Me Fatimata Mbaye raconte son calvaire   
01/04/2008

C’est un concours de circonstances serons-nous tenté de dire. Notre célèbre avocate, Me Fatimata M’Baye, avocat au barreau de Nouakchott, vice présidente de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme (FIDH), présidente de l’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme (AMDH) et membre de la commission nationale des droits de l’homme, a subi, le 11 mars dernier, à l’aéroport Roissy Charles-De-Gaulle, le pire traitement de la part de la police française.



Dans l’avion qui devait la conduire en Mauritanie, le vol AF N°765, alors qu’elle revenait du Caire oĂą elle a pris part Ă  une rĂ©union de la FIDH pour l’appui des ONG membres de cette organisation internationale des droits de l’homme, grande fut sa surprise de voir un jeune mauritanien rĂ©pondant au nom de Mohamed SidibĂ© originaire du Guidimakha, ligotĂ© et avec un morceau de tissu attachĂ© Ă  sa bouche pour l’empĂŞcher de crier. Elle s’indigne, proteste et demande aux policiers chargĂ©s de sa reconduction, de le dĂ©tacher. Cette scène inhumaine qui a alertĂ© plus d’un Ă  cause des cris de secours du jeune homme, n’a pas Ă©tĂ© du goĂ»t de notre avocate. Elle ne fut pas seule dans son indignation. Un mĂ©decin français, Pierre-Marie Bernard qui Ă©tait aussi dans le mĂŞme vol Ă  destination de Nouakchott a eu la mĂŞme rĂ©action d’indignation. Devant ce traitement « inhumain et dĂ©gradant Â», les protestataires qui n’ont pas arrĂŞtĂ© de demander Ă  la police de libĂ©rer le jeune homme de cette situation, ont reçu l’appui et le secours du commandant de bord qui demandera aux policiers de le dĂ©tacher. N’ayant pas obtenu satisfaction, le commandant a dĂ©cidĂ© tout bonnement de faire dĂ©barquer le jeune homme. EcoeurĂ©s par ce comportement du commandant et des deux protestataires, les agents de la PAF sollicitent un renfort et font conduire Me Fatimata M’Baye et Pierre-Marie au Commissariat de l’aĂ©roport oĂą ils seront mis en garde Ă  vue pendant 24 heures avant d’être libĂ©rĂ©s le lendemain 12 mars Ă  15h45 et ce, grâce Ă  l’intervention de la FIDH qui a mobilisĂ© un pool d’avocats après avoir Ă©tĂ© mis au parfum de l’affaire.
«J’ai Ă©tĂ© dĂ©pouillĂ©e de tous mes objets de femme, mĂŞme mon foulard. On m’a dĂ©shabillĂ© comme une malpropre et enfermĂ©e dans une cellule crasseuse de la police judiciaire oĂą j’ai Ă©tĂ© empĂŞchĂ©e de faire mes prières» a dĂ©clarĂ© Me Fatimata M’Baye, visiblement très remontĂ©e par ce traitement d’un autre âge. Elle poursuit, «J’ai dormi dans un semblant de lit de campagne accrochĂ© au mur». Â«Nous avons protestĂ© non pas contre la reconduction Ă  la frontière mais contre les conditions et la forme. C’est pourquoi nous avons portĂ© plainte contre les agissements de la police Ă  notre endroit Â». MaĂ®tre M’Baye trouve que le traitement qu’elle a subi Â«n’est autre qu’un viol, demander Ă  la personne de se dĂ©shabiller comme un ver de terre ensuite de se permettre de vouloir fouiller son intimitĂ© etc. je pense que ça c’est des pratiques inhumaines et dĂ©gradantes». Â«C’est inadmissible aujourd’hui de dire que la France qui est une rĂ©fĂ©rence mondiale et internationale reconnue comme Ă©tant un pays des droits de l’homme qui retourne sa veste aujourd’hui se retrouve en train d’appliquer des mĂ©thodes barbares qui sont dĂ©criĂ©es sous d’autres cieux Â» ajoute-t-elle. Notre avocate soutient qu’elle et le français Pierre-Marie Bernard n’ont commis aucun crime mais ont tout simplement protestĂ© contre un traitement dĂ©gradant. Elle a rĂ©vĂ©lĂ© que ce mĂ©decin français qui venait pour prendre service dans une sociĂ©tĂ© pĂ©trolière de la place, prĂ©cisĂ©ment dans le site de Chinguitty, s’est vu retourner par son employeur au risque de perdre son boulot.
Dans un communiquĂ© distribuĂ© Ă  la presse nationale et internationale venue prendre part au point de presse, les organisations de dĂ©fense des droits de l’homme mauritaniennes et la fĂ©dĂ©ration internationale des ligues des droits de l’homme ont manifestĂ© leur indignation face Ă  cet acte qu’elles considèrent aberrant et gĂŞnant. Et lancent Ă  cet effet « un appel urgent aux autoritĂ©s françaises d’intimer Ă  leurs forces de sĂ©curitĂ© aĂ©roportuaires de respecter les droits fondamentaux de la personne humaine et de montrer moins d’agressivitĂ© dans l’exercice de leur mission Â». Elles exigent dans le mĂŞme ordre d’idĂ©es que les « pays africains et autres qui ont signĂ© des accords bilatĂ©raux concernant le rapatriement ou l’expulsion des Ă©trangers, ressortissants de ces pays, de l’espace europĂ©en de suivre de près ces mesures d’expulsion et de reconduite aux frontières concernant leurs citoyens respectifs et de leur assurer le devoir d’assistance».
Beaucoup d’observateurs s’accordent Ă  dire que si au pays berceau des droits de l’homme l’on se permet de se livrer Ă  de telles pratiques, cela suscite beaucoup d’interrogations.
Compte rendu Ibou Badiane


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