MEMOIRES : Par Mohamed Abdellahi Ould Kharchi   
28/10/2008

Je regrette d’avoir fait preuve d’une «certaine naĂŻveté» rĂ©cemment, en faisant une analyse qui escamote certaines donnĂ©es, mais surtout parce que j’ai mal «apprĂ©cié»  le rĂ´le de certains acteurs et les « ramifications » effectives liĂ©es, malgrĂ© toute les tentatives de «camouflage», Ă  l’Histoire de ce Pays depuis bien avant l’indĂ©pendance en 1960.



Malgré l’âge et le Temps, je me suis souvenu de certains faits, puisque j’étais dans une position qui me permettait de bien les «enregistrer».
Au dĂ©but des annĂ©es 80, Sa MajestĂ© Hassan II  (que ALLAH le reçoive dans les très hautes Sphères de son Paradis) avait parlĂ© de la Mauritanie comme d’un « Etat-Tribus » et « qu’Elle risque de faire les frais de la solution des problèmes inter- MaghrĂ©bins ». C’est le sens de ce que Sa MajestĂ© avait dit, mĂŞme si la « formulation » Ă©tait diffĂ©rente.
Ayant Ă©tĂ© Ambassadeur auprès de sa MajestĂ© au dĂ©but des annĂ©es 90, c’est l’occasion ici de rendre un vibrant hommage aux qualitĂ©s de très grand Homme d’Etat, fin politique et visionnaire que je considère, sans aucune complaisance, comme l’un des plus Grands de la deuxième moitiĂ© du 20ème siècle. Il a Ă©tĂ© de la trempe des  AdĂ©nauer, Chou en Lai, Churchill, De Gaulle, Ho chi Minh, Nehru et bien d’autres Grands de ce Monde.
 En particulier, sa connaissance et son expĂ©rience de la Mauritanie et des Mauritaniens ont modelĂ© son attitude vis-Ă -vis de notre Pays et surtout sa vision de notre rĂ´le dans l’équilibre et la stabilitĂ© des deux sous RĂ©gions qui entourent la Mauritanie. D’aucuns pensent que les voisins  de la Mauritanie ont connaissance de «lignes rouges» que nos  partenaires Occidentaux traditionnels ont dĂ©finies en ce qui concerne notre Pays ! Parce que -qu’on le veuille ou pas- les Occidentaux globalement endossent la responsabilitĂ© de la stabilitĂ©  et la sĂ©curitĂ© dans le Monde, et particulièrement en Afrique. Ils le peuvent et le doivent parce que toute notion «d’intĂ©rĂŞt» commence par lĂ . Ceci est Ă©lĂ©mentaire pour celui qui ambitionne de «jouer Ă  l’Homme d’Etat», Ă  moins qu’il ne  soit  simple d’esprit ou d’un «niveau mĂ©diocre» ou qu’il ne soit simplement un exĂ©cutant !
 Pour revenir aux annĂ©es 80, quand Monsieur Taya a pris le Pouvoir, il a Ă©tĂ© « entourĂ© » Ă  l’instigation -disait-on- de l’un de ses Compagnons d’Armes, par quelques personnes bien choisies « pour les besoins  de la cause ».Ce compagnon, d’ailleurs,  devait  se maintenir, contre vents et marĂ©es, auprès de l’ancien Chef d’Etat pour endosser ainsi une très grande responsabilitĂ© dans la gestion des affaires de la «pĂ©riode Taya».
 Je m’excuse de ne pas ĂŞtre plus explicite Ă  cause des « moments difficiles » que traversent les LibertĂ©s dans ce Pays depuis quelques semaines. Le cas actuel de M. Isselmou O. Abdel Kader qui risque selon Radio France Internationale  la rĂ©clusion criminelle, donne Ă  rĂ©flĂ©chir, surtout quand on pense que le 6 AoĂ»t est «venu pour rectifier» et revigorer notre jeune DĂ©mocratie, « malade », parait-il, depuis sa naissance il y a 15 mois!
