Le problème lié aux écoulements des produits maraîchers des grands domaines de Mauritanie (GDM) n’est pas encore résolu. Cette semaine encore, les petits producteurs continuent de crier leur colère face à l’abus que les GDM font de l’octroi de «points francs» par l’état mauritanien.
La culture maraĂ®chère couvre pendant 4 mois les besoins alimentaires de notre pays. Il y a une dizaine d’annĂ©es que cette diversification de la culture est intervenue dans l’agriculture mauritanienne. À l’époque, les organismes publics et privĂ©s agricoles se sont rendus compte que «la seule culture du riz n’était plus suffisante pour garantir la sĂ©curitĂ© alimentaire». Ainsi, l’agriculture diversifiĂ©e est apparue comme une roue de secours logique. Alors, on a amĂ©nagĂ© Ă cet effet 40 000 hectares, et investi plus de 14 milliards d’ouguiyas en dix ans pour ce projet Ă travers l’Organisation de la Mise en Valeur du fleuve SĂ©nĂ©gal (OMVS). Parallèlement Ă cette mise en place d’une culture de produits de contre-saison engagĂ©e par les autoritĂ©s pour les agriculteurs mauritaniens, la compagnie fruitière de Marseille s’est installĂ©e en Mauritanie en 2001. À travers les GDM, elle investira la zone de Thiambène près de Rosso, oĂą 190 hectares lui seront octroyĂ©s pour la culture de fruits et de lĂ©gumes. Face Ă ce gĂ©ant de l’agriculture (La compagnie marseillaise produit annuellement 700 000t de fruits et lĂ©gumes dans le monde), les petits producteurs mauritaniens auraient pu craindre pour la pĂ©rennitĂ© de leur activitĂ©. Mais l’état a mis en place un garde fou essentiel: les GDM ne doivent pas Ă©couler leur production agricole sur le marchĂ© local mauritanien. En contrepartie, les GDM bĂ©nĂ©ficient de «points francs » qui les exonèrent de toute taxe douanière sur les importations de matĂ©riel agricole, et de certains impĂ´ts sur les entreprises, notamment celui qui touche au chiffre d’affaires. Pendant cinq ans, les GDM respecteront cette clause du contrat qui tient lieu de barrière de protection contre une concurrence inĂ©gale face aux petits producteurs. Jusqu’il y a 4 mois, cette clause avait Ă©tĂ© toujours respectĂ©e selon les petits producteurs de la rĂ©gion de Rosso. A la fin du mois de Janvier, date Ă laquelle, les petits producteurs s’en sont rendus compte, les GDM ont commencĂ© Ă vendre les fruits et lĂ©gumes sur les marchĂ©s locaux. Et ce, sans que les points francs ne soient levĂ©s! Une vente qui concerne essentiellement les bananes, les melons, et les pastèques. Des fruits qui, dĂ©sormais inondent les Ă©tals du MarchĂ© «Socim» et ceux jouxtant la MosquĂ©e marocaine de Nouakchott. Cette rĂ©orientation des produits des GDM dĂ©coulerait de la hausse des taxes douanières sĂ©nĂ©galaises oĂą une bonne partie (15 Ă 20 %) de la production Ă©tait Ă©coulĂ©e. Les prix de la GDM sont bas selon les propos des plaignants. «En nous alignant sur ces prix, nous risquons d’être Ă©touffĂ©s.» se dĂ©fend un agriculteur rossossois Le problème concernerait aussi la douane, qui affirme-t-on, chez les producteurs nationaux, «ne fait pas son travail de surveillance, consistant Ă Ă©valuer l’exportation effective de la totalitĂ© de la production agricole des GDM.» Or, force est de constater que la vente des produits des GDM sur le marchĂ© mauritanien provient en grande partie du manque de «scrupules»d’un Ă©chelon au moins des douanes. Dans cette situation, il semble de tout Ă©vidence, «impĂ©ratif de revenir Ă la clause prĂ©servant les intĂ©rĂŞts des petits producteurs» fait remarquer l’un des leurs. Le risque Ă©tant que les producteurs mauritaniens abandonnent les 40 000 ha amĂ©nagĂ©s depuis plus de dix ans. Sans quoi, tous les efforts fournis pour une auto suffisance alimentaire auront Ă©tĂ© vains… Les petits producteurs sont mobilisĂ©s, notamment en menaçant de s’en prendre directement aux camions des GDM. Les autoritĂ©s publiques n’ont toujours pas rĂ©agi…Ni les douanes, encore moins les GDM qui n’ont pas souhaitĂ© rĂ©pondre Ă nos questions…
Par Mamoudou Lamine Kane mamoudoukane@hotmail.com
|