Opinion libre : Les putschistes comptent sur la lassitude de la communautĂ© internationale   
24/08/2008

« La communauté internationale condamne le coup d’Etat par principe. C’est normal. Mais cette attitude ne tardera pas à changer ».
Ces propos et d’autres allant dans le même sens, sont ressassés à longueur de journée par les laudateurs des putschistes sur les ondes de la Radio et de la Télévision mauritanienne.



Ils sont adressés, comme on peut s’y attendre, exclusivement à la communauté nationale dont l’inquiétude des sanctions qu’encoure le pays grandit tous les jours. Ils sont tenus, comme nos gouvernants militaires nous y ont habitués depuis 1978, « entre nous » ; c’est-à-dire à l’insu des étrangers. Le chef des putschistes lui-même les a tenus sur Al Jazeera, croyant naïvement que les américains et les français ne les entendront pas. Ils sont révélateurs d’un syndrome que nos gouvernants militaires ont développé depuis toujours : la duplicité. Un discours destiné à la consommation intérieure, un autre dirigé vers l’extérieur. Des engagements pris devant la communauté internationale et des promesses contraires faites aux populations…
Mais ces propos sont surtout révélateurs du grand mensonge des auteurs du putsch de 2005 au sujet de la restitution du pouvoir aux civils et sur lequel ils ont bâti toute leur stratégie de conservation de ce pouvoir.
Qu’on se souvienne bien du film des Ă©vĂ©nements : Lorsque la garde de Ould Taya l’a renversĂ© parce qu’il avait, dit-on, dĂ©cidĂ© d’une part de remplacer ses chefs et d’autre part d’envoyer ceux-ci guerroyer contre Al QaĂŻda dans le grand  Sahara, la communautĂ© internationale a condamnĂ© vigoureusement, l’UA a exclu la Mauritanie de ses rangs et les bailleurs de fonds ont menacĂ© de couper les vivres au pays. Craignant les consĂ©quences dĂ©sastreuses pour le pays d’une telle situation, le Colonel Ely (qui est un peu un homme d’Etat) prit langue avec les partis politiques et les acteurs nationaux et signa avec eux et l’union europĂ©enne la fameuse plate-forme des engagements de la junte d’organiser des Ă©lections dans moins de deux ans, de ne pas se prĂ©senter, etc.
Mais les auteurs, les vrais, du putsch, n’avaient pas l’intention, eux de respecter ces engagements et la rue mauritanienne l’a dit ces jours-là, parce qu’elle connaît bien ses officiers politiciens et surtout les aides de camp de Ould Taya, formés à son école d’opacité et d’attachement maladif au pouvoir : « Ils vont organiser des élections et élire un président fantoche qui restera au pouvoir un ou deux ans et passera la main au Colonel Ely ». C’est ce que répétaient les mauritaniens tous les jours, « entre nous ».
Et lorsque le Président Ould Cheikh Abdallahi a été élu, jamais les mauritaniens n’ont cru un seul instant qu’il exerçait réellement le pouvoir-ce qui s’est révélé vrai du reste- et jamais ils n’ont douté qu’un jour il allait se réveiller sur une démission ou une destitution par empêchement sanitaire ou autre du Président qu’ils ont fini par aimer pour sa franchise et pour sa bonhomie frisant la naïveté.
Le scĂ©nario qui a abouti le 06 aoĂ»t dernier Ă  l’agression tragique contre la dĂ©mocratie n’est donc pas le fruit du hasard, c’est un travail minutieusement mais maladroitement montĂ© par les « GĂ©nĂ©raux »  Aziz et Ghazouani qui ont embarquĂ© avec eux un autre gĂ©nĂ©ral «noir» pour les besoins d’impliquer les officiers de la vallĂ©e.
Mais lĂ  oĂą le bas blesse, c’est qu’ils ont cherchĂ© par tous les moyens Ă  tromper la communautĂ© internationale en utilisant des Parlementaires (qu’ils ont eux-mĂŞmes fait Ă©lire pour les besoins de cause) ; ils ont cherchĂ© Ă  discrĂ©diter le PrĂ©sident Sidi en le prĂ©sentant comme un « islamiste » alliĂ©s des terroristes ; ils ont attaquĂ©, contre toute dĂ©cence, l’épouse du chef de l’Etat ; ils ont attaquĂ© tous ceux qui ont tenu tĂŞte Ă  leurs plans machiavĂ©liques (M’BarĂ©, Messoud, etc)… Mais tout ces plans se sont toujours fracassĂ©s sur la rĂ©alitĂ© de l’homme que les mauritaniens ont Ă©lu en 2007 : dĂ©mocrate convaincu, moderne frisant la laĂŻcitĂ© et hautement attachĂ© au respect des institutions et de son peuple. Les parlementaires, il les a laissĂ© vocifĂ©rer et sucer les deux gĂ©nĂ©raux jusqu’à l’os, avant de se mettre Ă  les dĂ©baucher un Ă  un ; l’Occident, grâce Ă  une communication prĂ©sidentielle dĂ©terminĂ©e et centrĂ©e sur son image, il a toujours rĂ©ussi Ă  dĂ©jouer les pièges que ses adversaires embusquĂ©s ont tendu dans ses palais et chancelleries. Il a mĂŞme reçu, au cours des derniers jours avant le putsch, l’Ambassadeur d’IsraĂ«l et laminĂ© les thèses dĂ©veloppĂ©es sur lui Ă   propos de la question des relations avec IsraĂ«l et les juifs en gĂ©nĂ©ral. Eux-mĂŞmes, ils les a poussĂ©s Ă  la faute en les limogeant d’un seul coup dans un sursaut d’autoritĂ© qui lui vaut la sympathie de tous les mauritaniens dignes et patriotes !
Tout leur échafaudage, les putschistes l’ont construit autour d’un postulat très mauritanien : Les occidentaux sont idiots, ils suffit d’arguer de la défense des institutions, de tenir un discours démocratique et de promettre des élections, , ils vont accepter le putsch et jouer le jeu. C’est ce qu’a fait Ould Taya durant plus de 20ans : avec les programmes de développement d’abord (il prenait l’argent du FMI et de la BM qu’il orientait vers la gabegie et les prébendes et présentait des chiffres faux et des réalisations truquées aux bailleurs) ; puis avec la démocratie (il promulguait une constitution des plus démocratiques, organisait des élections des plus pluralistes et truquait tout pour être élu ou faire élire ses candidats). Et dans le secret de son palais, avec ses aides de camp, son DGSN et ses intellos spécialistes des montages hypocrites, ils se gaussait ainsi : « Les occidentaux, sont idiots. Ils leur suffit des engagements de principe ».
C’est le même langage que tiennent aujourd’hui les gouvernants militaires de notre pays, en misant sur une lassitude de la communauté internationale qui condamne le putsch.
La dernière, plus belle encore, est qu’ils cherchent maintenant à monter les populations contre la résistance au putsch : « Ils ont appelé la communauté internationale à couper les vivres au peuple mauritanien ». Ca aussi, ils le disent « entre nous ».
Que tous les dirigeant  du monde libre le sachent : Le sort d’un peuple que certains de ses militaires prennent en otage depuis trente ans est entre leurs mains. Il ne faut pas qu’ils se lassent. Ce coup d’Etat ne doit pas ĂŞtre acceptĂ© et ses auteurs doivent partir, coĂ»te que coĂ»te. Ou alors ils auront trois millions de citoyens innocents sur la conscience !

Adama Sow, dit Yaya


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