 M. Isselmou n’a pas critiquĂ© l’ArmĂ©e. Son niveau intellectuel, son parcours, son expĂ©rience et sa connaissance de la scène politique font  qu’il sait ce qu’il y a Ă  dire et qu’il sait aussi comment le dire. Son  incarcĂ©ration ne passe pas, elle aussi, en travers des «gorges»  comme le 6 AoĂ»t ! Sauf Ă©videmment  les gorges spĂ©ciales que ALLAH a faites pour tout avaler !!
En plus, dans une dĂ©mocratie, mĂŞme « jeune et malade » et qu’un PATRIOTE tente de « sauver » depuis le 6 AoĂ»t, il ne devrait pas y avoir de tabou ; Ă  supposer qu’il  ait Ă©tĂ© dit quelque chose de dĂ©rangeant pour l’ArmĂ©e ce qui n’est pas le cas. Ce qui n’est pas normal c’est de  confondre sciemment l’ArmĂ©e et le BASEP (puisqu’il faut appeler un chat un chat) !
Et aussi de laisser entendre que notre ArmĂ©e dans son ensemble est solidaire des agissements du commandant du BASEP. Le Basep, depuis sa crĂ©ation, est-il soumis Ă  l’autoritĂ© de l’ArmĂ©e ? Le chef d’Etat Major a-t-il jamais eu un droit de regard sur le BASEP ? C’est par ignorance que je pose ces questions et non une critique de l’ArmĂ©e que je sais ĂŞtre une ArmĂ©e rĂ©publicaine qui a eu l’occasion de s’acquitter de son devoir vis-Ă -vis du Pays et du Peuple Mauritanien. Et je ne fais pas de la complaisance, parce que cela n’a jamais Ă©tĂ© mon genre !! Faire mal Ă  l’ArmĂ©e  c’est  l’assimiler Ă  un individu quelle que soit la "force"  dont il dispose pour «faire»  et «dĂ©faire» les rĂ©gimes Ă  volontĂ© !
 Il semble donc que M.Taya, ait appris -vrai ou faux- qu’une de ces personnes dont on l’a entourĂ©,  se livrait Ă  quelque chose de rĂ©prĂ©hensible .Et cela ne pouvait ĂŞtre vrai mais M Taya Ă©tait très «frileux» dans certains domaines, tout au moins au dĂ©but de sa pĂ©riode de règne. Cette personne a donc Ă©tĂ© Ă©loignĂ©e de la proximitĂ© du chef de l’Etat. Toujours est-il que l’intĂ©ressĂ©   est «revenue» auprès du PrĂ©sident dans une situation bien plus «stratĂ©gique»  qui lui a permis de jouer le rĂ´le crucial qu’on connait, 20 ans après. Est-ce le hasard ou la coĂŻncidence ? Personne ne devrait «s’aventurer» Ă  tirer des conclusions que des dĂ©tails troublants incitent pourtant Ă  tirer.
Toutes ces rĂ©flexions me sont venues Ă  cause de la situation dont le Pays  supporte le fardeau depuis trois mois et qui nous interpelle tous. Mais c’est surtout la façon dont la « gestion » des affaires se dĂ©roule. Notre Pays est-il finalement ce que Sa MajestĂ© avait dit de nous ? Est-on aujourd’hui dans la «configuration» des annĂ©es 80, lĂ©gèrement «retouchĂ©e» ? Alliances tribales, dualitĂ© Nord-Sud ? DualitĂ© Marabouts- Guerriers ? L’erreur du PrĂ©sident actuel dĂ©mocratiquement Ă©lu serait-elle qu’il est Marabout ? Est-ce lĂ  le fondement de la pensĂ©e   de l’auteur du 6 AoĂ»t et de ses conseillers ? Est-ce une thĂ©orie formulĂ©e avant ou après  le 6 AoĂ»t ? C’est absolument incroyable qu’on puisse encore en  ĂŞtre lĂ  en 2008 !!
