Assurances: Un secteur en quĂŞte de confiance   
27/01/2008

Si les sociétés d’assurance sont pléthores en Mauritanie en comparaison de sa population d’à peine 3 millions d’habitants, elles font l’essentiel de leurs chiffres d’affaires, sur les assurances légalement obligatoires (automobile et voyage), pour le reste, la confiance que les consommateurs leur accordent n’est pas encore assez forte pour développer ce secteur encore embryonnaire en Mauritanie, comme dans la plupart des pays africains par ailleurs.



La situation actuelle du marché
Les primes émises par les sept sociétés d’assurance (trois doivent s’installer prochainement dont ASCOMA et GMA) en 2004 étaient d’un peu moins de 2,5 milliards d’ouguiyas selon la Direction du contrôle des assurances (10 millions de dollars). Ce chiffre d’affaires est en croissance rapide et régulière, toutefois le PIB étant estimé à 326 milliards en 2004, la pénétration de l’assurance ne serait que de 0,75% du PIB, ce qui est un taux extrêmement faible, même par rapport à des pays dont le niveau de développement économique est comparable à celui de la Mauritanie. Quant à la densité de l’assurance (primes annuelles moyennes par habitant), elle s’élèverait à 841 ouguiyas, soit un peu plus de 3 dollars (au Maroc 37 dollars, 10 au Sénégal, 8,4 en Algérie...), une misère donc. Il est impossible, même pour la direction du contrôle de se procurer les états financiers annuels des compagnies. Les assurés ne souscrivent que les assurances légalement obligatoires et encore seulement celles dont la souscription est effectivement contrôlée (responsabilité civile des propriétaires de véhicules, et l’assurance de voyage). Cela est essentiellement dû aux particularités du marché mauritanien de l’assurance: absence d’intermédiaires de l’assurance, l’émission des contrats n’est pas effective pour les contrats, qui pour la plupart s’en moquent royalement d’ailleurs, l’essentiel étant d’être couvert juridiquement en cas d’accident, et pouvoir la présenter à un éventuel contrôle de police; les garanties couvertes par la CNSS limitent le champs d’activité des compagnies mauritaniennes; la faible barémisation des accidents corporel selon le principe de la "diya", et enfin l’absence d’un marché financier.
L’inspection gĂ©nĂ©rale de l’Etat (IGE) avait reçu, en novembre 2007, une plainte des sociĂ©tĂ©s nationales d’assurances contre les irrĂ©gularitĂ©s constatĂ©es dans l’attribution du marchĂ© des assurances du groupe de la SNIM Ă  un unique assureur la NASR, qui dĂ©tient par ailleurs ce monopole depuis plusieurs annĂ©es. Le Directeur GĂ©nĂ©ral de la SNIM, Mohamed Ali Ould Sidi Mohamed, explique la raison d’un tel monopole pour le titre de l’exercice 2008: «S’agissant du système d’évaluation, il convient de noter qu’il est basĂ© principalement sur les capacitĂ©s de rĂ©assurance. C’est pourquoi, dans le cadre de cet appel d’offres, la SNIM a accordĂ© une grande importance au placement en RĂ©assurance conventionnelle et facultative, Ă  la qualitĂ© et au rang des RĂ©assureurs disposĂ©s Ă  accepter des parts des risques SNIM en traitĂ©s et facultatives. En effet, les capitaux Ă  assurer en Assurance de dommage et les limites de garantie en Assurances de ResponsabilitĂ©s Civiles sont très Ă©levĂ©s et dĂ©passent très largement les capacitĂ©s techniques et financières de toutes les sociĂ©tĂ©s d’assurances nationales. A ce titre, hormis la NASR, aucun soumissionnaire n’a fourni pour les diffĂ©rentes Polices (Incendie, Engineering, TFM, RC et Auto) une couverture complète garantie par des RĂ©assureurs de 1er ordre conformĂ©ment aux stipulations de l’AO Assurance 2008.» Une telle dĂ©cision de la SNIM mettait juste encore plus en exergue la faiblesse financière des sociĂ©tĂ©s d’assurances nationales, notamment au niveau de la couverture de risques pour une structure internationale comme la sociĂ©tĂ© minière, qui a besoin Ă  dĂ©faut d’un assureur sĂ»r, au moins que ce dernier soit couvert par des rĂ©assureurs fiables internationalement.

La mauvaise réputation des assureurs
Les compagnies d’assurance nationales sont donc extrĂŞmement faibles. La structure mĂŞme du marchĂ© est en cause, mais pas uniquement. Si le marchĂ© est relativement petit, et qu’à cela s’ajoute la pauvretĂ© de la population (dont presque la moitiĂ© gagne Ă  peine un dollar par jour!), plus des raisons culturelles et religieuses qui tendent Ă  un comportement fataliste face aux alĂ©as de la vie, la faiblesse de l’assurance en Mauritanie se justifie plus largement par la mauvaise rĂ©putation (le plus souvent justifiĂ©e) des assureurs. En effet, devant la mauvaise volontĂ© des assureurs Ă  remplir leur partie du contrat d’assurance, lors des accidents automobiles (qui est le contrat d’assurance le plus rĂ©pandu), les clients potentiels ne voient pas la nĂ©cessitĂ© le recours Ă  de telles compagnies. Cette obligation de l’assureur consiste, conformĂ©ment Ă  l’article 10 du code des assurance, «lors de la rĂ©alisation du risque ou Ă  l’échĂ©ance du contrat, Ă  exĂ©cuter dans le dĂ©lai convenu la prestation dĂ©terminĂ©e par le contrat et ne peut ĂŞtre tenu au delĂ . A chaque Ă©chĂ©ance de prime, l’assureur est tenu d’aviser l’assurĂ© ou la personne chargĂ©e du paiement de prime et du montant de la somme dont il est redevable.» Les compagnies d’assurance sont donc gĂ©rĂ©es sans la rigueur professionnelle et lĂ©gale nĂ©cessaire Ă  la pĂ©rennitĂ© et la confiance dans ce secteur. Un professionnel du secteur pointe surtout du doigt «des produits d’assurance mal adaptĂ©s Ă  la rĂ©alitĂ© mauritanienne et excessivement chers». «Mais ce n’est guère Ă©tonnant si on tient compte du fait que les assurances n’échappent pas au phĂ©nomène de «commerce» que subit toute activitĂ© gĂ©nĂ©ratrice de gros bĂ©nĂ©fices, et malheureusement par des non-professionnels. Combien de pharmacies crĂ©Ă©es et gĂ©rĂ©es par des non-pharmaciens? Une majoritĂ©. À l’instar, les assurances n’échappent pas Ă  la règle. Il y a un dĂ©ficit de professionnels dans le secteur.» continue-t-il. L’implantation d’une compagnie Ă©trangère comme Atlantic Londongate, et l’arrivĂ©e prochaine de ASCOMA notamment (des vrais et solides professionnels du secteur), donne un Ă©ventail de choix encore plus large au consommateur. Et nul doute, que de la mĂŞme façon que les banques Ă©trangères ont redynamisĂ© le secteur bancaire sclĂ©rosĂ© et abusif mauritanien, les compagnies d’assurance Ă©trangères vont tirer vers le haut, la qualitĂ© des produits d’assurance, et leur adĂ©quation avec la rĂ©alitĂ© mauritanienne.
Mamoudou Lamine Kane


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