonciateur d’une journée riche en calories, protéines et autres vitamines.
À côté, un taureau ou un mouton sera immolé, en hommage à cette nouvelle vie. La viande sera en partie consommée durant la fête de la journée, une autre partie distribuée aux nécessiteux du village.
Le Nguéntel est aussi l’occasion de réunir toutes les castes d’un village, dans la pure tradition pulaar: des toroobé (nobles) aux matchubé(forgerons), en passant par les subalbé (pêcheurs). On y retrouve le rôle séculaire de chacun des groupes sociaux. Les toroobé représentent les plénipotentiaires de la terre et distribuent donc les richesses. Les matchubé qui leur sont affiliés, dépendent symboliquement d’eux, et les subalbé assurent un des aspects de la pérennité de la sécurité alimentaire. Les liens qui les unissent se manifestent symboliquement durant le Nguéntel.
En cours de journée, les louanges commenceront à être chantés et dansés par quelques forgerons et des griots. Le toroodo magnifié aura pour devoir symbolique de distribuer richesses au groupe laudateur qui aura rappelé sa généalogie, et l’origine du prénom attribué au nouveau-né.
En réalité, la mère attribue souvent un deuxième prénom à l’enfant, après la désignation officielle du père. Le prénom maternel sera logiquement tiré de la généalogie de la mère. Cette dernière s’adressera le plus clair du temps à son enfant par ce prénom, et ignorera catégoriquement le prénom officiel. Il n’est pas rare en effet, de voir une mère, ou une grand-mère maternelle, faire la publicité régulière, arguments généalogiques à l’appui, de l’intérêt pour l’enfant d’appuyer plus le prénom accordé par la famille de la mère, que celui de la famille du père !
Cette première célébration pour le nouvel individu, marque son entrée officielle dans le monde des hommes. A chaque étape de sa vie, une nouvelle rupture sera symbolisée par des réunions, des célébrations de ce genre parfois douloureuses, comme la circoncision. Mais comme le dit un adage "bambara", ces initiations nous rappellent "que les personnes de la personne sont multiples dans la personne".
Par Mamoudou Lamine Kane

 


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