 Un fait est certain. Il y a depuis l’indĂ©pendance et mĂŞme avant des petits «groupes d’intĂ©rĂŞt» dont certains se disent « idĂ©ologiques » et qui considèrent la dĂ©mocratie incompatible avec leurs  intĂ©rĂŞts propres ! Parce que depuis et mĂŞme avant 78 (tout au moins pour l’un d’entre eux) leur stratĂ©gie a toujours Ă©tĂ© de constituer l’ossature de tout rĂ©gime qui s’installe pour en «profiter» au maximum. C’est aussi simple et ce n’est un secret pour personne en Mauritanie. Ils ont ainsi rĂ©ussi pendant 40 ans un tour de force qui prouve Ă  la fois leur intelligence, leur habiletĂ© et surtout leur «tranchant». D’aucuns pensent qu’ils Ă©taient lĂ  pour aider Ă  la «gestion» de la Transition qu’il n’a pas Ă©tĂ© possible, malgrĂ© tout, de rendre « infructueuse».Il semble que deux au moins de ces groupe et groupuscule soient les conseillers du «MaĂ®tre de l’heure» aujourd’hui. C’est probablement ce qui  explique la gestion dĂ©sastreuse de la situation depuis le 6 AoĂ»t. Ils ont convaincu l’auteur du 6 AoĂ»t que «la rĂ©ussite est dans la persĂ©vĂ©rance»et que c’est comme cela que Saddam avait rĂ©ussi ! Non !! Comment expliquer les contradictions et le dĂ©calage entre les premières professions de foi et les agissements qui ont suivi ! Comment expliquer  la sĂ©rĂ©nitĂ©  apparente du « Nouveau MaĂ®tre » et de son entourage devant les Ă©checs  subis chaque jour ?  Et  l’étau qui se  resserre chaque jour qui s’élève ? On se demande s’il n’y a pas une  petite brise «d’irresponsabilité» qui souffle quelque part sur les «sphères» du pouvoir!
En attendant que devient le Pays par rapport au quotidien du simple Mauritanien ? On est dérouté et l’on se perd dans les conjonctures, les spéculations et la recherche effrénée d’explications plus ou moins improbables !
C’est alors qu’on se demande  (comme je suis une nature pessimiste) si le mobile de tout cela n’est pas d’arriver Ă  une situation vĂ©ritablement de chaos et d’instabilitĂ© !Bien sĂ»r,c’est impensable et  personne en dehors d’un pessimiste endurci et imaginatif ne peut « cogiter » des « choses » aussi saugrenues ! Et qui peut envisager d’avoir un quelconque intĂ©rĂŞt dans le dĂ©sordre dans son Pays ! Certainement pas un «patriote» dont l’objectif dĂ©clarĂ© est de « sauver  la DĂ©mocratie nĂ©e en danger » depuis une quinzaine de mois !! C’est un simple cas d’école ! Le dĂ©sordre peut arranger qui ? Des trafiquants ? Il y en a beaucoup en Mauritanie ! Un Pays qui veut rĂ©gler un Problème ou rectifier des Frontières ? Un Pays ou un individu qui en veut tellement Ă  ce Pays pour se suffire de le «somaliser ou  Liberia-liser».Un paradoxe donne toujours lieu Ă  des raisonnements paradoxaux. Le 6 AoĂ»t et la situation qu’il a crĂ©Ă©e, la «gestion» de cette situation par le «MaĂ®tre de l’heure», les inquiĂ©tudes et les prĂ©occupations qui sont celles des Mauritaniens aujourd’hui,  tout cela relève de l’absurde !!
 Dans cette situation, il y a donc un objectif Ă©vident et invariable et qui ressort de toutes les dĂ©clarations et   propositions de sortie de crise «initiĂ©es» : consacrer le fait accompli par l’organisation d’élections PrĂ©sidentielles. Mais le non retour du PrĂ©sident dĂ©mocratiquement Ă©lu et «destitué» par la volontĂ© d’un homme qui en est Ă  sa deuxième «bravoure» du genre n’arrive pas Ă  trouver une seule   justification crĂ©dible sauf que «ce qui est fait est fait» et «le retour en  arrière est impossible». Ce pays mĂ©rite mieux que ça !!
 De cette manière on ne trouve aucun argument pour « faciliter la tâche aux amis Etrangers qu’on s’est «fait»  afin de pouvoir «aider».
On suppose que les Ă©missaires qui vont Ă  l’ExtĂ©rieur pour dĂ©fendre le cas doivent ĂŞtre bien « embĂŞtĂ©s ».En tant que Diplomate retraitĂ©, je n’aimerais certainement pas ĂŞtre Ă  leur place !! Mais peut-ĂŞtre que cette «situation d’inconfort» ne les dĂ©range pas outre mesure. 
 On peut alors se poser une simple question. Ces Ă©lections « tant dĂ©sirĂ©es » et qu’on veut imposer par la force des armes, on les cherche  pour le bĂ©nĂ©fice de qui ? On doit avoir quand mĂŞme une idĂ©e derrière la tĂŞte ! On dit que quand « l’aveugle vous propose un jeu de jet de pierres c’est qu’il en a une sous le pied» ! On ne peut pas destituer un PrĂ©sident dĂ©mocratiquement Ă©lu, sans avoir une idĂ©e d’un meilleur candidat  pour le Pays, si on a le moindre Ă©gard pour l’intĂ©rĂŞt du Pays. Cependant les dernières dĂ©clarations diffusĂ©es par certaines Radios Internationales et les missives Ă©crites Ă  certains chefs d’Etats Etrangers me poussent Ă  l’optimisme quand elles mettent en garde contre le retour du PrĂ©sident actuel dĂ©mocratiquement Ă©lu. Tant de patriotes Ă©minemment connus et respectĂ©s ne vont certainement pas prendre une telle position Ă  la lĂ©gère ! Ils ont Ă  coup sĂ»r « Ă©valuĂ© » objectivement les risques rĂ©els que prĂ©sente le retour de ce PrĂ©sident dĂ©mocratiquement Ă©lu.
Et pour que tant de personnalitĂ©s Ă©minentes signent une telle lettre Ă  un chef d’Etat EuropĂ©en, on ne peut en conclure qu’une chose : ce PrĂ©sident dĂ©mocratiquement Ă©lu  a dĂ» « faire beaucoup de mal Ă  ce Pays, durant  seulement 15 mois pendant  lesquels il Ă©tait plutĂ´t gardĂ©  «en otage par ses sponsors et  bienfaiteurs» qui ont fini par s’en dĂ©barrasser de façon assez expĂ©ditive  quand l’élĂ©gance n’a  pas pu avoir voix au chapitre!
  Ainsi, je me pose une question : Ces  candidats hypothĂ©tiques aux Ă©lections encore plus hypothĂ©tiques et que chaque «applaudisseur» politique au 6 AoĂ»t semble connaitre ou supposer ou espĂ©rer, qui sont-ils ?
Sont-ils viables pour le Pays ?  Peuvent-ils se prĂ©senter Ă  nous, Mauritaniens, pour solliciter nos suffrages ? Ou bien sont-ils plus mĂ©connus de nous que l’actuel PrĂ©sident qu’on a Ă©lu il y a 15 mois ? Ou bien sont ils moins mĂ©connus ? Ne pouvant, par manque de courage, poser des questions sur des personnes prĂ©cises, je vais raconter une «histoire bien Mauritanienne»: Durant la pĂ©riode coloniale un Administrateur voulait nommer Mohamed chef de tribu pour des considĂ©rations personnelles ou autres ; peu importe ! Il convoque la Djama-a et leur dit en substance : «je vous ai convoquĂ© pour vous donner Mohamed comme chef» ! L’un d’entre eux rĂ©pond au «commandant»: «oui, s’il accepte et si c’est possible!». Pour l’Administrateur la rĂ©ponse est on ne peut plus positive Ă©videmment. Mais pour la Djama-a c’est un refus cinglant : Mohamed sait que normalement il ne devrait pas se porter candidat parce qu’il est  impossible qu’il devienne notre Chef !.
 On me dira que cela n’a pas empĂŞchĂ© Mohamed d’être chef de cette tribu.


 MOHAMED ABDELLAHI KHARCHI
Ambassadeur, Ancien Ministre
Consultant International.


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